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Trois ans de prison pour assistance au suicide

Dans la chambre des suicides, les accompagnants ne peuvent pas jouer de rôle actif. Keystone

Le Tribunal pénal de Bâle-Ville a condamné vendredi un psychiatre à trois ans de prison – dont deux avec sursis – pour avoir aidé trois malades psychiques à se suicider.

Peter Baumann a été reconnu coupable d’homicide par négligence. La défense plaidait l’acquittement, alors que l’accusation demandait une peine plus lourde.

La peine administrée par la Cour est moins sévère que celle requise par le Ministère public. Celui-ci avait préconisé que le psychiatre de 72 ans, qui a créé sa propre association d’aide au suicide, soit condamné à sept ans de privation de liberté.

Au cours de ces procès, qui avait débuté lundi, les juges se sont intéressés à trois suicides assistés de malades psychiques entre janvier 2001 et janvier 2003 à Bâle et à Lucerne. L’ancien psychiatre a nié sa participation au cas de Lucerne.

Grossière négligence

Le premier cas concerne un homme de 46 ans. Exit avait refusé de l’aider à se suicider en raison de sa dépression. Peter Baumann l’a aidé à mourir en lui fixant un masque sur le visage qui a conduit à la mort par étouffement.

Le président du tribunal, se basant sur une expertise médicale, estime que cet homme n’avait pas toute sa capacité de jugement. L’ancien psychiatre a fait un mauvais diagnostique et n’a pas chercher d’alternative au suicide.

Le psychiatre voulait atteindre par ce biais une reconnaissance sociale de ses méthodes, ce qui l’a amené à poser un diagnostic en dilettante et à violer son devoir de diligence, a relevé le président du tribunal. Pour ce cas, le tribunal l’a reconnu coupable d’homicide par négligence.

Dans le deuxième cas, il a aidé au suicide une femme de 62 ans. Pour le troisième cas, celui d’un homme de 85 ans découvert mort dans un hôtel, le psychiatre n’a pas été considéré comme auteur des faits.

Le président du tribunal a souligné que le comportement du condamné de grossièrement négligent: pour lui, donner la mort n’était qu’une procédure technique et, durant toute la procédure, il n’a manifesté aucun remords ou compréhension.

Le psychiatre avait mis ses services à disposition de l’association Exit à 14 reprises entre 2000 et 2001. En 2002, il a fondé une association d’aide au suicide dont il est le président. Les frais de procédure de 50’520 francs et de procès de 14’500 francs ont été mis à sa charge.

Ne refuser aucune demande

Les idées de Peter Baumann sont contestées depuis de nombreuses années. Suite à des dissensions avec l’organisation Exit Suisse alémanique, il avait, en 2002, il fondé sa propre organisation, «Verein Suizidhilfe» («association d’aide au suicide»).

Son objectif: ne plus devoir refuser aucune demande d’aide au suicide, du moment que le désir de mourir paraît «humainement perceptible et compréhensible.»

Selon cette conception, tant les médecins que les éthiciens, les juristes et d’autres experts se retrouvent exclus de la décision d’accompagner quelqu’un à la mort. Le psychiatre estime que quiconque ayant un minimum d’expérience de la vie est à même de juger si un désir de mourir est réel ou non.

swissinfo et les agences

En 2006, environ 350 personnes se sont adressées à des organisations d’assistance au suicide. Il y a cinq organisations d’aide au suicide, les deux plus importantes étant Exit et Dignitas.
Exit Suisse alémanique compte 50000 membres et accompagné 150 personnes à la mort en 2006.
Dignitas compte 5000 membres et a assisté 195 personnes au suicide en 2006, dont 120 Allemands.
Selon la Commission nationale d’éthique, une centaine de personnes viennent chaque année en Suisse pour mourir.
En Suisse, un cinquième des suicides sont assistés.

Suisse: pratique très libérale. L’euthanasie passive (arrêt d’un traitement ou d’appareils soutenant les fonctions vitales) est autorisée. L’euthanasie active est en revanche considérée comme un meurtre et est punissable.

Allemagne: l’aide au suicide est interdite aux médecins.

France: l’euthanasie passive sera autorisée aux médecins et aux proches. L’euthanasie active reste interdite.

Italie: euthanasie passive et active interdites.

Pays-Bas et Belgique: euthanasie active autorisée à certaines conditions.

Angleterre: régime le plus restrictif d’Europe. L’aide au suicide n’est pas prévue par la loi.

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