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La Banque nationale au secours de l’assurance vieillesse?

Le siège de la Banque nationale suisse à Berne. Keystone

Le vieillissement de la population met l'avenir financier de l'assurance vieillesse (AVS) en péril. La gauche soumet donc une solution au peuple: utiliser les excédents de la Banque nationale Suisse (BSN).

La droite et le gouvernement rejettent cette idée. Ils craignent notamment un affaiblissement de la BNS et des finances publiques.

Comme les autres pays occidentaux, la Suisse est confrontée au vieillissement croissant de sa population. L’effectif des plus de 65 ans – qui représentaient déjà 15,8% en 2004 – augmentera de 60 à 120% d’ici 2050 selon les scénarios de l’Office fédéral de la statistique.

En d’autres mots, il y aura toujours moins d’actifs pour de plus en plus de retraités. C’est un problème pour l’AVS, d’autant plus que cette assurance est principalement financée par les contributions salariales.

Cette préoccupation est partagée par la classe politique qui présente différentes idées pour trouver une solution. Entre autres idées, il est notamment question élever l’âge de la retraite (actuellement fixé à 65 ans) ou de diminuer les prestations fournies par l’AVS.

Mettre la BNS à contribution

Le parti socialiste ne veut pas de ces deux solutions. C’est pour cette raison qu’il apporte sa propre solution pour assurer le financement de l’AVS au travers de son initiative «Bénéfices de la Banque nationale pour l’AVS» qui est soumise au peuple le 24 septembre.

Cette initiative propose de verser l’argent dont la BNS n’a pas besoin pour conduire sa politique monétaire dans le fonds AVS. Les sommes en question sont conséquentes. «Le bénéfice moyen annuel de la Banque nationale est de 3,4 milliards», rappelle Marlyse Dormond, députée socialiste et vice-présidente du Comité pour la sécurité AVS (COSA).

Actuellement, ces excédents sont partagés à raison d’un tiers pour la Confédération et de deux tiers pour les cantons, ainsi que le prévoit la Constitution. A noter que l’initiative ne priverait pas totalement les cantons de cette manne, puisqu’elle prévoit qu’un milliard par an leur serait encore versé.

«Cette initiative résout en partie les problèmes de l’AVS, car elle apporte un financement complémentaire à celui qui existe déjà, un financement solide et sur la durée», plaide Marlyse Dormond.

Indépendance mise en danger

Le gouvernement ainsi que la majorité bourgeoise du Parlement ne partagent pas cet avis. Ils recommandent donc au peuple de refuser l’initiative.

La droite estime tout d’abord que cette initiative mettrait la BNS sous pression en la forçant à dégager de bons résultats, afin de financer l’AVS. Le lien que l’initiative crée entre la BNS et une assurance sociale nuit à l’indispensable indépendance que toute banque nationale doit conserver pour mener un politique monétaire, dénoncent les partis de droite.

A noter que cet avis est partagé par la BNS elle-même. Traditionnellement discret au sujet des dossiers politiques, le président de sa direction Jean-Pierre Roth est sorti de sa réserve pour exprimer publiquement tout le mal qu’il pensait de l’initiative.

Pas une solution

La droite estime par ailleurs que l’initiative met en danger les finances de la Confédération et des cantons en les privant de tout ou partie des excédents de la BNS. «Au niveau fédéral, cela peut déboucher sur des suppressions d’emplois dans l’administration et de nouveaux plans d’austérité», dénonce le sénateur démocrate-chrétien (PDC / centre droit) Urs Schwaller.

Cet argument est réfuté par Marlyse Dormond. La députée socialiste indique que les excédents de la BNS sont considérés comme des recettes extraordinaires qui ne sont pas employées pour le fonctionnement du ménage fédéral, mais pour réduire la dette publique.

«Cette initiative ne représente pas une solution pour l’AVS», conclut Urs Schwaller. D’autant que rien n’indique que les excédents de la BNS resteront à l’avenir aussi bons qu’ils l’ont été au cours de ces dernières années.

Pour Urs Schwaller le résultat pourrait même aller à l’encontre du but recherché. «L’initiative aura pour seul effet qu’on ne va pas s’attaquer aux véritables problèmes de financement de l’AVS dans les années à venir. Cela permettra simplement au Parlement de ne rien faire, personne ne voulant se rendre impopulaire en revoyant les prestations actuelles ou en augmentant la TVA.»

swissinfo, Olivier Pauchard

L’assurance-vieillesse et survivants forme le premier des trois piliers du système des retraites.

Obligatoire, l’AVS est une assurance de base qui assure un minimum vital aux retraités (dès 65 ans), aux orphelins, aux veufs/veuves.

Le 2ème pilier est la prévoyance professionnelle. Il s’agit d’une assurance privée obligatoire à laquelle salariés et employeurs cotisent à parts égales. L’argent accumulé est redistribué à la retraite sous forme de rente ou de capital.

Le troisième est la prévoyance individuelle. Déductible fiscalement, cette dernière est facultative.

En janvier 2006, 1’701’000 personnes touchaient une rente de vieillesse et 104’000 une rente de veuf ou de veuve.
La rente mensuelle moyenne était de 1860 francs pour les personnes seules et de 3098 pour les couples.

Il avait déjà été question d’attribuer à l’assurance tout ou partie de l’or excédentaire de la BNS.

La Suisse ayant renoncé à la parité or, la BNS a vendu l’or qui ne servait plus à sa politique monétaire. Le produit a rapporté 21 milliards de francs.

La droite dure demandait que cette somme soit versée à l’AVS. Le gouvernement et le Parlement souhaitaient partager cette somme entre trois bénéficiaires: les cantons, l’AVS et la Fondation suisse solidaire.

Ces deux projets ont été refusés par le peuple. Les 21 milliards ont donc été distribués conformément à ce que prévoit la Constitution, à savoir un tiers pour la Confédération et deux tiers pour les cantons.

La part des cantons a déjà été versée. Quant à la part de la Confédération (7 milliards), le gouvernement propose de la verser au fonds AVS si l’initiative COSA est refusée par le peuple le 24 septembre.

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