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Télécoms: l’UMTS avance à pas feutrés

L'UMTS, c'est l'âge de la vidéo mobile. Mais les offres restent chères et les contenus rares. Keystone

Avec plus de trois ans de retard sur ses premiers plans, Swisscom a ouvert au grand public son réseau de téléphonie mobile de troisième génération.

Analyse des nouveaux services offerts par cette technologie qui mise sur l’image mais cherche encore son modèle économique.

Cela devait être le Graal technologique du monde des télécommunications. Début 2000, les opérateurs dépensaient plus de 100 milliards d’euros pour les licences UMTS européennes, la téléphonie mobile de la 3e générations (3G).

Un excès qui a engendré une débâcle. Fin 2001, les dettes des six principaux opérateurs du Vieux Continent atteignaient 215 milliards d’euros.

La prudence après l’euphorie



Aujourd’hui, l’UMTS a fini sa traversée du désert et la plupart des grands acteurs du marché ont lancé leur offre 3G. Une commercialisation en sourdine, qui contraste avec l’euphorie de l’époque.

La 3G revient par la petite porte, avec des promesses limitées. Elle ne concerne que les grandes agglomérations et une diffusion généralisée n’est pas prévue avant plusieurs années. Les régions périphériques devront se contenter du GPRS, voire du simple GSM.

Pire, en quatre ans, des nouvelles technologies telles que l’Edge ou le WiFi, sont venues brouiller les cartes. Les certitudes de 2000 sont devenues des doutes et des questions sans réponses claires.

L’important actuellement, c’est de se connecter sans fil avec n’importe quel appareil (téléphone mobile, smartphone ou ordinateur portable) pour accéder à Internet, échanger des données, des images, de la vidéo et, bien sûr, se parler.

Peu importe le réseau, pour autant que la liaison soit rapide, fonctionne parfaitement et qu’elle ait une grande capacité de transmission.

«Les utilisateurs mobiles ne se soucient plus de la technologie mais sont prêts à payer pour des applications de divertissements, ou qui leur font gagner du temps», résume Simon Johnson, consultant en télécommunications.

Swisscom essuie les plâtres



L’homme d’affaires doit pouvoir organiser, où qu’il se trouve et en quelques minutes, une vidéo conférence avec ses collaborateurs, ou vérifier ses e-mails; l’adolescent télécharger en vingt secondes le dernier tube musical à la mode ou jouer en réseau avec ses amis; et le passionné de football voir en direct les buts de son équipe favorite ou suivre le téléjournal.

Tout ceci à un prix très raisonnable, de préférence un coût mensuel forfaitaire. Voilà le copieux cahier des charges auquel devront répondre l’UMTS et les autres technologies mobiles.

C’est seulement lorsque le fastidieux «veuillez patienter, connexion en cours» disparaîtra des écrans que les clients adopteront en masse un service. Or, les obstacles sont encore nombreux.

En Suisse, Swisscom joue les pionniers. L’opérateur commercialise son service 3G depuis novembre, mais seuls les clients qui possèdent l’un des rares appareils compatibles peuvent l’utiliser. D’ici six mois, une trentaine de nouveaux modèles conçus par neuf fabricants différents devraient être disponibles.

Le géant bleu a investi cette année un demi-milliard de francs pour développer son infrastructure UMTS. «Notre but est d’offrir à tous nos clients toutes les applications et services possibles à tout moment, n’importe où en toute liberté, sans aucune contrainte», explique Carsten Schloter, directeur général de Swisscom Mobile.

Du coté de la concurrence, on temporise. Orange est en train d’étendre sa couverture, mais n’annonce pas de date pour l’ouverture de son réseau, alors que Sunrise n’envisage un lancement grand public qu’au second semestre 2005.

«Nous ne voulons pas essuyer les plâtres. Nous préférons attendre, pour offrir à nos clients un service qui soit d’emblée efficient, tant pour la voix que pour le transfert de données, et avec des mobiles de qualité», précise Mathieu Janin, porte-parole de Sunrise.

L’ère de la vidéo mobile



Il semble clair qu’il faudra au moins deux ans d’apprentissage avant que la 3G atteigne la maturité et que des appareils vraiment performants soient disponibles.

Le modèle économique de l’UMTS demeure l’inconnue principale et aucun opérateur ne se hasarde à faire des prévisions de rentabilité. Quel prix les clients sont-ils disposés à payer et pour quels services?

Swisscom propose notamment dix chaînes de télévision live et la visiophonie. Mais le prix est élevé: 4 francs les 30 minutes de TV, 8 francs pour deux heures ou 12 francs la journée.

Si le signal UMTS est bon, la qualité de l’image d’un programme TV est excellente, même sur le petit écran du mobile. Mais, dès que l’utilisateur se déplace ou se trouve dans une zone mal couverte par la 3G, l’image se saccade ou disparaît.

C’est souvent le cas à l’intérieur des bâtiments. Bien que Swisscom se vante de couvrir en UMTS 90% de la population suisse et 45% du territoire, seul 56% des Helvètes captent la 3G à l’intérieur de leur immeuble.

Et pas question de regarder la TV dans le train. Pour l’heure, seule la ligne Zurich-Berne est en partie équipée avec des antennes 3G.

Bataille pour les contenus



Les opérateurs espèrent que les nouveaux produits accroîtront le revenu mensuel généré par chaque abonné. Mais, en aparté, ils admettent qu’ils n’attendent pas de miracle de la 3G, en tous cas pas avant l’éventuelle émergence d’un service de masse.

Il faudra d’abord équiper les abonnés avec des terminaux 3G avant de vouloir développer les services et espérer en tirer de nouveaux revenus.

Chez Nokia, on estime que le décollage sera lent. La transmission de données (vidéo, musique, navigation sur Internet) représentait 10% du trafic total des réseaux mobiles en 2003, un chiffre qui devrait atteindre 30% au mieux en 2007.

Le défi des opérateurs consistera à dégager un revenu moyen par utilisateur élevé grâce aux services multimédia, via un modèle économique attractif pour les clients, mais suffisamment rémunérateur pour les éditeurs de contenus.

La bataille sera rude car il faudra investir dans un service sans savoir préalablement s’il aura du succès auprès des clients.

Car si pour l’instant les abonnés se font attendre, la bagarre sur les droits sportifs, musicaux ou TV s’est déjà engagée. Les opérateurs UMTS vont donc devoir jongler entre des dépenses certaines pour acquérir des contenus, dont ils ne seront pas sûrs du succès auprès des clients, et des recettes aléatoires qui dépendront de la demande des abonnés.

swissinfo, Luigino Canal

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– L’UMTS, ou téléphonie mobile de la 3e génération, tarde à tenir ses promesses.

– Il y quatre ans, les opérateurs ont dépensé des fortunes pour acquérir les licences, mais l’arrivée du produit sur le marché a pris du retard.

– Actuellement en Suisse, le réseau est encore trop lacunaire et les offres de contenu trop rares et trop chères.

– De plus, l’arrivée de nouveaux services sans fil à haut débit, comme le WiFi, pourraient venir supplanter l’UMTS.

– Ce que veut le client: pouvoir se connecter à Internet, échanger des images, des sons ou de la vidéo partout, sans fil, rapidement et à moindres coûts. Que ce soit avec un téléphone, un ordinateur ou tout autre terminal.

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