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La biodiversité est menacée, il faut réagir

La biodiversité n'est pas un luxe (ici l'étang de la Gruère, dans le jura). picswiss.ch

Le nombre d'espèces d'animaux et de plantes ne cesse de diminuer en Suisse, entre autres à cause de l'intensification de l'agriculture et de la prolifération des constructions.

Des scientifiques demandent aux autorités d’élaborer une stratégie nationale de sauvegarde de la biodiversité.

Les scientifiques sont inquiets. Dix ans après la signature de la Convention sur la biodiversité par la Suisse, le nombre d’espèces d’animaux et de plantes ne cesse de diminuer. Une étude vient de le démontrer.

Exemple parmi d’autres: sur les 20 espèces de batraciens que compte la Suisse, seule la grenouille rousse n’est pas menacée.

Les scientifiques signalent quatorze causes de diminution de la biodiversité. En font partie l’intensification de l’agriculture, le morcellement des milieux naturels, «l’invasion du paysage» par les constructions, l’évolution de l’exploitation forestière, le changement climatique et la prolifération d’espèces animales et végétales exogènes.

Suite à trois ans de travail, les chercheurs appellent la Confédération à remplir les engagements auxquels elle s’est liée en signant ladite Convention.

Non que rien n’ait été fait, assurent-t-ils, mais les mesures actuelles n’ont qu’une efficacité très limitée.

Les «listes rouges» saluées

Les scientifiques accordent un satisfecit à la Suisse pour sa surveillance des espèces menacées. Et saluent notamment l’établissement de «listes rouges» par l’Office fédéral de l’environnement (OFEFP).

«Nous savons ce qui existe et comment cela disparaît, mais c’est le silence radio sur les mesures à prendre», déplore Werner Suter.

Et le biologiste de rappeler qu’en terme de biodiversité, la Suisse dispose d’autant de législations qu’il y a de cantons.

Pour les auteurs de l’étude, il est urgent d’élaborer une stratégie et un plan d’action nationaux. «Contrairement à des pays comme la Namibie, la Suisse ne s’est dotée d’aucune stratégie d’action», s’insurge Werner Suter.

Autre obstacle à la sauvegarde des espèces, le flou dans la répartition des tâches entre les offices fédéraux.

Le professeur Bruno Baur, président du Forum biodiversité, brandit l’exemple de la protection des lisières des forêts: relève t-elle de l’Office fédéral de l’environnement ou de celui de l’agriculture? Les autorités n’ont toujours pas tranché.

En faveur d’un groupe de travail

C’est pourquoi les auteurs de l’étude demandent à la Confédération de créer un groupe de travail ad hoc qui formule objectifs et mesures à prendre.

Pour obtenir un consensus, ce groupe devrait intégrer tous les acteurs concernés, de l’économie aux paysans et aux chasseurs, en passant par les scientifiques, les défenseurs de l’environnement, le tourisme et les transports.

Les scientifiques vont plus loin. Ils proposent la création de vastes régions protégées où l’homme cohabiterait avec la nature, plutôt que des parcs naturels, peu adaptés à l’exiguïté de la Suisse.

«Il est temps de réapprendre à coordonner habitat et écosystème», insiste le professeur Peter Baccini, président de l’Académie suisse des sciences naturelles. Pour lui, les temps sont révolus où l’on séparait à tout prix la nature de la présence et de l’activité humaine.

L’intérêt de la biodiversité réside dans les relations entre les êtres vivants et inanimés, explique de son côté Claude Auroi, professeur à l’Université de Genève.

Qu’un élément disparaisse et c’est tout l’équilibre qui est remis en cause. «C’est pourquoi nous devons protéger des pans entiers de la nature, et pas seulement réintroduire le gypaète barbu», avertit le professeur.

La pollinisation au pinceau

Pour illustrer l’urgence de la situation, Bruno Baur dépeint un monde duquel les abeilles et autres insectes auraient disparu. «Il faudrait faire toute la pollinisation au pinceau, c’est mission impossible!»

Selon les auteurs de l’étude, les scientifiques sont unanimes à considérer le maintien de la biodiversité comme une priorité. Mais rares sont ceux qui, dans le grand public, sont conscients qu’il s’agit d’une question de survie, déplore Werner Suter.

Premier pas vers une action politique, la député Kathy Riklin annonce la constitution prochaine d’un groupe parlementaire interpartis pour la biodiversité.

swissinfo et les agences

La Suisse est l’un des pays d’Europe où la biodiversité est la plus riche.

Mais durant les 150 dernières années, 224 espèces de plantes et d’animaux se sont éteintes ou ont disparu du pays.

La Suisse a signé la convention de l’Onu sur la biodiversité en 1994.

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