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La justice genevoise s’explique sur l’affaire Salinas

Pas de commentaire, répond la justice genevoise. Keystone Archive

Juge d'instruction fédéral à partir de lundi, Paul Perraudin réagit à la lettre incendiaire que vient de lui envoyer Raul Salinas.

Chargé depuis plus d’une décennie des dossiers complexes au tribunal de Genève, Paul Perraudin, 50 ans, s’est rendu l’été dernier au Mexique, inculpant Raul Salinas de Gortari, frère de l’ancien président, de «blanchiment»

swissinfo: Comment réagissez-vous à la lecture de la lettre de Raul Salinas critiquant violemment vos méthodes d’investigation?

Paul Perraudin: Cette lettre remonte au 10 mai dernier. Je n’ai aucun commentaire à faire. Monsieur Salinas peut bien déclarer ce qu’il veut. En revanche, lorsque je l’ai interrogé au Mexique, il a refusé de me répondre.

Comment justifiait-il son mutisme?

P.P.: Il refusait de parler à l’autorité suisse par crainte que ses propos puissent être utilisés contre lui par la justice mexicaine. J’ai demandé à ce qu’il me soit «prêté» en Suisse, mais cela n’a pas été possible. Je souhaitais le confronter à certains témoins.

Pourquoi avez-vous demandé à la justice suisse de déléguer la procédure à des magistrats mexicains?

P.P.: Mon enquête m’a conduit à penser que les 130 millions de dollars appartenant à Raul Salinas et séquestrés en Suisse avaient des liens avec un trafic de drogue.

En revanche, les autorités mexicaines évoquent des détournements de fonds publics. Je ne peux donc pas continuer mon enquête. J’ai demandé que cette procédure soit déléguée à la justice mexicaine. C’est l’Office fédéral de la justice qui doit décider.

Depuis le début de cette enquête en 1995, on évoque un trafic de drogue. Pourquoi les Mexicains parlent-ils à présent le pillage des caisses de l’Etat?

P.P.: Raul Salinas se serait enrichi en favorisant le passage de la cocaïne colombienne sur le territoire mexicain. Il devait bénéficier de la complicité de certaines institutions du pays, comme les douanes ou la police. Il est possible que les autorités mexicaines ne souhaitent pas les mettre en cause.

Est-il exact qu’une personne qui devait témoigner à Genève a été retrouvée découpée en petits morceaux dans des valises à l’aéroport de Mexico?

P.P.: Un témoin a été très vraisemblablement tué alors qu’il allait prendre l’avion à Mexico pour venir en Suisse. Conséquence logique, les autres témoins ont refusé de parler.

En accréditant la thèse du détournement de fonds publics, les Mexicains ne cherchent-ils pas non plus à récupérer les 130 millions de dollars séquestrés en Suisse?

P.P.: S’il s’agit de détournements de fonds, le Mexique peut effectivement demander que les sommes lui soient restituées. En ce qui concerne l’argent provenant du trafic de drogue, la somme donne lieu à un partage entre le Mexique et la Suisse.

swissinfo/Ian Hamel

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