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A Genève, l’intégration passe aussi par des médiateurs

Portugais, Italiens, Français et Espagnols représentent 58% des 154.000 étrangers de Genève. picswiss.ch

Le thème de l´intégration des étrangers est aussi d´actualité à Genève. D´abord: un projet de loi vient d´être déposé au Parlement cantonal. Ensuite: un collectif de médiateurs a été créé pour résoudre les conflits de voisinage en milieu multiculturel.

Genève mérite son nom de ville internationale. Non seulement parce qu’elle héberge des institutions qui ont fait sa renommée par-delà les frontières. Mais aussi – c’est moins connu – parce que deux de ses habitants sur cinq sont d’origine étrangère.

Plus encore. Les statistiques officielles de la population étrangère à Genève révèlent une diversité planétaire puisque 198 nationalités différentes y sont recensées. Les Européens sont les plus nombreux. Portugais, Italiens, Français et Espagnols, à eux seuls, constituent déjà 58 pour cent des 154 000 résidents non Suisses.

Plus loin sur la liste, mais nettement moins nombreux, apparaissent les ressortissants des pays de l’ex-Yougoslavie. Les autres continents – Amérique, Afrique, Asie – se côtoient avec des chiffres qui tournent chaque fois autour des dix mille personnes.

Derrière son image plutôt conviviale et rassurante, la Genève internationale connaît aussi des problèmes de cohabitation multiculturelle, conflits d’immeubles, tapages nocturnes, agressions racistes et toutes les tensions latentes ou passagères que peut susciter la juxtaposition rapprochée de manières de vivre différentes et parfois difficiles à comprendre.

Genève, dans ce domaine, a fait le pari de donner la priorité à ses ressources humaines, à commencer par les îlotiers, ces policiers de proximité affectés à des îlots d’immeubles. «Nous servons de baromètre!», explique l’un d’eux, Alain Devegney, posté en plein centre-ville.

L’an dernier, il a demandé à être affecté aux «groupes ethniques». Entendez par là les communautés étrangères qui vivent autrement que les Suisses et parfois perturbent leurs habitudes. «Notre travail, dit-il, ce n’est pas de faire dans la répression, sauf en cas de flagrant délit. Notre mission, c’est d’entretenir le tissu social». Ce qui, on l’avouera, relève davantage de la vocation d’éducateur que du métier de gendarme.

Alain Devegney a, dès lors, acquis l’intime conviction que, même en intervenant en civil, même en convainquant ses interlocuteurs qu’il méritait leur pleine confiance, il ne pouvait faire un travail efficace qu’en amenant un médiateur avec lui sur les lieux de litiges.

Son idée a trouvé bon écho auprès d’une association genevoise, Mondial Contact, dont l’objectif est de promouvoir la participation des étrangers à l’espace public et à la vie de la cité. Elle a par exemple créé des Civic’Cafés, lieux de contacts et d’échanges entre nationaux et étrangers autour des grands thèmes de la vie locale genevoise.

«Les demandes de médiation nous viennent de plusieurs côtés, raconte Sarah Khalsallah, directrice de Mondial Contact: des îlotiers certes, mais aussi des associations de quartier ou autres structures qui cherchent appui pour résoudre des situations conflictuelles très concrètes. Nous avons pris conscience qu’il faut aussi agir en amont des situations d’incompréhension entre voisins de cultures différentes».

En une année, une douzaine de personnes, d’origine étrangère, ont été recrutées et formées à un travail de médiation interculturelle. Depuis trois semaines, elles se sont regroupées dans un «collectif de médiateurs», encadrés par des éducateurs, psychologues et autres spécialistes du dialogue social. Mondial Contact s’interroge maintenant sur la meilleure façon de rendre visible cette offre nouvelle de bons offices.

«La vraie question, explique encore Sarah Khalsallah, ce n’est pas de savoir combien il y a de cas à régler, mais plutôt de comprendre comment des problèmes qui opposent des personnes de nationalités différentes génèrent d’autres types de conflits et appellent aussi d’autres types de réponse». Dans ces situations-là, il y a d’énormes potentialités de malentendus qui ne se résolvent qu’avec beaucoup de patience.

Mondial Contact et le Centre de contact Suisses-immigrés ont beaucoup œuvré ces derniers temps à une nouvelle approche des problèmes d’intégration. Leurs propositions portent peu à peu leurs fruits.

La droite et la gauche genevoises viennent de déposer un projet de loi instituant un Bureau cantonal de l’intégration. Le Parlement a par ailleurs donné le feu vert à un autre projet accordant aux étrangers les droits de vote et d’éligibilité communaux. La balle est dans le camp des citoyens genevois qui devront transformer l’essai au printemps.

Bernard Weissbrodt, Genève

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