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Les Suisses mettent la main à la pâte et les moulins pleurent

Una pagnotta fatta in casa.
La cuisine retrouve sa centralité dans les foyers confinés. © Keystone / Christian Beutler

Faire du pain ou des pâtes à la maison est l'une des activités les plus populaires en cette période de confinement. La demande de farine est donc montée en flèche. Mais pour les minoteries, qui approvisionnent la Suisse en farine, la période n’est pas forcément faste.

Il est arrivé à tout le monde ces derniers temps de constater l’absence de produits de première nécessité dans les rayons des magasins. En Suisse, les stocks de sécurité sont soudainement redevenus un sujet d’actualité. La demande en produits de première nécessité, en aliments de longue conservation ou en farine a augmenté.

De nos jours, mettre la main à la pâte a retrouvé son sens premier dans de nombreux foyers. En témoignent les photos de miches de pain, de pâtes ou de gâteaux faits maison postées sur les réseaux sociaux.

De fait, la production de farine à usage domestique a significativement augmenté, comme le confirment tant Alessandro Fontana, propriétaire du moulin MaroggiaLien externe, que la porte-parole du grand distributeur Coop, Marilena Baiatu.

On pourrait donc penser que les moulins suissesLien externe (il y en a une centaine) sont sous forte pression pour répondre à la demande actuelle. Ceux qui sont plus inquiets se demanderont également s’il y aura assez de farine pour les prochaines semaines ou les prochains mois.

Diminution de la production de farine

Pourtant, de nombreux moulins ont dû réduire leurs activités. «La production globale a chuté de 25 à 30%, confirme Alessandro Fontana. Ce sont les épiceries fines et les boulangeries qui absorbent normalement notre production. Comme nous le savons, les restaurants et les pizzerias sont fermés et les boulangeries travaillent à un rythme réduit, produisant environ moitié moins qu’avant les mesures de confinement.»

Ces clients traditionnels achètent de la farine en sacs de 25 kg. Ce n’est plus le cas avec les clients individuels. «Nous avons eu une augmentation exponentielle des demandes de farine en sacs d’un demi-kilo et d’un kilo. Le secteur de la farine pour la vente au détail avant la crise représentait un dixième de la production. Maintenant, en une semaine, nous préparons autant de paquets de farine d’un kilo qu’en un mois. Et la tendance est à la hausse», détaille Alessandro Fontana.

Pour les grands distributeurs comme Coop et sa filiale SwissmillLien externe (qui moud 1000 tonnes de céréales panifiables par jour), la situation reste la même: «La demande individuelle de farine a nettement augmenté, précise Marilena Baiatu. En mars, elle a triplé dans les magasins Coop. Swissmill a augmenté sa capacité de production et aussi son personnel. En bref, nos magasins peuvent faire face aux nouvelles demandes sans aucun problème.»

Les commandes en ligne

Le discours est différent pour les petits producteurs. Afin de réduire partiellement les pertes, le moulin Maroggia compte sur son portail en ligne. «Le nombre de commandes via notre plateforme web est impressionnante, souligne Alessandro Fontana. C’était une intuition d’il y a quelques années et aujourd’hui nous en récoltons les fruits. Il semblait étrange de proposer nos produits en ligne alors qu’ils n’étaient probablement pas les plus populaires sur le net. Maintenant, je peux dire que c’est une belle réalité, inimaginable il y a seulement quelques semaines.»

Matières premières disponibles

La matière première – les céréales panifiables telles que le blé, l’épeautre et le seigle – ne manque pas. «Nous avons un bon approvisionnement, car nous achetons un lot important de matières premières au moment de la récolte en juin/juillet. Puis, au cours de l’année, nous effectuons d’autres achats selon les besoins», précise le patron du moulin Maroggia qui en détient environ 6500 tonnes.

«Ensuite, rappelle Alessandro Fontana, la farine fait partie du stock obligatoire géré par la Réserve SuisseLien externe. La Confédération prévoit un approvisionnement suffisant en céréales panifiables pour quatre mois. Dans ce cadre, 1000 tonnes de notre stock appartiennent théoriquement à la Confédération.»

Les stocks obligatoires de la Confédération ne sont pas concernés. La situation est définitivement sous contrôle. Un autre facteur important doit être rappelé: «Près de 80% des céréales panifiables sont d’origine suisse. Ils sont produits par nos agriculteurs, souligne Alessandro Fontana, nous pouvons donc dire que nous ne sommes pas dépendants des pays étrangers». Le reste de nos besoins proviennent du Canada et du Brésil.

Si la crise sanitaire devait durer longtemps et qu’il faille donc puiser dans les réserves de la Confédération, Alessandro Fontana a une solution: «En temps de guerre, par exemple, me disait mon grand-père, la farine n’était pas raffinée comme aujourd’hui.» En produisant de la farine complète, il est possible d’économiser jusqu’à 30% de céréales moulues.

«Mais je dois le dire, conclut Alessandro Fontana, le moulin que je dirige n’a jamais connu une situation similaire. C’est un événement exceptionnel pour nous aussi.»​​​​​​​

>> Coronavirus et stocks alimentaires. L’émission ABE (RTS) a fait le point le 31 mars dernier:

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traduit de l’italien par Frédéric Burnand

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