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La campagne d’un député brésilien contre la biopiraterie

De passage en Suisse, Fernando Gabeira dénonce le pillage des ressources naturelles de l'Amazonie. Il rappelle le cas Novartis dont le projet de recherches scientifiques a récemment suscité une vive polémique au Brésil.

L’étude des ressources biologiques de la planète est devenue un enjeu majeur pour l’industrie pharmaceutique. En effet, la chimie de synthèse se heurte à des limites. Les chercheurs se tournent vers la nature pour tenter de découvrir de nouvelles combinaisons pharmaceutiques.

En outre, afin de réduire la part de hasard inhérente à cette recherche, les scientifiques puisent désormais dans le savoir ancestral des guérisseurs.

Dans cette course à l’or vert, l’Amazonie fait figure de réserve inépuisable. La région est riche en matières premières, mais également en connaissances ancestrales. Deux motifs suffisants pour pousser les multinationales à s’implanter dans la région.

Novartis a fait le pas, au Brésil en l’occurrence. Pour faciliter ses recherches, la multinationale suisse s’est notamment associée à une organisation non gouvernementale, «Biomazônia». Mais la stratégie n’a pas porté ses fruits.

L’opinion publique et des députés brésiliens de tous bords sont montés au créneau, s’insurgeant contre le pillage de la biodiversité des territoires amazoniens.

«Les contrats établis par Novartis avec les entreprises locales ne tenaient nullement compte des droits de propriété intellectuelle qui doivent être accordés aux populations indigènes, affirme Fernando Gabeira, député écologiste brésilien invité par des parlementaires suisses ce mardi à Berne. La convention sur la biodiversité, signée au sommet de Rio en 1992, prévoit pourtant de telles clauses.»

Finalement, sous la pression, le gouvernement brésilien a exigé la révision d’un contrat qui avait été négocié dans la plus grande discrétion.

Rendue publique en août, la nouvelle version de ce contrat prévoit que l’envoi en Suisse de souches extraites de l’Amazonie ne soit autorisé qu’après un examen préalable effectué par des laboratoires brésiliens. La répartition d’éventuels bénéfices devrait également être stipulée au cas par cas.

A Bâle, le groupe confirme l’existence d’un projet de collaboration entre Novartis Brésil et l’association para-gouvernementale «Biomazônia», sans pour autant donner plus de détails sur ses démêlés avec les autorités brésiliennes.

«Novartis n’a rien fait de vraiment illégal, précise Fernando Gabeira. La multinationale suisse a simplement tenté, en toute connaissance de cause, de s’infiltrer dans le vide juridique qui régnait au Brésil.»

Le gouvernement brésilien s’est empressé d’édicter des mesures provisoires. Une manière de protéger les ressources biologiques du pays, en attendant l’entrée en vigueur d’une loi.

La législation en préparation vise notamment à défendre le droit des populations natives. En clair, il s’agit de rétribuer ceux qui détiennent le savoir et d’éviter que l’industrie pharmaceutique ne s’approprie gratuitement des connaissances qui débouchent généralement sur la création de nouveaux médicaments.

Selon Fernando Gabeira, la loi devrait également imposer aux entreprises pharmaceutiques d’impliquer les scientifiques brésiliens et, par-là même, de développer une partie de leur recherches dans le pays.

Plus respectueux des normes en vigueur en matière de protection des ressources biologiques que le groupe helvétique Novartis, l’anglais Glaxo-Welcom a su, lui, comment obtenir les faveurs des Brésiliens. D’ailleurs, il travaille déjà sur le terrain amazonien.

Vanda Janka

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