Des perspectives suisses en 10 langues

Turquie-UE: la Suisse attend les négociations

Le premier ministre Erdogan a été fêté à son retour de Bruxelles. Keystone

Micheline Calmy-Rey, ministre des Affaires étrangères, se montre prudente tandis que les partis sont partagés.

Le jugement que la Suisse portera sur l’éventuelle entrée de la Turquie dans l’Union européenne (UE) dépendra beaucoup du résultat des négociations.

En cas d’adhésion turque, les accords bilatéraux I et II entre la Suisse et l’UE ainsi que l’accord de libre-échange de 1972 verraient leur terrain d’application étendu. Ce qui offrirait un marché élargi à l’économie helvétique, a souligné Mme Calmy-Rey à l’ats.

Quant à la libre circulation des personnes, sa mise en oeuvre avec la Turquie «dépendra largement des négociations avec la Commission européenne». Il est question de délai transitoire, voire de dérogation permanente, a relevé la cheffe du ministère suisse des affaires étrangères (DFAE).

«Si la Turquie devait adhérer à l’UE, il est clair que Berne insisterait pour que la libre circulation se réalise pas à pas et de façon contrôlée», a-t-elle ajouté.

Champ bilatéral restreint

Politiquement, «le champ bilatéral se restreint pour la Suisse», a reconnu la conseillère fédérale. Berne va toutefois s’efforcer de maintenir ses relations, et de «rester présente dans son partenariat avec la Turquie».

La cheffe du DFAE prévoit de se rendre sur place en mars. Son collègue à l’Economie, Joseph Deiss, devrait également visiter Ankara dans le courant de l’année prochaine.

Valeurs communes

«Les efforts pour se conformer aux critères d’adhésion à l’UE montrent la volonté d’Ankara de partager des valeurs communes», a encore estimé Mme Calmy-Rey.

«On voit aussi que les croyances religieuses du monde musulman sont compatibles avec les valeurs européennes de démocratie et d’Etat laïc».

Une entrée de la Turquie dans l’UE pourrait également contribuer à stabiliser le Moyen-Orient, espère la conseillère fédérale. Enfin, elle renforcerait l’UE comme «Europe-puissance», non seulement en termes géostratégiques, mais aussi de population et de produit intérieur brut.

Les partis sont partagés

Du côté des partis politiques suisses, les réactions sont partagées. Le Parti socialiste salue l’accord de Bruxelles: «il est juste dommage que la Suisse, non-membre de l’UE, ne soit pas représentée dans les pourparlers», a estimé le secrétaire général Reto Gamma.

La situation des droits de l’homme en Turquie devrait progresser, a-t-il ajouté. Concernant la libre circulation des personnes, des mesures d’accompagnement devraient être prises en Suisse.

Une opinion partagée par les Verts, qui voient aussi «un bon signe pour la population musulmane en Europe». Selon Hubert Zurkinden, secrétaire général du parti, la Turquie pourrait jouer un rôle de pont dans le monde musulman.

Pour Marianne Kleiner, vice-présidente des radicaux (droite), la situation devrait être «acceptable» pour la Suisse du moment que tous les pays de l’UE approuvent l’adhésion de la Turquie.

Enormes difficultés

Pour l’Union démocratique du centre (UDC, droite dure) au contraire, celle-ci entraînerait d’énormes difficultés.

«Elle étendrait notamment les frontières extérieures de l’espace Schengen aux confins de l’Irak et de l’Iran», relève Gregor Rutz, secrétaire général, qui voit aussi une source de problèmes dans les différences culturelles.

Doris Leuthard, présidente du Parti démocrate-chrétien (PDC, centre), estime elle que la Turquie devrait progresser comme Etat de droit avant de prétendre adhérer à l’UE.

Problème kurde

Satisfaction enfin au Centre kurde des droits de l’homme à Genève, pour qui la décision de vendredi «devrait aider la Turquie à se démocratiser et à trouver une solution au problème kurde».

swissinfo et les agences

Plus de 80’000 citoyens turcs vivent en Suisse.
9000 personnes ont la double nationalité suisse et turque.
En 2003, la Suisse a été le 6e investisseur étranger en Turquie avec plus d’un milliard de francs.
Cette même année, elle était également le 7e pays exportateur avec 1,6 milliard.

– Le 17 décembre à Bruxelles, les 25 membres de l’UE sont parvenus à un accord global avec la Turquie sur les négociations d’adhésion qui s’ouvriront le 3 octobre 2005.

– Cet accord évoque la reconnaissance de l’île de Chypre par Ankara.

– M. Erdogan va signer une déclaration l’engageant à étendre avant le 3 octobre son union douanière avec l’UE aux 10 nouveaux membres de l’Union.

– En cas d’adhésion, avec 86 millions d’habitants en 2020 (70 millions en 2004), la Turquie deviendrait le pays le plus peuplé de l’UE.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision