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Dialogue de sourds entre Berne et Bruxelles

La ministre a d'abord rencontré Romano Prodi à Bruxelles. Keystone

Lundi à Bruxelles, la cheffe de la diplomatie helvétique Micheline Calmy-Rey a une nouvelle fois plaidé la cause de la Suisse dans le cadre des négociations bilatérales II.

Mais la Commission européenne campe sur ses positions. Aucun accord global n’est en vue.

«Notre priorité n’est pas le calendrier. Notre priorité est de parvenir à un résultat équilibré», a résumé Micheline Calmy-Rey, à l’issue de sa journée bruxelloise. «Cela prendra le temps qu’il faudra», a ajouté la cheffe du Département des affaires étrangères.

Berne veut que tous les dossiers actuellement en discussion entre la Suisse et l’Union européenne soient traités en parallèle et bouclés ensemble. C’est ce qu’a répété Micheline Calmy-Rey à Romano Prodi, président de la Commission européenne, et à Chris Patten, commissaire chargé des Relations extérieures.

Dans une négociation, explique la ministre, «on donne et on reçoit». Le gouvernement suisse estime ainsi avoir donné satisfaction à l’UE en concluant un accord sur la fiscalité de l’épargne. En échange, Berne réclame un accord sur l’adhésion de la Suisse aux accords de Schengen.

Selon Micheline Calmy-Rey, «les obstacles ne sont pas insurmontables». La Suisse veut simplement une clarification de l’article 51 sur l’entraide judiciaire pour éviter que le secret bancaire helvétique ne soit mis en danger.

Du côté de la Commission européenne, le son de cloche est tout différent. «Nous avons donné à la Suisse ce qu’elle souhaitait, à savoir un accord sur le modèle norvégien (sur Schengen), commente un haut fonctionnaire; maintenant cela ne lui convient plus».

Par ailleurs, les Quinze estiment avoir été très «généreux» à propos de l’accord sur la fiscalité de l’épargne.

Dialogue de sourds



On assiste donc à un vrai dialogue de sourds. Chacun jugeant que la balle est dans le camp adverse.

Des deux côtés, on affirme que la décision doit être prise au niveau politique. Mais toujours aucune date n’est fixée pour cette fameuse rencontre à un haut niveau.

Sans faire aucune promesse, Romano Prodi s’est contenté de déclarer que cette rencontre pourrait avoir lieu «dans un délai pas trop éloigné». Mais dans l’entourage de Chris Patten, on estime que les conditions ne sont toujours pas réunies pour un tel rendez-vous.

Lundi, la question de l’extension de l’accord sur la libre circulation des personnes aux dix nouveaux Etats membres de l’UE a également été évoquée. Selon Micheline Calmy-Rey, ce dossier pourrait avancer rapidement.

Bruxelles a lâché du lest



En effet, Bruxelles semble avoir lâché du lest et avoir concédé à la Suisse les délais transitoires qu’elle réclamait. A noter que la prochaine séance de négociation aura lieu cette semaine à Berne, le 4 février.

Si la Commission espérait obtenir en échange davantage de souplesse de la part de la Suisse, elle peut déchanter. En effet, le message délivré par la conseillère fédérale est sans ambiguïté.

Dans ce bras de fer, la Suisse n’est pas pressée. Ce qui n’est pas le cas de l’UE qui veut conclure l’accord sur la fiscalité de l’épargne au plus vite, dès qu’elle aura terminé ses négociations avec les autres pays tiers concernés.

L’UE veut aussi boucler rapidement l’accord sur la libre circulation, car l’élargissement est prévu le 1er mai prochain.

Berne parie donc que le temps joue en sa faveur. A court terme, c’est possible. Mais dans une Union à 25, les négociations risquent d’être plus corsées.

L’Initiative de Genève rassemble

Cela dit, Micheline Calmy-Rey a cherché à replacer les relations entre la Suisse et l’Union européenne dans un «contexte» plus large.

Outre les aspects économiques, la cheffe de la diplomatie helvétique a rappelé la «coopération» menée avec l’Union dans de nombreux domaines. Et de citer, en particulier, l’Initiative de Genève pour le Proche-Orient.

Coïncidence, les deux responsables de ladite Initiative (Yasser Abed Rabbo et Yossi Beilin) étaient justement reçus pour la première fois officiellement à Bruxelles par Chris Patten et Javier Solana.

L’occasion pour Micheline Calmy-Rey de rencontrer les deux anciens ministres palestinien et israélien.

Et, sur ce dossier-là, la Suisse et l’Europe des Quinze sont à l’unisson. Berne et Bruxelles plaident en coeur en faveur de la poursuite des efforts entrepris autour de l’Initiative de Genève.

swissinfo, les agences et Barbara Speziali à Bruxelles

– La Suisse et l’Union européenne ont poursuivi lundi leur bras de fer sur les bilatérales bis.

– Micheline Calmy-Rey a affirmé que Berne est «prêt à prendre le temps qu’il faudra» pour parvenir à une conclusion «équilibrée» dans tous les dossiers.

– Elle estime que la Suisse a été «généreuse» dans la fiscalité de l’épargne. Elle devrait donc obtenir Schengen (sécurité intérieure) accompagné d’une déclaration qui garantisse le maintien du secret bancaire.

– La conseillère fédérale s’est montrée plus positive sur l’extension de la libre circulation des personnes, même si la Suisse n’est pas pressée.

– En attendant, il y a des domaines où la coopération entre la Suisse et l’Europe fonctionne bien, c’est entre autres le cas de l’Initiative de Genève pour le Proche-Orient.

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