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Swisscom renonce à la vente de ses antennes

Un des 400 sites de Swisscom, celui du Saentis. Keystone

Sous la pression du gouvernement, Swisscom annule la vente des 3000 installations qui assurent en Suisse la diffusion des programmes radio-tv. Jens Alder, patron de Swisscom, a concédé qu´il avait sous-estimé le caractère symbolique de ces installations.

Spectaculaire et inattendue, la décision prise jeudi par Swisscom de renoncer à vendre son réseau d’antennes et d’émetteurs radio-tv est riche d’enseignements. Elle montre notamment que dans un Etat démocratique, toute privatisation – totale ou partielle – d’un service public ne peut se faire à la légère.

L’intérêt national, avec la dimension sécuritaire de la question ainsi que le poids de l’opinion publique ont pesé sur la décision de Swisscom. C’est ce que l’on reconnaît implicitement à la direction de l’entreprise.

L’attachement de la population à «ses» antennes est une donnée subjective incontournable. Sans compter que plusieurs de ces installations se trouvent sur des sites chers aux cœurs de bien des Suisses: Jungfrau, Righi, Chasseral, Säntis.

Quant à l’aspect sécurité nationale du dossier, l’heure semble être aux propos tranchés. Avec d’un côté les commissions de sécurité des deux Chambres fédérales qui exprimé leur inquiétude à plusieurs reprises. Pour les députés en effet, la vente de certains émetteurs ou antennes à des privés auraient pu mettre en péril la sécurité du pays.

Cet avis n’est pas partagé par Swisscom. En tant qu’entreprise nationale, il se devait de tenir compte des réactions que sa décision avait suscité dans le monde politique. Dans une motion approuvée à l’unanimité, le Conseil des Etats – chambre basse du Parlement – avait exigé du gouvernement qu’il tienne mieux compte des «besoins vitaux du pays en matière de télécommunication».

Chez Swisscom, on souligne cependant avec force que la décision a été prise de manière autonome et sereine. Et que des motifs techniques – la vente aurait été «très compliquée» – mais aussi commerciaux auraient joué un rôle non-négligeable.

En fait, on peut penser que les raisons commerciales et les raisons politiques invoquées ont été déterminantes. Selon nos informations, elles sont même liées.

Il semble en effet que la solution idéale à laquelle beaucoup pensaient depuis un certain temps, à savoir la vente des antennes à SRG SSR idée suisse, s’est finalement révélée impraticable.

L’offre financière de SRG SSR idée suisse aurait été nettement inférieure à celle du plus offrant. Selon nos sources, il y a eu cinq offres, dont la plus élevée aurait atteint 800 millions de francs.

Or, le gouvernement, malgré le fait qu’il demeure pour l’instant actionnaire majoritaire de Swisscom, n’était visiblement pas disposé à exiger que l’offre de la SSR soit retenue. Le ministre chargé de la communication, le socialiste Moritz Leuenberger, s’en était expliqué jeudi dernier en déclarant au Parlement que dans une société capitaliste – cotée à la Bourse -, l’actionnaire principal avait aussi certaines «responsabilités» envers les actionnaires minoritaires.

Il semble en revanche certain que le gouvernement et des milieux influents du Parlement aient vivement «conseillé» Swisscom d’abandonner entièrement ses projets de vente.

Dans le monde politique suisse, à gauche comme à droite, l’heure est à la satisfaction. Et ceci, même si l’on regrette que les principaux responsables – Swisscom, SSR, gouvernement fédéral – n’aient pas agi de manière plus «cohérente».

Une chose est néanmoins sûre. Selon Pierre Paupe, on vient d’assister à une véritable première. Le président de la Commission de sécurité du Conseil des Etats constate que les institutions politiques du pays sont parvenues à imposer leurs vues sur les conséquences d’une privatisation…

Michel Walter

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