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La recherche de gaz sous le Léman a démarré

Sous les eaux du Léman, du gaz probablement swissinfo.ch

La société suisse Petrosvibri entame le forage du sous-sol du Chablais vaudois en espérant trouver l'équivalent de 70 ans de consommation de gaz naturel en Suisse. Si ces pronostics se confirment en 2011, l'exploitation du gisement gazier pourrait intéresser aussi bien la Suisse que la France.

Plus rien ne s’oppose à l’exploration gazière et pétrolière sous le lac Léman, un chantier prévu non loin du célèbre château de Chillon et de la ville de Montreux. Après la Confédération (gouvernement) et le canton de Vaud en avril dernier, Noville – seule commune concernée par la phase initiale du projet – vient de donner son feu vert au projet de Petrosvibri, une société suisse appartenant aux opérateurs Holdigaz et Gaznat.

Selon Philippe Petitpierre, vice-président de Petrosvibri, le forage exploratoire du sous-sol du Léman doit débuter début novembre pour une durée de 6 à 8 mois. Pour ce faire, la société va construire une plateforme d’environ 10’000 m² sur un terrain agricole de la commune de Noville. Le forage partira à la verticale, avant d’obliquer sous le lac. Et ce sur une profondeur de 3 kilomètres. L’eau du Léman ne sera donc pas en contact avec le forage et ses émanations, selon la société.

Garanties pour l’environnement

De fait, l’impact environnemental du projet fera l’objet d’un suivi. Raison pour laquelle l’ONG Pro Natura a décidé de lever son opposition au projet.

«Une attention toute particulière a été apportée à l’analyse d’impact et à la prise en considération de la protection de l’environnement. Un catalogue de mesures destinées à minimiser au maximum l’impact du projet a été élaboré», assurent les promoteurs du projet qui ont budgété à 22,5 millions de francs la phase exploratoire du chantier.

De son coté, le Fond mondial pour la nature (WWF) regrette que de telles sommes ne soient pas investies dans les énergies renouvelables. Mais l’ONG ne s’oppose pas au projet. «Nous saluons dans ce projet la proximité entre la source de l’énergie et ses consommateurs», précise Serge Ansermet, de la section locale du WWF.

«Les sommes que nous prévoyons d’investir dans la phase exploratoire seraient largement insuffisantes pour un projet d’énergie renouvelable», rétorque Philippe Petitpierre. Il qualifie même de citoyen ce chantier énergétique en rappelant «l’importance capitale que revêt la sécurité d’approvisionnement énergétique et la diversification des sources d’approvisionnement pour la Suisse.» Au nom de cet impératif, Petrosvibri n’entend pas passer à coté d’une importante source d’énergie.

La compagnie estime avoir 50% de chance de trouver l’équivalent de 8 ans de consommation de gaz naturel en Suisse. Avec une probabilité réduite à 15%, les quantités d’hydrocarbure pourraient représenter 70 ans de consommation de gaz au niveau actuel. Petrosvibri n’exclu pas non plus de trouver du pétrole, même si c’est peu vraisemblable.

Verdict en 2011

Si l’analyse des données récoltées durant la phase d’exploration (6 à 8 mois) confirme cet espoir, un permis d’exploitation devra être délivré. En cas de litige entre les différents Etats concernés (le canton de Vaud, celui du Valais et la France), l’exploitation du gaz découvert pourrait théoriquement revenir à une autre société.

Mais Philippe Petitpierre se montre confiant. «Aujourd’hui, nous sommes au bénéfice d’une protection de concession pour le canton de Vaud, une concession qui doit être renouvelée par le Valais. Et nous démarchons l’Etat français pour obtenir une telle protection. Nous n’avons aucun élément aujourd’hui qui permette de dire que nous risquons de perdre la possibilité d’exploiter les gisements que nous pourrions trouver.»

C’est le premier projet d’exploration que mène Petrosvibri et pour l’heure, la compagnie n’en envisage pas d’autres. «Nous avons été sollicités pour nous associer à d’autres projets, assure Philippe Petitpierre. Mais ces partenaires voulaient en guise de contrepartie participer à notre chantier lémanique. Nous ne sommes donc pas entrés en matière.»

Ailleurs en Suisse

Tout autour de la région des Alpes, la recherche en hydrocarbures connait en effet un nouvel élan.

«Dans les années 90 avec un baril de pétrole à 9 dollars, tous les projets de recherche d’hydrocarbures lancés dans les années 60 et 70 se sont arrêtés en Suisse. La hausse des prix du pétrole et de nouvelles hypothèses sur la géologie de la Suisse ont relancé l’exploration gazière et pétrolière. Une tendance qui touche également l’Allemagne, l’Italie et la France», explique Werner Leu, géologue conseil de Petrosvibri, en précisant que le sous-sol du Jura est probablement plus riche en pétrole que le sous-sol autour des Alpes pourvu lui essentiellement de gaz.

Le chantier de Petrosvibri est le plus avancé de Suisse. Mais la SEAG (Aktiengesellschaft für schweizerisches Erdöl), filiale de Swisspetrol, l’organisation faîtière de la recherche de pétrole et de gaz dissoute en 1994, a obtenu des permis d’exploration dans la région de Cuarny-Essertine (Nord vaudois) et dans la région de Berne. Elle prévoit des forages d’ici la fin de l’année.

La SEAG a également des projets dans l’est de la Suisse. La compagnie Celtique energy, elle, a commencé ses recherches dans tout le Jura vaudois et neuchâtelois. Enfin, d’autres compagnies s’intéressent au sous-sol tessinois.

Frédéric Burnand, Vevey, swissinfo.ch

Progression: En Suisse, la consommation de gaz naturel a enregistré une forte croissance entre 1970 et 1996, avec une progression annuelle moyenne de l’ordre de 11%.

Réchauffement: Cette dernière décennie, la hausse s’est nettement ralentie (+1,5% par an), principalement en raison des conditions météorologiques.

Consommation: Aujourd’hui, le gaz y représente près de 12 % de la consommation d’énergie finale.

Ménages: Les plus grands consommateurs sont les ménages (environ 40 % de la consommation totale), suivis par l’industrie (33 %).

Petrosvibri, société anonyme suisse, a pour but la recherche d’hydrocarbures dans les Chablais vaudois et valaisan.

Petrosvibri est détenue à 66% par Gaznat SA et 34% par Holdigaz, deux opérateurs spécialisés dans l’approvisionnement, le transport et la distribution de gaz naturel.

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