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La grève de Swissmetal est suspendue

Les ouvriers de Reconvilier vont reprendre le travail, mais le conflit n'est pas terminé pour autant. Keystone

Dans le Jura bernois, les employés de Swissmetal Boillat ont approuvé les conditions d'une médiation avec la direction et donc la suspension de la grève.

Après trente jours consécutifs de débrayage dans l’usine de Reconvilier, le travail devrait reprendre en début de semaine et se poursuivre tant que dureront les négociations.

C’est peut-être le début de la fin de l’un des conflits du travail les plus longs qui ait paralysé une entreprise suisse au cours des dix dernières années. Jeudi après-midi, les ouvriers de «La Boillat» ont voté la suspension de leur mouvement par 138 oui contre 63 non.

Les ouvriers sont sortis seuls ou en petits groupes de l’usine 2, où ont eu lieu l’assemblée du personnel et le vote à bulletins secrets. La presse n’a pas été autorisée à assister aux débats.

Ouvriers déçus

La proclamation des résultats a eu lieu dans un silence pesant. De nombreux ouvriers ont manifesté leur abattement a l’issue du vote. «On se casse, on n’a plus rien à faire ici», a ainsi lancé un gréviste. Des discussions animées ont aussi eu lieu dans l’usine. «On nous a mis le couteau sous la gorge», a ajouté une ouvrière.

«On va mettre de l’ordre pour reprendre le boulot lundi», a expliqué le porte-parole des grévistes, Nicolas Wuillemin. Pour lui, il s’agit d’un vote de la raison sans enthousiasme. «On va maintenant se battre pendant les négociations», a-t-il ajouté.

«Si on refusait, c’était fini pour nous», a estimé de son côté Mario Grünenwald, président de la commission ouvrière. Reprendre le travail peut aussi permettre d’attirer d’éventuels repreneurs, a-t-il ajouté. «Si on refusait le protocole de médiation, on était tout seuls, c’était 350 licenciements et une évacuation de l’usine».

La déception, pour ne pas dire plus, est également perceptible sur le blog du personnel de La Boillat, où l’on peut notamment lire ceci: «Plus de 100 employés se sont refusés à voter, dégoûtés qu’ils sont. Certains ont vomi».

Syndicat soulagé

Le syndicat Unia, qui avait appelé à la reprise du travail, a paru soulagé. «Le personnel a ainsi manifesté un sens des reponsabilités face aux clients et à la région», a estimé Renzo Ambrosetti, co-président d’Unia. Il a estimé qu’un vote négatif n’aurait pas été compris à l’extérieur.

Le vote de jeudi constitue un coup de théâtre dans la mesure où la veille les employés du site de Reconvilier ne s’étaient même pas prononcés sur la proposition de médiation, les commissions du personnel l’ayant jugé insuffisante.

Pressions

Selon certaines sources, le revirement est intervenu sur pression à la fois de Rolf Bloch, le médiateur nommé par le ministre de l’économie Joseph Deiss, et du syndicat Unia, qui représentait les travailleurs autour de la table de médiation, avec une délégation du conseil d’administration de Swissmetal.

Jeudi matin, les représentants des ouvriers ont rencontré directement Rolf Bloch. L’ancien industriel, ex-patron des Chocolats Camille Bloch, leur a livré les clarifications demandées concernant la répartition des tâches en cas de reprise de la production.

Il est aussi prévu de discuter du sort des cadres licenciés la semaine dernière par la direction et d’examiner les autres licenciements.

Les négociations devraient se dérouler entre Swissmetal d’une part, le personnel de Reconvilier et Unia d’autre part. Le syndicat dit espérer une attitude constructive du conseil d’administration du groupe métallurgique et le renoncement à de «nouvelles provocations» de son côté.

swissinfo et les agences

La première grève des quelque 400 employés et cadres de l’usine Swissmetal de Reconvilier a démarré le 16 novembre 2004.
Les grévistes protestaient contre le renvoi du directeur du site. Le mouvement a duré dix jours.
La deuxième grève a commencé le 25 janvier 2006.
Au vingtième jour, la direction du groupe Swissmetal a licencié la majorité des cadres de Reconvilier.

Avec 30 jours consécutifs, la grève de Reconvilier est l’un des conflits du travail les plus longs qui ait paralysé une entreprise suisse durant les dix dernières années.

Chez Filtrona à Crissier (canton de Vaud), les salariés avaient cessé le travail pendant presque deux mois, mais avec des interruptions, jusqu’au 26 janvier 2005. Le site a finalement fermé cinq mois plus tard.

En automne 2002, des ouvriers de la construction se sont mis en grève pour la retraite flexible dès 60 ans. Ils ont obtenu un contrat collectif satisfaisant cette revendication.

Le plus long conflit du travail de l’après-guerre en Suisse a duré 15 semaines. Il a été mené par les plâtriers-peintres zurichois en 1963.

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