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La collaboration universitaire lémanique fait tache d’huile

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L'Uni de Neuchâtel rejoint la coordination déjà existante entre Genève et Lausanne. Mais rapprochement ne veut pas dire fusion.

Vendredi, les recteurs des Universités de Genève, Lausanne et Neuchâtel ont choisi Yverdon-les-Bains pour annoncer le renforcement de leur coopération. Avec pour ambition, disent-ils, de promouvoir «une meilleure qualité de l’enseignement et une recherche scientifique plus innovatrice et compétitive».

Pour autant, les trois Hautes Écoles ne renoncent pas du tout à leurs identités respectives. Mais leur propos dépasse la déclaration d’intention. Des objectifs sont, d’ores et déjà, fixés pour l’horizon 2004.

Il est question notamment de développement d’écoles doctorales communes, de concertation dans les processus de nomination des professeurs et d’évaluation des disciplines communes en vue de leur coordination. Bref, de répartition des compétences.

Petits pas sur terrain mouvant

Voilà donc un chapitre supplémentaire à inscrire dans le grand livre des projets de collaboration dans l’enseignement supérieur. Dans un pays où les fiertés et les susceptibilités cantonales sont de règle, s’aventurer sur ce terrain mouvant suppose bien des tâtonnements et autres hésitations.

souvenez-vous, en 1993 déjà, Berne, Neuchâtel et Fribourg lançaient au cœur du pays un premier pôle universitaire bilingue baptisé «BeNeFri». Trois ans plus tard, Genève et Lausanne décidaient d’un rapprochement concerté, auquel devait se joindre plus tard l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) autour d’un concept «science, vie, société».

L’Uni de Neuchâtel – qui rejoint la triangulaire lémanique – se retrouve donc aujourd’hui au carrefour de deux pôles de compétences. Son recteur explique qu’elle ne se détourne pas de la collaboration développée avec Berne et Fribourg, mais que cette première alliance connaît des limites culturelles. Contrairement à ses partenaires, Neuchâtel n’est en effet pas bilingue.

Charles Kleiber salue cette nouvelle collaboration. «Tout cela va dans le bon sens, déclare le Secrétaire d’État à la science et à la recherche. On assiste là à la création d’ensembles universitaires coordonnés, plus puissants, mieux capables de survivre dans le contexte de la concurrence internationale.»

Généreuses utopies et basses contingences

De son côté, la Confédération ne chôme pas non plus. L’automne dernier, elle a mis un projet d’article constitutionnel sur les Hautes écoles en consultation. En clair, pour le gouvernement, il est temps de définir une authentique politique universitaire de portée nationale.

Pas facile. En Suisse romande, pour rester dans ce coin de terre qui ne compte pas moins de quatre universités, il y a ceux qui prônent purement et simplement la fusion. Autrement dit une seule Haute École répartie dans différents campus.

Et il y a ceux qui rejettent le principe d’une éventuelle «romandisation du savoir». Ou qui se méfient des restructurations administratives sans réels impacts positifs sur la qualité de l’enseignement et de la recherche.

En réalité, le dossier reste désespérément complexe. En effet, d’un canton à l’autre, d’énormes disparités subsistent en termes de compétences et de traditions, de statuts et de procédures, de calendriers et de budgets.

Des ingalités qui renvoient toute idée de fusion aux oubliettes de l’utopie. Et qui transforment les projets de collaboration en travaux de Sisyphe.

Un besoin d’universités nombreuses

Mais collaborer reste un impératif incontournable. «Les performances d’ensemble des universités, explique Charles Kleiber, dépendent de leur coopération. Si elles coopèrent bien, elles sont puissantes. Et si elles restent sur leurs fragmentations de ces dernières années, c’est une productivité scientifique et culturelle qui est perdue.»

Fusions, réseaux, alliances. Voilà qui promet encore de beaux débats, alimentés ici et là par toutes sortes d’expériences et de recherches plus ou moins cohérentes. Mais le Secrétaire d’État est persuadé que «toutes les hautes écoles de Suisse ont une place à la mesure de leurs performances.»

Sans oublier que la Suisse a également besoin d’universités nombreuses, non seulement pour être à la hauteur du potentiel de ses voisins, mais aussi pour exprimer la diversité de ses cultures et de ses régions.

Le processus en cours est prometteur, estime Charles Kleiber, il faut l’aider. C’est du ressort de la Confédération. Et, par conséquent, de son propre ressort.

Bernard Weissbrodt

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