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Fiscalité des entreprises et AVS font-elles vraiment bon ménage?

Conseil des Etats réunis
A l'exception de la droite conservatrice, tous les grands partis nationaux soutiennent la réforme mais sans enthousiasme. Keystone

La Chambre haute du Parlement a accepté jeudi de lier le projet de réforme de la fiscalité des entreprises au financement des retraites. Sans enthousiasme, quasiment tous les partis ont soutenu ce compromis. Seule la droite conservatrice considère le pari comme trop risqué.

Les sénateurs ont décidé de lier le destin de deux dossiers qui ont échoué en 2017 devant le peuple, soit la Réforme de l’imposition des entreprises  (RIE III) et la réforme des retraites Prévoyance vieillesse 2020 (PV2020).

Le Conseil des Etats (Chambre haute) a accepté ce jeudi par 34 voix contre 5 le Projet fiscal 17 (PF 17)Lien externe de sa la Commission de l’économie et des impôts. Il s’agit d’une nouvelle solution qui doit permettre à la Suisse de se conformer aux standards fiscaux internationaux, après le refus de la RIE III. Le projet prévoit la suppression des privilèges fiscaux accordés aux entreprises étrangères, exigée par l’Union européenne et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

«Nous ne faisons rien d’autre que de lier deux objets qui ont échoué. Marier deux malades, que ce soit en affaires ou en politiques, n’a jamais mené au succès»​​​​​​​
Peter Föhn, UDC

Afin de maintenir la compétitivité de la Suisse, la réforme contient également diverses baisses d’impôts pour les entreprises. En guise de compensation sociale aux allègements prévus, chaque franc d’impôt perdu en raison du PF 17 devrait être «compensé» par un franc au profit de l’Assurance-vieillesse et survivants (AVS). Cela permettra de rapporter 2 milliards de francs supplémentaires à l’AVS, dont le financement est menacé. 

Compromis équilibré ou pari risqué?

Quasiment tous les grands partis nationaux ont reconnu l’importance et l’urgence de la réforme, puisque sans adaptation de sa législation la Suisse pourrait se retrouver l’an prochain sur la liste noire des paradis fiscaux de l’Union européenne.

Seule l’Union démocratique du centre (UDC / droit conservatrice) s’est élevée contre le compromis qui met en relation fiscalité et système des retraites. «Je veux une solution et la Suisse a besoin d’une solution mais pas à n’importe quel prix», a affirmé le sénateur UDC Peter Föhn. Il a estimé qu’un tel paquet n’a aucune chance de passer l’épreuve des urnes, car il réunit deux thématiques totalement différentes: «Nous ne faisons rien d’autre que de lier deux objets qui ont échoué. Marier deux malades, que ce soit en affaires ou en politiques, n’a jamais mené au succès.»

«Nous avons, sur le plan social, une réforme fiscale qui profite plutôt aux classes aisées, et une réforme de l’AVS qui profite clairement aux milieux populaires et aux classes moyennes»
Christian Levrat, PS

Le président du Parti socialiste (PS) Christian Levrat a, lui, rappelé les conclusions de l’Office fédéral de la justice, qui a décrété que le traitement parallèle de la réforme fiscale et du financement de l’AVS est un «cas limite» mais acceptable. S’il qualifie la solution d’originale, le sénateur estime que le rôle du Parlement est «de créer des liens pour trouver des solutions et dépasser des blocages». La gauche ne déborde pas d’enthousiasme mais accepte le compromis. «Nous avons, sur le plan social, une réforme fiscale qui profite plutôt aux classes aisées, et une réforme de l’AVS qui profite clairement aux milieux populaires et aux classes moyennes», résume Christian Levrat.

Le ministre des Finances Ueli Maurer a souligné que le projet n’allait pas dispenser la Confédération de réformer l’AVS. Il a précisé qu’environ cinq milliards de francs étaient nécessaires à son financement, alors que le PF 17 fournit une contribution de deux milliards de francs. «Je suis convaincu que c’est une solution qui ne fera pas école dans le domaine fiscal. Mais c’est une petite œuvre d’art du compromis politique», a-t-il toutefois salué. Le gouvernement présentera une nouvelle mouture de la réforme des retraites avant l’été.

Après le Conseil des Etats durant cette session, le Conseil national (Chambre basse) devrait se pencher sur le projet lors de la session d’automne. Le Parlement devrait boucler la réforme dans la foulée. En cas de référendum, la votation pourrait avoir lieu en février ou en mai 2019.

LE COMPROMIS:

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