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Berne critique la taxe d’entrée aux Etats-Unis

En plus du billet d'avion, il faudra désormais payer une taxe touristique pour aller aux Etats-Unis sans visa. Reuters

Dès le 8 septembre, toute personne se rendant aux Etats-Unis et qui est exemptée de l'obligation d'obtention d'un visa devra payer une taxe touristique et administrative de 14 dollars. La Suisse n'est pas contente. L'Union européenne non plus.

En plus du billet d’avion, il faudra désormais payer pour aller aux Etats-Unis sans visa. Dix dollars «pour la promotion touristique». Et quatre pour les «formalités administratives». C’est peu par rapport au prix d’un visa normal (140 dollars!). Mais c’est contraire à plusieurs principes et traditions.

Annoncée vendredi dernier, la mesure a déjà suscité de nombreuses protestations, notamment de la part de l’Union européenne.

La commissaire européenne chargée des questions de sécurité, la Suédoise Cecilia Malmström, a ainsi exprimé l’avis que la nouvelle taxe américaine était «incompatible avec l’engagement pris par les Etats-Unis de faciliter la mobilité transatlantique».

Comme au Moyen-âge

A Berne aussi, on est mécontent. Interrogé par swissinfo.ch, le Département fédéral des Affaires étrangères souligne «qu’à de nombreuses reprises, et comme beaucoup d’autres Etats européens», la Suisse est intervenue auprès de Washington «hélas sans succès» contre le principe d’une telle taxe.

Il est vrai que la nouvelle taxe, comparable aux péages prélevés au Moyen-âge à l’entrée de certaines villes, peut paraître relativement incongrue à l’ère de la mondialisation. Et dans la perspective de la liberté des échanges et des voyages, tant prônée par Washington.

Le Service américain «de la protection de la frontière», qui sera chargé de l’encaissement de la taxe dès le 8 septembre, en est conscient. Mais il rejette à l’avance toute critique, affirmant que «56 pays» prélèvent aujourd’hui une taxe d’entrée sur leur territoire. Taxe dont le montant atteindrait parfois l’équivalent de 100 dollars! Soit bien plus que la taxe américaine.

Les Etats-Unis sont honnêtes

Les Etats-Unis seraient en fait beaucoup plus honnêtes et transparents dans ce domaine puisque les autres pays qui taxent les voyageurs le feraient clandestinement en incorporant ce qu’ils encaissent dans le prix des billets d’avion.

La nouvelle taxe va en tout cas faire parler d’elle. D’autant plus qu’elle intervient quelques mois après l’introduction spectaculaire – et controversée – d’une sorte de visa électronique que les Etats-Unis exigent impérativement depuis le 21 janvier de cette année de toute personne souhaitant se rendre aux Etats-Unis… sans visa.

On rappellera à ce sujet que les ressortissants de 36 pays, dont la Suisse et la plupart des Etats européens, n’ont en principe pas besoin de visa ‘classique’ – celui apposé sur le passeport – s’ils se rendent aux Etats-Unis en touristes et qu’ils n’y séjournent pas plus de trois mois.

Mais comme on vient de le voir, depuis janvier dernier, ces personnes doivent au préalable recevoir un visa électronique ou comme il s’appelle officiellement, une «autorisation électronique de voyage». Cette autorisation s’obtient en remplissant sur internet un questionnaire détaillé portant sur l’identité, l’état de santé, la moralité et l’éventuel passé criminel du demandeur.

Taxe payable à l’avance

La future taxe est d’ailleurs liée à la nouvelle autorisation de voyage puisqu’une partie – 4 dollars – sera utilisée pour financer l’immense appareil informatique et administratif nécessaire à la gestion du système. L’autre partie financera un fonds semi-public, la «Corporation for Travel Promotion», qui doit relancer le développement du tourisme aux Etats-Unis.

La branche est en effet en recul constant depuis l’an 2000. Selon les chiffres officiels de 2009, le nombre de touristes étrangers aux Etats-Unis a diminué de 2,4 millions par rapport à l’an 2000, le chiffre d’affaires du tourisme de 509 milliards de dollars et les recettes fiscales engendrées par le tourisme de 32 milliards. La branche mise donc beaucoup sur le nouveau fonds semi-public de promotion, institué par une loi fédérale que le président Obama a signé solennellement le 8 mars dernier.

A noter – les législateurs savent parfois nous faire rire – qu’un des buts de la nouvelle loi, qui a donc institué la nouvelle taxe et introduit un petit désagrément pour le touriste, est, nous citons, «de rendre les procédures d’entrée aux Etats-Unis… plus accueillantes (welcoming)».

Précision technique: la taxe devra être payée à l’avance, électroniquement (par débit d’une carte de crédit), avant même de pouvoir remplir la demande d’autorisation de voyage. Quatre dollars seront débités de toute façon, même si la demande est finalement refusée!

Michel Walter, swissinfo.ch

Marche à suivre pour se rendre aux Etats-Unis “sans visa” à partir du 8 septembre 2010, valable pour les ressortissants des 36 pays libérés de l’obligation d’obtention d’un visa pour un séjour touristique d’une durée maximale de trois mois:

Vérifier que l’on dispose d’un passeport national agréé par les Etats-Unis (pour les ressortissants suisses, seuls les passeports du type “06” – biométrique – ou “03” – si émis avant le 26 octobre 2006 – sont admis).

Autoriser le gouvernement des Etats-Unis à débiter électroniquement sur sa carte de crédit un montant de 14 dollars.

Remplir en ligne sur le site du Ministère américain de la sécurité intérieure une demande «d’autorisation de voyage électronique » et le questionnaire détaillé correspondant.

Attendre que le système vous envoie votre autorisation de voyage, numérotée, valable 2 ans.

A l’aéroport, remplir la formule APIS (Advance Passenger Information): il s’agit de fournir diverses données personnelles supplémentaires destinées aux services de police américains.

A l’arrivée aux Etats-Unis, se soumettre à toutes les formalités exigées par le Service de Protection de la frontière: prise d’empreintes digitales, prises de photos, bref interrogatoire.

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