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Coup de sifflet final pour Neuchâtel Xamax

En français ou en cyrillique, la bannière de Xamax est mise au placard. AFP

Alors qu’il s’apprêtait à fêter son centenaire cette année, le club de football Neuchâtel Xamax s’est vu retirer sa licence par la Swiss Football League, ce qui l'exclut du championnat. La fin ou la chance d'un nouvel avenir ? La presse suisse est partagée.

Racheté il y a neuf mois pour 2 millions de francs par Bulat Chagaev, le club neuchâtelois a régulièrement occupé la une des médias depuis lors. Malgré ses promesses, l’homme d’affaires tchétchène n’a pu prouver qu’il disposait des moyens financiers suffisants, ce qui a décidé la Swiss Football League (SFL) à lui retirer sa licence mercredi. Alors que l’équipe s’entraînait à Dubaï.

«Fin de partie», «Un rêve détruit», «La chute d’un club trahi et bafoué», «La fin peu glorieuse d’une équipe de tradition», «Le Xamax de Chagaev est rayé du foot suisse», «Bulat Chagaev a tué NE Xamax», «Xamax dernière station du chemin de croix»… Ces titres résument à la fois l’incrédulité et le choc de la presse nationale après que la commission de discipline de la SFL ait retiré sa licence au club de foot qui ne pourra terminer sa saison. Un club chargé de quelques 8 millions de francs de créances.

Comme le Costa Concordia

Un paquebot en forme de stade en train de couler, penché à 80 degrés, cette allusion au naufrage du bateau de croisière italien Costa Concordia est toute trouvée pour le caricaturiste du Tages-Anzeiger. Celui de 24 Heures n’a pas résisté non plus à la comparaison en dessinant un paquebot couché avec un capitaine Chagaev prenant la fuite.

«On m’enlève un quatrième enfant!», Gilbert Facchinetti, président emblématique de Xamax de 1979 à 2003, parle de «tragédie» dans les colonnes du Temps. Il confesse sa colère et sa frustration d’«être comme ça sans réponse, face à quelqu’un qui détient 52% des actions et contre qui on ne peut rien». «Facchi» fait bien sûr allusion à la vente de «son» club à Bulat Chagaev en avril 2011 par Sylvio Bernasconi, son successeur à la présidence du club de la Maladière.

«En moins d’un an de commandement, Bulat Chagaev a réussi à détruire ce que d’autres, à l’instar de Gilbert Facchinetti, avaient mis près d’une vie à bâtir», se désole Le Matin. Et de tirer à boulets rouges sur le Tchétchène, «mufle (et) beau parleur rapidement démasqué par son attitude corrosive». Et le quotidien francophone d’appeler la SFL à résoudre «le fond du problème» et de «durcir ses règles pour qu’un club ne puisse plus tomber entre les mains d’un imposteur».

«Xamax perd son rang parmi l’élite», constate sobrement L’Express de Neuchâtel. «En principe, la décision de la SFL prive les ‘rouge et noir’ de participer au 2e tour du championnat de Super League dès lors que l’effet suspensif n’a pas été accordé. Ce qui les prive également de s’inscrire en Challenge League».

«La mesure était non seulement nécessaire, mais aussi la conséquence logique d’une série d’avertissements ignorés ou sous-estimés, transformés désormais en carton rouge face auquel il n’y a ni échappatoires ni excuses», juge le quotidien italophone La Regione.

Pas une surprise

Presque tout le monde s’attendait à ce naufrage. Par exemple le joueur Mike Gomes: «Comme nous n’avons toujours pas reçu nos salaires, nous nous y attendions, je suis dégoûté. Les jeunes d’ici ne pourront plus rêver de Xamax comme je le faisais étant enfant», déclare dans 24 Heures/La Tribune de Genève l’ancien junior depuis Dubaï.

«Xamax, mon vieil amour, est porté en terre!» Ce cri du cœur de Gilbert Gress est rapporté par le journal de boulevard Blick. Celui qui totalise 14 ans comme entraîneur de l’équipe neuchâteloise s’exprime dans plusieurs journaux ce jeudi, et n’est pas surpris. «On n’a que ce qu’on mérite», dit-il par exemple dans Le Temps. «Chagaev n’est pas le seul à avoir commis des erreurs, ses prédécesseurs en ont fait avant lui. Mais quand ce monsieur est arrivé et a viré tout le monde, on a compris qu’il n’avait ni éducation ni respect. Après, ce ne fut qu’une succession de décisions incompréhensibles.»

Espoirs…

La Südostschweiz ne s’étonne pas non plus. «Après que le douteux Tchétchène a repris le sceptre de Neuchâtel, on ne pouvait que prévoir que ce club de grande tradition finirait tôt ou tard dans le mur», écrit le journal alémanique, qui conclut pourtant qu’«un nouveau départ serait aussi une nouvelle chance» pour Xamax.

La Liberté, elle, songe aussi à l’après-Chagaev». «Les cendres du Xamax de Bulat Chagaev sont encore chaudes, qu’il faut déjà se projeter vers l’avenir, peut-on lire dans le quotidien fribourgeois. Car, c’est presque une certitude, le club ‘rouge et noir’ en aura un. Très certainement sans le sulfureux Tchétchène. Qui reste tout de même pour l’heure propriétaire du club et se battra jusqu’au bout. Mais plus grand monde ne croit à un retournement de situation.»

L’Express de Neuchâtel partage ce volontarisme. «Xamax s’éteint, un espoir s’éveille», ce tire se veut encourageant pour évoquer un avenir qui, «pour autant qu’il ne soit pas balayé par une faillite, se retrouverait en première ligue».

Des collégiens ont commencé à jouer et, en 1912, se structurent pour rencontrer d’autres adversaires, sous l’impulsion de Max Abegglen dit «Xam», d’où le nom du club.

Le Club de Neuchâtal Xamax a été créé en 1970. Il est issu de la fusion des deux principaux clubs de la région: le FC Xamax et le FC Cantonal Neuchâtel.

C’est dans les années 1980 que le club a connu ses plus grands succès. Il a notamment été couronné Champion de Suisse en 1987 et 1988. C’est également durant cette décennie qu’il est parvenu à deux reprises en quart de finale de la Coupe UEFA.

Neuchâtel Xamax a disposé de quelques entraîneurs de renom. Citons notamment: Gilbert Gress, Roy Hodgson et Ulrich Stielike.

Au cours de ses 42 ans d’existence, le club neuchâtelois n’avait passé qu’une seule saison (2005-2006) en seconde division du football suisse.

Neuchâtel Xamax s’est vu retirer sa licence par la commission de discipline de la Swiss Football League (SFL) et disparaît avec effet immédiat de l’Axpo Super League.

Elle retire également l’effet suspensif de la sanction en cas de recours dans un délai de 5 jours. Ce que va faire le propriétaire du club Bulat Chagaev.

Motif: la multiplication des manquements administratifs, des retards dans les versements de salaires et l’inculpation de faux dans les titres prononcée contre Bulat Chagaev.

Convaincue que la prétendue garantie bancaire de la Bank of America n’a pas été établie, la commission a conclu que les conditions pour la licence ne sont plus remplies par la non-présentation des documents financiers.

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