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Guerre à Gaza: Un conflit sans vainqueurs

Keystone

La presse suisse de lundi salue le cessez-le-feu – même précaire – intervenu à Gaza après trois semaines de conflit. Les commentateurs sont cependant pessimistes: aucun des deux camps ne sort vainqueur de l'affrontement et les chances de paix restent plus que jamais éloignées.

En lisant la presse alémanique – les journaux romands n’ont pas commenté l’événement – le mot qui revient le plus souvent sous la plume des commentateurs est celui de «perdants». Les spécialistes du conflit israélo-arabe sont en effet unanimes; au terme d’un conflit sanglant de trois semaines, tant les Israéliens que les Palestiniens ressortent affaiblis.

«A en croire le gouvernement israélien, Israël a atteint ses objectifs de guerre. En outre, on entendra aussi au cours des prochains jours les proclamations de victoire du Hamas. Mais aucun des deux n’a gagné», écrit ainsi la Neue Luzerner Zeitung.

Et le quotidien lucernois d’enfoncer le clou: «Depuis la Guerre des six jours de 1967, les guerres du Proche-Orient ne connaissent pas de vainqueurs, mais seulement des milliers de victimes; elles n’apportent pas de solutions, mais seulement de la souffrance, de la misère et de nouvelles haines.»

La Berner Zeitung est du même avis. «Il n’y a pas de vainqueurs dans ce conflit marqué par la haine et par la peur, uniquement des perdants. Et au premier rang des perdants, on trouve les civils: plus de mille personnes, parmi lesquelles beaucoup de femmes et d’enfants, ont péri.»

Image écornée

Malgré les proclamations israéliennes, les commentateurs sont d’avis que l’Etat hébreu n’a pas réussi à atteindre ses objectifs de guerre. Les 22 jours de campagne contre la bande de Gaza n’ont, à leurs yeux, pas apporté beaucoup de résultats.

«Israël n’a pas atteint plusieurs de ces objectifs de guerre, comme l’arrêt des tirs de roquettes en provenance de la bande de Gaza ou la libération du soldat Gilad Shalit. Ce qui a été atteint, c’est l’affaiblissement du Hamas», écrit ainsi le quotidien bernois Bund.

D’ailleurs, la situation sur le terrain le prouve déjà. «La salve de roquettes sur Sderot, tirée peu de temps après le cessez-le-feu, montre que l’armée israélienne n’a pas réussi à éliminer la cause première de ce conflit», souligne ainsi la Neue Zürcher Zeitung.

Les commentateurs s’accordent également sur un autre point. Pour eux, en plus de n’avoir pas atteint ses objectifs, Israël a encore un peu plus écorné son image sur la scène internationale.

«Comme d’habitude dans leurs campagnes, les Israéliens ont utilisé la supériorité de leur armement dans considérations pour les civils et ont ainsi provoqué la mort de centaines de civils. Cela a nuit à la réputation de l’Etat hébreu dans le monde entier et mis les amis d’Israël dans l’embarras», écrit la Neue Zürcher Zeitung.

«Par son action brutale, Israël s’est montré comme l’agresseur qui, au nom de sa sécurité, ne connaît ni limites ni lois», renchérit la Basler Zeitung.

Un baril de poudre

Les commentateurs ne sont cependant pas plus cléments envers le Hamas. A leurs yeux, le mouvement islamiste a aussi une grande responsabilité dans ce bain de sang. La reprise des tirs de roquettes sur le sud d’Israël ne pouvait en effet que déboucher sur une réaction violente de la part de Tsahal.

Au final, les commentateurs ne sont pas optimistes pour l’avenir. Avec un Etat hébreu qui n’a pas atteint ses objectifs et un Hamas qui a été affaibli mais pas vaincu, la violence ne peut que se rallumer.

«Le Hamas et d’autres groupes militants palestiniens restent une menace et la bande de Gaza reste un baril de poudre», avertit la Berner Zeitung. Mais au moins, en attendant la reprise des hostilités, les populations civiles peuvent momentanément goûter à un peu de calme…

swissinfo, Olivier Pauchard

Les équipes médicales palestiniennes estiment qu’au moins 1300 habitants, dont 410 enfants et 108 femmes, sont morts entre le début de l’offensive militaire israélienne le 27 décembre et le cessez-le-feu de dimanche, et plus de 5300 blessés, selon les services d’urgence de Gaza.

Dans l’autre camp, 10 militaires et trois civils ont péri durant la même période. Israël a affirmé avoir tué 500 combattants du Hamas.

L’Etat hébreu a encore indiqué avoir ouvert un hôpital de campagne à la frontière dimanche pour prendre en charge malades et blessés et faciliter leur évacuation vers des hôpitaux.

De son côté, le CICR dispose à Gaza d’une équipe de 14 expatriés et de 60 Palestiniens, qui travaille en étroite collaboration avec le Croissant-Rouge palestinien.

Selon l’ONU, plus de 45’000 Gazaouis s’entassent dans 49 écoles reconverties en abris d’urgence, en plus des 750’000 qu’elle nourrit en temps normal. Selon le Centre Mezan pour les droits de l’homme, ils seraient 150’000 autres à avoir fui pour échapper aux bombes.

Les agences de l’ONU demandent la réouverture complète de tous les points de passage pour répondre aux besoins. Sur leur appel de 531 millions de dollars, elles ont reçu jusqu’ici 75 millions, soit 14% du total.

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