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Disparition du vainqueur de l’Eiger

Heinrich Harrer en compagnie de son ancien élève, le dalaï-lama. Keystone

L'alpiniste autrichien Heinrich Harrer est mort samedi à l'âge de 93 ans. En 1938, il avait été le premier à vaincre la mythique face nord de l'Eiger (Berne).

En 1997, sa vie rocambolesque avait été interprétée au grand écran par Brad Pitt dans le film «Sept ans au Tibet».

Heinrich Harrer est décédé à l’hôpital de Friesach (dans la province autrichienne de Carinthie), où il avait été admis jeudi. Sa famille n’a pas précisé les causes du décès, se bornant à indiquer qu’«il avait réalisé son expédition finale dans une grande paix».

Heinrich Harrer s’est d’abord fait connaître pour avoir été le premier à vaincre la face nord de l’Eiger. Il a atteint le sommet le 24 juillet 1938 avec son ami, l’alpiniste viennois Fritz Kasparek, ainsi qu’avec les alpinistes allemands Anderl Heckmair et Ludwig Vörg.

Les quatre hommes ont réussi là où de nombreux autres avant eux avaient échoué. De nos jours encore, la face nord de l’Eiger passe pour l’une des ascensions les plus difficiles au monde.

Située au-dessus de la station de Grindelwald, dans l’Oberland bernois, cette paroi de 1800 mètres – la plus grande face des Alpes – est quasiment verticale, exposée au mauvais temps et presque constamment à l’ombre, même en été. Outre ces difficultés, la montée est rendue particulièrement dangereuse à cause de fréquentes chutes de pierres.

Précepteur du dalaï-lama

Participant à une expédition dans l’Himalaya, l’alpiniste a été fait prisonnier par les Britanniques au tout début de la guerre, en septembre 1939. Interné dans un camp de prisonniers en Inde, il s’en est évadé en avril 1944.

Son évasion a marqué l’une des pages les plus rocambolesques de l’alpinisme: en compagnie de son chef d’expédition, l’Autrichien Peter Aufschnaiter, Heinrich Harrer a parcouru plus de 2000 kilomètres à pied à travers l’Himalaya, franchissant en 21 mois quelque 50 cols de plus de 5000 mètres avant d’atteindre son but, la «ville interdite» de Lhassa, capitale du Tibet.

Heinrich Harrer, qui avait consacré sa captivité à l’apprentissage du tibétain mais aussi de l’hindoustani et du japonais, y est devenu précepteur du jeune dalaï-lama. Il lui a notamment enseigné le sport, les mathématiques et l’anglais.

Présent au Tibet jusqu’à l’invasion chinoise de 1950, l’alpiniste autrichien s’est lié d’amitié avec le guide spirituel des Tibétains. Une amitié qui s’est poursuivie au cours des décennies. Le dalaï-lama devait d’ailleurs lui rendre à deux reprises visite chez lui, en Carinthie, pour ses 80ème et 90ème anniversaires.

Heinrich Harrer, qui a été décoré de la médaille de la «Lumière de la Vérité» du gouvernement tibétain en exil, devait poser en mai prochain dans sa commune la première pierre d’un Centre européen du Tibet.

L’alpiniste a relaté son expérience tibétaine dans son livre «Sept ans au Tibet». En 1997, le film éponyme du réalisateur français Jean-Jacques Annaud a fait connaître cette histoire à des millions de personnes. Le rôle de Heinrich Harrer y était interprété par la star hollywoodienne Brad Pitt.

Passé nazi

Après son passage au Tibet, Heinrich Harrer a encore parcouru le monde à plusieurs reprises. Au total, l’alpiniste aura écrit une douzaine de livres et réalisé quarante films documentaires.

Le battage fait autour du film «Sept ans au Tibet» avait été l’occasion de relancer la polémique sur son passé nazi. L’alpiniste avait en effet adhéré au Parti national-socialiste lors de l’Anschluss, en 1938, et avait fait partie de la SS.

En 1997, Heinrich Harrer avait indiqué être devenu nazi pour pouvoir poursuivre sa carrière d’alpiniste et n’avoir jamais été impliqué dans les crimes du régime. Simon Wiesenthal, le fameux «chasseur de nazis» mort l’an dernier, avait d’ailleurs confirmé cette explication.

Cependant, certaines zones d’ombre subsistent. Ainsi, le célèbre alpiniste n’a jamais expliqué pourquoi il avait rejoint les SA en 1933, alors que le national-socialisme était encore interdit en Autriche.

swissinfo et les agences

Heinrich Harrer a vaincu la face nord de l’Eiger le 24 juillet 1938 en compagnie de trois autres alpinistes.
Il a raconté cette aventure dans «L’araignée blanche», un ouvrage devenu un classique des livres d’alpinisme.
Heinrich Harrer s’est également fait un nom en tant que coureur à ski, explorateur et géographe.
Mais il restera surtout célèbre pour son séjour au Tibet qui a fait l’objet d’un film à succès en 1997 («Sept ans au Tibet avec Brad Pitt).

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