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L’Union frappe la Suisse avec de nouvelles taxes

Certaines exportations suisses vers l’UE seront taxées dès le 1er mars. Keystone

A partir du 1er mars, les produits issus de l’Union européenne importés en Suisse seront taxés s’ils sont réexportés vers l’Union.

De son côté, la Suisse fera tout ce qui est en son pouvoir pour s’opposer à cette décision, dont elle ne connaît pas encore les fondements.

La tension monte entre la Suisse et Bruxelles. Sans prévenir la Suisse, l’Union européenne (UE) a pris cette décision de manière unilatérale.

Il s’agit d’un changement étonnant, avoue à swissinfo Stephan Schmid, porte-parole du Bureau de l´intégration, revenant sur une information de la «Neue Zürcher Zeitung».

«Berne fera tout son possible pour empêcher que cette mesure n´entre en vigueur», précise le porte-parole. Pour l´heure, Bruxelles n´a adressé aucune information officielle sur ce sujet à la Suisse qui a appris la nouvelle par hasard.

Accord de 1972

«Tant que nous n’aurons pas accès aux considérants qui motivent cette décision, il est impossible d’identifier les motivations de notre premier partenaire économique», poursuit Stephan Schmid.

Ce qui est certain, en revanche, c’est que cette nouvelle interprétation de l’accord de libre-échange de 1972 faite par l’Union européenne pourrait coûter cher à la Suisse.

«Cette mesure touchera l´ensemble de l´industrie», selon Urs Jaun de la division Circulation internationale des marchandises au Secrétariat d´Etat à l´économie (seco).

Certaines entreprises achètent des denrées en Europe, les importent en Suisse où elles les stockent ou les transforment, avant de les vendre à travers l´UE.

Centres de logistiques

«On peut penser aux centres de logistiques ou aux maisons de vente par correspondance qui disposent d´entrepôts en Suisse», ajoute Urs Jaun. Les produits qui ne font que transiter ne sont pas concernés.

Quoi qu´il en soit, même si les conséquences d´une telle décision pour l´économie helvétique ne sont pas chiffrables, il devrait s´agir d´une somme importante.

Un avis que partage Swissmem, l´organe faîtier de l´industrie des machines, équipements électriques et métaux. «Les répercussions sont difficiles à estimer, relève la porte-parole Dorothea Tiefenauer. Les entreprises suisses connaîtront des difficultés face à la concurrence».

Position géographie

Jusqu´à présent les réexportations de l´UE et des pays de l´Association européenne de libre-échange (Suisse, Norvège, Liechtenstein et Islande) étaient exonérées de droits de douane.

Cette pratique repose sur l´accord de libre-échange conclu en 1972 entre les deux organisations. Avec ce changement, l´UE paraît privilégier une nouvelle lecture de cet accord.

Si tous les pays de l´AELE seront concernés, la Suisse, de par sa position géographique, ressentira la nouvelle disposition de manière particulièrement forte, estime Urs Jaun.

«Nous avons des contacts avec la Communauté et les Etats membres, mais rien ne peut encore être affirmé sur la manière dont les autorités comptent réagir».

Discussions enflammées

Une chose est sûre, les discussions entre Berne et Bruxelles vont se prolonger et les bilatérales II seront encore le motif de nombreux débats. La visite du président de la Confédération Joseph Deiss en début de semaine à Dublin a mis en évidence l´impasse dans laquelle se trouvent les négociations.

Berne souhaiterait boucler les bilatérales II dans leur ensemble alors que Bruxelles refuse tout lien entre la signature de l´accord sur la fiscalité de l´épargne et ceux sur la sécurité intérieure et l´asile.

Ce nouveau durcissement des relations commerciales entre la Suisse et l’Union européenne est sans doute un moyen d’accroître la pression sur les négociateurs suisses, en les impressionnant.

Une interprétation à laquelle le bureau de l’intégration ne souscrit pas. «On ne peut pas établir un lien entre les bilatérales et la décision de Bruxelles», souligne Stephan Schmid.

Et le porte-parole de rappeler que c’est l’Union européenne qui souhaite que l’accord sur la fiscalité de l’épargne puisse entrer en vigueur début 2005. Alors que du coté suisse, la question du temps n’est pas aussi cruciale.

Au contraire, c’est plutôt la teneur et la qualité de l’accord global qui semble monopoliser l’attention des négociateurs.

swissinfo, Jean-Didier Revoin

– L’UE veut taxer les réexportations suisses dès le premier mars.

– Elle change de comportement en réinterprétant l’accord de libre-change conclu en 1972 entre l’UE et l’AELE sans en avertir officiellement les autorités helvétiques.

– Ce changement d’attitude intervient alors que les négociations bilatérales entre la Suisse et l’UE sont dans une phase cruciale.

– Les autorités helvétiques se refusent à relier les deux événements entre eux et attendent de voir les motivations de la décision de l’UE avant de réagir énergiquement.

– Pour l’instant, elles font tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter que la mesure entre en vigueur le premier mars.

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