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Fonds Abacha, un feu vert sous condition

Sani Abacha durant un sommet africain à Lomé en 1997. Keystone Archive

Dans l'affaire des fonds Abacha, le Tribunal fédéral a rejeté les ultimes recours des proches de l'ancien dictateur.

Mais il demande à Lagos de leur garantir une procédure conforme aux droits de l’homme.

Les juges du Tribunal fédéral (TF) exigent cette garantie notamment pour la veuve de l’ancien chef d’Etat nigérian et ses deux fils Abba et Mohammed.

Cela dit, l’Office fédéral de la justice (OFJ) ne pourra pas expédier les documents requis par le Nigeria avant d’avoir reçu les assurances indispensables.

Il devra par ailleurs procéder au tri de certains documents. Il aurait, en effet, joint par inadvertance des pièces antérieures à 1993, donc non couvertes par la demande d’entraide du Nigeria.

Pour le reste, les recourants – parmi lesquels figurent les proches de Sani Abacha et de multiples sociétés domiciliées aux Iles Vierges Britanniques, à Vaduz et au Panama – voient leurs conclusions rejetées.

Dans certains cas, elles sont même déclarées irrecevables parce qu’elles concernent des comptes ouverts sous un faux nom.

Impunité sur le plan civil

Sur le fond, les recourants soutenaient qu’aucune procédure pénale ne serait ouverte au Nigeria.

Ils se prévalaient d’un décret ayant mis définitivement fin aux poursuites engagées contre eux. Ils prétendaient qu’une enquête menée au Nigeria par un groupe d’investigation spécial aurait mis un terme aux efforts de recouvrer les fonds Abacha.

Dans son arrêt, publié jeudi, le TF rejette ces arguments. Après avoir examiné le décret invoqué par les recourants, il juge que ce texte ne garantit l’impunité que sur le plan civil.

Il ne doit toutefois pas être compris comme excluant toute poursuite pénale contre les personnes qu’il vise.

Quant à l’enquête ouverte par le groupe d’investigation spécial, elle n’a pas un caractère judiciaire. Ses conclusions ne permettent donc pas de fonder le rejet de la demande d’entraide, juge le TF.

De même, une convention – concernant le montage financier d’un complexe sidérurgique – conclue en août 1999 entre les consorts Abacha et l’Etat du Nigeria ne fait pas obstacle à des poursuites pénales, selon le jugement du TF.

Banque centrale pillée

Selon certaines estimations, l’ancien chef d’Etat décédé en 1998 et ses proches auraient détourné 2,2 milliards de dollars (environ trois milliards de francs) entre 1993 et 1998, au préjudice de la Banque centrale du Nigeria.

En Suisse, la procédure a débouché sur le gel de 680 millions de dollars. Une enquête de la Commission fédérale des banques a établi que six banques avaient violé leurs obligations de diligence dans cette affaire.

Credit Suisse éclaboussé

Le Credit Suisse a été particulièrement touché. Il a écopé d’une amende pour avoir accepté 317 millions de francs d’un des fils de l’ex-dictateur.

L’an dernier, un accord transactionnel avait failli aboutir entre la famille Abacha et le Nigeria. Le projet avait toutefois capoté en septembre dernier, ce qui avait conduit le TF à reprendre la procédure.

La Suisse n’est de loin pas le seul pays concerné par l’affaire des fonds de l’ancien dictateur. Le Nigeria a aussi envoyé des demandes d’entraide en Grande-Bretagne, à Jersey, au Luxembourg, au Liechtenstein, en Allemagne et aux Etats-Unis.

swissinfo et les agences

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