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A Genève, 6000 experts ont mesuré les progrès de la dermatologie

Les patients attendent de la dermatologie qu'elle les guérisse et redonne son éclat à leur peau... Ici Apligraf, première "peau synthétique" mise au point par Novartis. Keystone

Le plus grand congrès de dermatologie jamais réuni en Europe vient de se tenir à Genève. Praticiens, chercheurs ou représentants de l´industrie médicale, ils étaient 6000 spécialistes à participer à un vaste échange de connaissances.

“On se gratte tous vingt fois par jour sans vraiment savoir pourquoi et chacun fait de la dermatologie sans s’en rendre compte”, nous dit en souriant le Dr Jean-Hilaire Saurat, président et cheville ouvrière de ce 9e Congrès de l’Académie européenne de dermatologie et vénérologie (EADV). C’est une invitation à dépasser la boutade et à comprendre qu’aujourd’hui les soins de la peau occupent une place particulière sur la scène médicale.

Celui qui, en temps normal, dirige la clinique de dermatologie des Hôpitaux universitaires de Genève a bien le droit de se montrer satisfait. Dans cette branche plutôt méconnue de la médecine, jamais un tel rendez-vous n’avait réuni autant de monde en Europe. Non par effet de mode, mais parce que les spécialistes de la peau ont vraiment besoin aujourd’hui de partager leurs découvertes.

Pour preuve, 500 interventions étaient inscrites à l’ordre du jour du congrès. Et ses organisateurs ont reçu plus de 1300 communications écrites, dont près d’un millier sont, de façon assez spectaculaire, présentées sous forme d’affiches ou de posters dans un immense espace aux idées.

Il faut dire que l’objectif de ce rassemblement, qui trouve son rythme après quinze ans d’existence, a pour premier objectif de proposer aux dermatologues un moyen de formation continue. Comme tout professionnel de la médecine, ils ont l’obligation morale et légale de faire régulièrement la preuve qu’ils sont bien informés des progrès de la science.

De ce point de vue, il faut savoir que les récentes découvertes de la biologie, de la génétique, de l’immunologie et des autres domaines de base de la médecine ont de très grandes répercussions et applications en dermatologie. Rien de plus normal. La peau, à sa manière, réagit chaque fois que le corps est agressé.

Cette spécialité longtemps reléguée en seconde zone offre désormais un vaste champ de recherches et de découvertes. Elle semble même de plus en plus attirer la crème des étudiants en médecine. Vu la place que les produits pour la peau occupent dans les espaces publicitaires, c’est vrai qu’il y a là aussi un créneau professionnel intéressant à occuper.

«La belle peau fait partie du quotidien», commente le Dr Saurat. Et ce n’est pas le moindre des défis qui attend le dermatologue. Ses patients – ou ses clients – attendent de lui d’une part qu’il guérisse les dommages qu’une maladie ou un accident a fait subir à leur épiderme, et d’autre part qu’il redonne à leur peau attrait et rayonnement.

«Mais, poursuit-il, la peau, c’est aussi quelque chose qui passe son temps à faire le tri entre le bon et le mauvais, et quand elle se trompe, quand elle trouve dangereuse une substance qui ne l’est pas, y compris des savons ou des parfums, elle fait une allergie». Le mot est lâché. Comme une autre maladie des temps modernes.

Mais, hormis celle-là, quelles sont aujourd’hui les maladies de la peau les plus fréquentes? “Il faut le demander à l’industrie, répond le spécialiste. Car c’est elle qui sonde les marchés, qui calcule le nombre de malades et qui sait ceux qui vont pouvoir acheter tel ou tel médicament. En tête de liste: les maladies du visage, acné et autres boutons, suivis de l’eczéma et du psoriasis, ce «rhumatisme de la peau», sans parler… de la calvitie”.

Là où la dermatologie a toutefois enregistré de remarquables progrès ces dernières années, c’est dans le domaine du cancer de la peau, le «basocellulaire» comme disent les experts, l’affection maligne la plus répandue. Les chercheurs, grâce à la biologie fondamentale, ont pu identifier son mécanisme et sont en train de mettre au point des moyens de traitement et de prévention.

Le cancer reste pourtant ce qui inquiète le plus le médecin-chef en dermatologie. «Il y a vingt ans, dit-il, je soignais la moitié moins de cancers de la peau et deux tiers de moins de lymphomes, ce cancer du sang qui vient dans la peau. Si on en a beaucoup aujourd’hui, c’est peut-être à cause de l’environnement qui change et sans doute aussi du vieillissement de la population».

Et d’expliquer que l’un des grands problèmes, en Suisse aujourd’hui, c’est l’accroissement des maladies des personnes âgées. Les dermatologues se doivent par conséquent de redéfinir leurs priorités et de réorienter leurs moyens vers le traitement et la prévention des cancers de la peau, des allergies et des plaies chroniques des jambes. Bref tout un domaine en plein développement pour redonner à des patients âgés une nouvelle qualité de vie.

Bernard Weissbrodt

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