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Handicap International dénonce les bombes à sous-munitions

Les sous-munitions qui n'explosent pas constituent un danger pour les civils Keystone

Le Parlement suisse s'apprête à discuter d'une initiative visant à interdire les bombes à sous-munitions. Non explosées, celles-ci continuent à tuer même après la fin des conflits.

Selon Handicap International, qui a présenté le premier rapport sur ce thème, l’interdiction de ce type d’armes renforcerait la crédibilité de la politique humanitaire de la Suisse.

L’étude présentée jeudi dans dix villes, dont Berne, a recensé plus de 11’000 victimes confirmées dans 24 pays. Au total, 360 millions de bombes à sous-munitions ont été utilisées jusqu’à présent. 33 millions n’ont pas explosé et sont devenues des mines antipersonnel, indique Handicap International.

La Suisse possède pour sa part 200’000 exemplaires de ces armes. Ces bombes «n’ont pas leur place dans un pays civilisé», a déclaré le directeur d’Handicap International Suisse, Paul Vermeulen.

Le député John Dupraz a décidé de relayer ces conclusions sur le terrain politique. Il appelle à inscrire l’interdiction de la fabrication, de l’exportation, du stockage et de l’utilisation de ces armes dans la loi fédérale sur le matériel de guerre (LFMG). Les bombes existantes seraient détruites.

Question de crédibilité

«On ne peut pas prêcher dans le monde le respect et la défense des droits de l’homme et maintenir ce type d’armes», a-t-il déclaré. Son initiative, cosignée par 42 autres parlementaires, a été rejetée par la Commission de politique de sécurité de la Chambre basse. Elle devrait être examinée par le plénum lors de la prochaine session parlementaire.

Le député et l’ONG souhaitent également un cadre juridique international pour l’interdiction de ces armes. Le récent conflit au Liban démontre à quel point ce combat est d’actualité, estime John Dupraz.

L’étude d’Handicap International est la première analyse du genre dans le monde. Elle a été réalisée avec l’Université de Baramand au Liban et le ministère norvégien des Affaires étrangères.

Conférence à Genève

Handicap International présente ce rapport alors que se tiendra dès mardi prochain et jusqu’au 17 novembre à Genève la conférence d’examen de la Convention interdisant les armes classiques dites inhumaines.

«Nous appelons les Etats à lancer les négociations sur un protocole additionnel à la Convention afin d’interdire l’utilisation des bombes à sous-munitions», a déclaré à Genève Stanilas Brabant, directeur politique d’Handicap international.

Pour cette organisation comme pour d’autres ONG, la Convention de l’ONU interdisant les armes classiques dites inhumaines serait le cadre juridique approprié pour répondre à la crise humanitaire provoquée par les bombes à sous-munitions dans le monde.

Handicap note que, jusqu’ici, quelques pays – l’Autriche, la Norvège et la Suède – se sont prononcés en faveur d’un traité sur les armes à sous-munitions. Mais, M. Brabant n’est pas optimiste quant à une décision rapide, en raison de l’hostilité des militaires qui défendent l’efficacité des sous-munitions contre les chars.

Projet de moratoire

En attendant, le Mexique devrait proposer à la conférence de décider un moratoire sur l’utilisation des bombes à fragmentation, a indiqué Handicap.

John Borrie, de l’Institut de l’ONU pour le désarmement (UNIDIR), explique qu’une décision pour lancer les négociations sur un nouveau traité est peu probable cette année. Le blocage des discussions sur tous les dossiers concernant le désarmement en témoigne.

L’expert fait remarquer que certains Etats parties à la Convention, comme la Chine, la Russie et le Pakistan, bloquent tout progrès sur les mines antivéhicule et antichar. Il s’agit là d’un autre dossier polémique.

Si les Etats parties à la Convention ne parviennent pas à s’entendre, Handicap place ses espoirs dans «un nouveau processus d’Ottawa». Lancé par le Canada, il a permis de négocier en dehors de l’ONU le traité d’interdiction des mines antipersonnel. Signé en 1997, il est considéré comme un succès, a souligné M. Brabant.

La Convention de 1980 sur les armes classiques dites inhumaines a été ratifiée par cent pays, dont la Suisse. La précédente conférence d’examen avait eu lieu en 2001 à Genève.

swissinfo et les agences

Dans son rapport, Handicap International a répertorié 11’000 victimes de bombes à sous-munitions dans 24 pays.
98% des victimes étaient des civils, dont 27% d’enfants.
La Suisse dispose de 200’000 bombes à sous-munitions.

Ces bombes sont constituées d’un conteneur de près d’une tonne et demie. Une fois lâché d’un avion ou lancé par un canon, celui-ci s’ouvre à la hauteur prévue et laisse échapper les dizaines d’autres sous-munitions qu’il contient.

Celles-ci tombent, ralenties par un petit parachute. Le senseur dont elles sont dotées leur permet de se fixer sur les véhicules ou d’autres masses métalliques qui se déplacent.

Souvent pourtant les sous-munitions n’explosent pas. Elles représentent alors un danger mortel pour quiconque les heurte par inadvertance ou les ramasse comme le font les enfants pour jouer.

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