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Non à l’expansion de Swisscom à l’étranger

Swisscom est dans le bleu pour la marche à suivre immédiate. Keystone

Le gouvernement s'oppose à ce que l'opérateur téléphonique suisse achète des participations à l'étranger, tant que lui-même sera majoritaire.

Le Conseil fédéral a fait part de sa décision au lendemain de l’annonce qu’il souhaitait vendre ses parts de Swisscom et privatiser l’opérateur.

«Swisscom a besoin de prendre des risques mais nous ne sommes pas prêts à participer à ces risques avec notre argent.» Dieter Leutwyler, porte-parole du Ministère suisse des finances, a indiqué que les acquisitions étrangères seraient bloquées parce que les risques impliqués seraient trop élevés pour le gouvernement.

Négociations en Irlande

Récemment, Swisscom avait confirmé être en discussion avec Eircom en vue d’acquérir une participation majoritaire sur l’ancien monopole d’Etat et principal opérateur de téléphonie fixe en Irlande.

«Nous avons donné instruction à notre représentant au conseil d’administration de voter contre l’acquisition d’une participation à l’étranger», précise Dieter Leutwyler à swissinfo.

«Nous prenons acte de la position du gouvernement et notre direction va étudier la marche à suivre», déclare à swissinfo Pia Colombo, porte-parole de Swisscom.

Cette dernière n’a ni confirmé ni infirmé que les négociations avec Eircom vont se poursuivre. La société souligne que son mode opératoire a permis de distribuer 2,9 milliards de francs de dividendes aux actionnaires uniquement pour 2005.

Reste à savoir si le géant bleu peut prendre le risque de se voir contredit formellement en assemblée générale et de voir capoter une acquisition de grosse taille à ce stade-là.

Les investisseurs ne semblent pas y croire. Le titre Eircom plongeait de plus de 14% à Dublin après l’annonce de M. Leutwyler. Swisscom ne lâchait en revanche que 0,83% à la clôture, après avoir évolué dans le positif auparavant.

Message contradictoire

Pour Matthias Finger, professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, le gouvernement envoie un message contradictoire.

«Cela aurait eu plus de sens d’annoncer jeudi qu’il avait l’intention de bloquer les acquisitions étrangères de Swisscom, en même temps qu’il annonçait vouloir vendre sa participation majoritaire», a déclaré à swissinfo cet expert sur la privatisation de l’opérateur de service public.

Dans son communiqué conjoint de jeudi, le Conseil fédéral avait indiqué que la privatisation de Swisscom lui permettrait de nouer plus facilement des alliances. «Le message est plutôt confus et je me demande si le gouvernement parle d’une seule voix sur ce sujet.»

Mais tout le monde ne partage pas cet avis. Claude Zehnder, analyste à la Banque cantonale de Zurich, qualifie la nouvelle de «positive». «Le projet d’acquisition peu convainquant de Swisscom est maintenant liquidé», dit-il à swissinfo. Avant de qualifier de «modeste» le projet de synergie avec Eircom.

Mais l’analyste estime que ce rebondissement devrait avoir un effet négatif sur le cours de l’action. «Le gouvernement se tire une balle dans le pied puisqu’il veut vendre ses parts. Cela n’a pas de sens», conclut-il.

Incompréhension quasi-générale

Pour le Syndicat de la communication, le blocage annoncé par le gouvernement est un «chantage», a dit Giorgio Pardini, son secrétaire central. A l’Union syndicale suisse, Rolf Zimmermann juge l’attitude de l’exécutif «contradictoire et sans concept».

Parmi les partis gouvernementaux, à chaud, l’incompréhension était également manifeste vendredi, en particulier chez les socialistes. Le secrétaire général du Parti démocrate chrétien s’est dit «choqué». Le Parti radical (droite) ne s’est pas encore exprimé et seule l’Union démocratique du centre (UDC, droite dure) appuie clairement la nouvelle retenue du gouvernement.

L’avant-projet de modification de la loi sur l’entreprise de télécommunications devrait partir en consultation au début 2006, mais l’accueil des partis et des milieux intéressés s’est d’ores et déjà révélé explosif. La gauche et les syndicats s’opposent fermement et assurent qu’ils lanceront un référendum contre la privatisation.

swissinfo

La Confédération détient 66% de Swisscom, soit une valeur de plus de 17 milliards de francs.
Le titre a rapporté 9 milliards à l’Etat depuis 1998.
Le capital est réparti entre 64’000 actionnaires, dont la grande majorité en Suisse.
Parmi eux, 12 possèdent plus de 100’000 actions.

– Le gouvernement a annoncé jeudi sa volonté de donner toute latitude à l’opérateur historique, via un désengagement de l’Etat et la privatisation de Swisscom.

– Vendredi, il indiquait qu’il était opposé à toute acquisition à l’étranger tant qu’il serait lui-même actionnaire majoritaire.

– Il s’agit notamment de la reprise par l’opérateur suisse d’Eircom, l’ancien monopole d’Etat et principal opérateur de téléphonie fixe d’Irlande.

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