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America’s Cup: la justice souffle pour Alinghi

«La décision de la cour nous permet de replacer l'America's Cup sur l'eau», s'est réjoui Ernesto Bertarelli. Keystone

Les marins suisses semblaient devoir se résoudre à un duel en multicoques. Mais la cour suprême de New-York a débouté mardi le challenger américain Oracle BMW Racing.

Inattendue, cette volte-face juridique redonne les pleins pouvoirs au Defender suisse, qui pourra organiser la coupe sous sa forme traditionnelle.

«Nous sommes ravis de cette décision. Un peu surpris mais ravis», ne cesse de répéter Fred Meyer. Sur la terrasse ensoleillée de la Société Nautique de Genève (SNG), le vice-président du yacht club defender jubile. Il est midi passé, ce mercredi 30 juillet, les dîneurs arrivent de partout pour fêter la bonne nouvelle.

Comme lors de la victoire du 3 juillet 2007, une banderole «We did it again» est hissée sur la terrasse du très select club nautique. La veille, alors qu’elle était saisie en appel par Alinghi, la cour suprême de New-York a purement et simplement débouté BMW Oracle Racing.

L’imprévisible volteface

Lors de l’élaboration de la 33e America’s Cup, le Challenger américain avait réussi à faire invalider juridiquement le Club Nautique Espagnol de Voile (CNEV) précédemment choisi par Alinghi.

Ce faisant, le Golden Gate Yacht Club (GGYC) de San Francisco devenait le concurrent exclusif de la prochaine édition. Une fois le bateau choisi, un multicoque de 90 pieds, il restait à fixer la date des joutes. Dans ce climat délétère, la décision fut renvoyée devant la chambre d’appel de la Cour Suprême de New-York, seul organe habilité à juger des affaires de l’America’s Cup.

De manière surprenante, ladite chambre d’appel n’en est pas restée au seul choix de la date. A trois juges contre deux, elle est revenue au fondement même du conflit et a restauré la validité du CNEV, invalidant de ce fait la précédente décision du juge Hermann Cahn et toute la procédure des Américains. En boxe, on pourrait parler de «KO technique».

Dans le monde de l’America’s Cup, c’est un nouveau départ avec la possibilité pour tout les challengers de revenir dans la course à l’Aiguière d’argent. «Avant le début des procédures juridiques, nous en avions 16», répète Fred Meyer à qui veut l’entendre.

Une possibilité de recours

Tom Ehmann, le porte-parole du GGYC se dit «surpris et déçu» de ce verdict. «Nous allons maintenant nous interroger sur nos droits et considérer différentes options», poursuit-il. Parmi celles-ci, il y a évidemment la possibilité de recours. Cette voie-là prendrait encore douze mois supplémentaires.

En cas de victoire américaine, il faudrait dix autres mois pour organiser le fameux duel exclusif (à deux bateaux seulement) tant désiré par les Américains. Largement de quoi laisser le temps à Alinghi de rattraper un probable retard technologique dans la construction de son grand multicoque.

Rappelons qu’à San Francisco et à Villeneuve (canton de Vaud) – ou Alinghi a désormais ses quartiers – la construction des voiliers de l’hypothétique 33e Cup est à bout touchant. Le gaspillage d’argent de cette construction inutile s’ajoute donc à l’énorme débauche de moyens juridiques déployés par les deux équipes. «Nous devons évaluer si des ajustements sont nécessaires suite au temps perdu par les initiatives abusives du GGYC», menace désormais Lucien Masmejan, l’avocat principal de la SNG.

«C’est un nouveau départ»

Au club-house genevois, les dîneurs de la SNG se baladent de table en table en dégustant la nouvelle avec délectation. Un Riva en acajou, magnifique canot moteur de collection, entre dans le port. En tenue décontractée, une bière à la main, le skipper d’Alinghi néozélandais Brad Butterworth débarque dans son club pour fêter la bonne nouvelle. Comme tout le monde, il a été surpris du verdict. Il rayonne.

«Nous devons maintenant nous entretenir avec les Espagnols pour préparer cette 33e Cup. Il faudra ensuite rassembler les challengers qui désirent se lancer dans l’aventure.» La première date envisageable serait pour 2011. Avec la rupture du contrat qui liait l’événement sportif à la ville espagnole de Valence, le futur site de voile reste encore à définir.

C’est donc clairement «un nouveau départ» qui se dessine. «La décision de la cour nous permet de replacer l’America’s Cup sur l’eau», martèle Ernesto Bertarelli (patron d’Alinghi) par communiqué de presse interposé. Si les vœux du milliardaire genevois se réalisent, ce triste épisode de l’America’s Cup pourrait enfin être relégué à tout jamais dans les poubelles de l’histoire.

swissinfo, Pierre-Antoine Preti/Skippers magazine à Genève

Alinghi a remporté la Coupe de l’America à sa première participation en 2003.

Le défi suisse ramenait l’Aiguière d’argent en Europe pour la 1re fois depuis plus de 150 ans.

En 2007, Alinghi a conservé son bien en s’imposant 5-2 contre Team New Zealand.

Chargé d’organiser la prochaine Coupe de l’America en 2009 à Valence, Alinghi a été attaqué en justice par les Américains d’Oracle (pour règlement inéquitable) à qui la Cour Suprême de l’Etat de New-York a donné raison une première fois en novembre 2007.

Un tribunal américain a ensuite trouvé une faille dans le protocole établi par les Suisses en vue de la prochaine édition de la coupe.

Ce tribunal a décidé qu’un duel en trois manches et en multicoques entre Alinghi et Oracle tiendrait lieu de 33e Coupe de l’America. Une décision invalidée mardi.

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