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Douze images pour dire le foot

France-Italie 2006 à travers l'oeil de l'artiste! Harun Farocki

A Fribourg, le festival Belluard Bollwerk International (BBI) présente «Deep Play», une installation vidéo signée Harun Farocki. Le réalisateur allemand propose une lecture inédite de la finale de la Coupe du monde 2006.

Une installation hors du commun pour un événement planétaire. «Deep Play», performance technologique signée Harun Farocki, reproduit en 12 images électroniques simultanément diffusées la finale de la coupe du monde de football 2006 qui se déroula en Allemagne et opposa les deux équipes nationales française et italienne.

Depuis maintenant quelques années, des créateurs de tout bord n’hésitent pas à mettre sur le football un vernis artistique donnant à ce sport largement globalisé une interprétation toute personnelle, qui déborde le simple cadre de compétition sportive.

A l’occasion de l’Euro 08, swissinfo a d’ailleurs rendu compte de différentes expressions culturelles (livres et spectacles notamment) chevillées au foot.

Voici donc, une de plus, «Deep Play», présentée dans le cadre du festival Belluard Bollwerk International (BBI) qui se tient à Fribourg jusqu’au 5 juillet. Son auteur, Harun Farocki, plasticien, vidéaste et cinéaste allemand de renommée internationale, est l’invité de marque de cette 25e édition du BBI.

Laquelle dépasse largement les frontières suisses en mettant à son affiche des spectacles autrichiens, français, américains, belges, hongkongais… Bref, de quoi colorer les horizons.

Laboratoire d’observation

Créé en 2007 pour la Documenta de Kassel (grande exposition d’art contemporain), «Deep Play» a, depuis, fait le tour de quelques grandes villes occidentales et rencontré partout un vif succès. Sa programmation à Fribourg tombe pile poil avec la finale de l’Euro 08. Ce n’est pas là un hasard du calendrier, c’est plutôt une volonté de réorienter le regard des fans du foot: «Aucune finale ne sera la même après avoir vu l’installation vidéo ‘Deep Play’», dixit l’équipe du festival.

Harun Farocki, quant à lui, ne va pas aussi loin. Modeste comme tous les grands artistes, il confie: «Je ne sais pas si mon installation apporte au public une autre vision du sport, je sais en revanche qu’elle illustre une tendance très actuelle: montrer la vie en modèle réduit. C’est une tendance qui se développe aussi bien dans l’univers de l’art que de la télévision. J’en veux pour preuve les Star Academy et autres Loft Story. Pour ce qui concerne ‘Deep Play’, le stade de foot devient donc un laboratoire d’observation».

Sont donc «placés sous la loupe» joueurs et coachs, les uns suivis dans leur jeu, les autres étudiés dans leur comportement. Pour ce faire, Harun Farocki a disposé dans une salle 12 écrans et autant d’images diffusées simultanément qui transmettent des perspectives différentes de la finale France/Italie 2006.

Entre art et analyse

Certaines de ces images ont été produites par la FIFA, d’autres sont des prises de vue de Farocki lui-même, «l’idée ici étant de mesurer la vitesse de déplacement d’un joueur par exemple, son degré de fatigue aussi, nous explique l’artiste. On peut ainsi améliorer le rendement d’une équipe lors d’un match, optimiser sa performance».

Des graphiques, des statistiques et des séquences d’animation en 3D complètent l’installation de Harun Farocki. Le tout constitue un outil d’analyse qui, au-delà de son efficacité technique, rend hommage à l’art comme moyen d’expression ludique.

«Ce qui m’intéresse, explique encore Farocki, c’est la production du jeu. Dans le foot, il y a des stratégies qui existent déjà et qui interfèrent avec les tactiques actuelles. ‘Deep Play’ analyse, par exemple, l’évolution de la défense dans un match, comment elle se gère aujourd’hui».

Lorsqu’on demande à l’artiste si des entraîneurs s’intéressent à son œuvre, il répond: «En Allemagne en tout cas beaucoup de gens du foot sont venus voir ‘Deep Play’. Mais difficile de vous dire si, depuis, certains coaches ont revu leur tactique… ». Un Domenech, par exemple? lui demande-t-on.

«Ah, lui, lâche-t-il, ça fait plusieurs années qu’il n’a pas changé de stratégie, ce n’est pas maintenant qu’il va le faire!».

swissinfo, Ghania Adamo

«Deep Play» de Harun Farocki, dans le cadre du festival Belluard Bollwerk International (BBI), Fribourg, du 27 juin au 5 juillet. Mardi-vendredi: 18h- 23h. Samedi-dimanche: 15h-23 h.

A noter que Harun Farocki présente également au BBI, «Die Schöpfer der Einkausfswelten», un film dans lequel il «imagine le design des centres commerciaux et élabore des stratégies pour vendre davantage». 3 et 4 juillet à 20h.

Cinéaste et plasticien allemand né en 1944, il vit et travaille à Berlin.

De 1966 à 1968, il suit les cours de la Deutsche Film-und Fernsehakademie de Berlin, avant d’enseigner à l’Université de Berkley en Californie.

Réalisateur de télévision à ses débuts, il s’oriente plus tard vers le cinéma et tourne plus de 90 films, pour la plupart des documentaires.

Aujourd’hui, il est considéré comme l’un des plus grands vidéastes d’Europe.

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