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La curieuse attirance des hommes d’affaires russes pour la Suisse

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Alors que la Confédération ne cesse de renforcer sa lutte contre la grande criminalité, des groupes soupçonnés de liens avec la mafia continuent d'installer des sociétés sur son territoire. Les lois contre le blanchiment sont-elles à ce point inefficaces?

Quand Mikhaïl Jivilo, magnat russe de l’aluminium, attaque ses adversaires, il ne prend guère de précautions. Dans un document d’une centaine de pages, et fort de 590 points, adressé à la justice américaine, il évoque une «organisation internationale russo-américaine du crime organisé, dirigée par Mikhaïl Tchernoï». Et parmi les personnalités mises en cause, il cite J.K., un Suisse qui gère la société Alpro à Morges.

Quatre mois de prison

Toujours selon cette plainte, Alpro appartiendrait à Sibersky Aluminium, en Russie, elle-même actionnaire de Rousskii aluminium. Que leur reproche Mikhaïl Jivilo? De l’avoir dépossédé de son usine d’aluminium de Novokouznetski (la quatrième du pays) et du combinat métallurgique de Kouznetski.

Mikhaïl Jivilo, qui réside actuellement en France après avoir purgé quatre mois de prison à la demande de la justice russe, a également choisi la Suisse pour gérer ses entreprises.

Il s’agit de Basel Metal Trading SA, une société installée à Fribourg, administrée par Gaston Baudet, ancien président du HC Gottéron, comme l’avait révélé en février dernier le quotidien La Liberté.

Une base à Genève

Il faut savoir que le troisième géant de l’aluminium russe, Trans World Metal, dispose d’une base à Genève. Bref, la Suisse reste la base logistique de ces hommes d’affaires aux méthodes plutôt musclées.

«Je ne cesse de voir passer des sommes considérables. Pourquoi la Suisse reste-t-elle aussi attrayante pour ce genre de personnages? Sans doute en raison de nos compétences en matière bancaire mais aussi de trading», commente Laurent Kasper-Ansermet, juge d’instruction à Genève, habitué aux affaires russes.

Son enquête sur les prêts détournés du FMI à la Russie, l’a conduit à perquisitionner à Fribourg et à Montreux.

En d’autres termes, si ces groupes se tirent des coups de fusil en Russie, dans la Confédération, ils gèrent au mieux leurs intérêts. Et même si la justice parvient de temps en temps à bloquer quelques millions, il ne s’agit vraisemblablement que de petites monnaies pour des groupes propriétaires de 16% de la production mondiale d’aluminium.

Les dernières affaires russes, mettant en cause Pavel Borodine à Genève et au Tessin, et Boris Berezovski à Lausanne, ont montré qu’il était illusoire de poursuivre ces personnages pour corruption et blanchiment alors que leur propre pays, la Russie, continue à fermer les yeux sur leurs coupables activités.

Ian Hamel

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