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La parole passe maintenant au Parlement

L'intégration des invalides au monde du travail est l'un des points centraux de la révision. Keystone

Sensibles au péril financier, les Suisses ont facilement accepté la révision de l'assurance invalidité. Les cantons latins ont cependant montré davantage de scepticisme face à la solution proposée.

Mais cette révision ne suffira pas à assainir l’état financier catastrophique de l’AI. Le Parlement devra maintenant trouver de nouvelles sources de financement.

Beaucoup de votations précédentes avaient déjà montré que les Suisses sont très sensibles aux questions financières. La révision de l’assurance invalidité qui leur était proposée dimanche n’a pas fait exception à la règle.

En effet, c’était essentiellement de gros sous dont il était question dans ce vote. La révision avait pour but de réduire le déficit de l’assurance en misant sur deux axes: la réinsertion des invalides dans le monde du travail et la diminution de certaines prestations.

Cantons latins plus timides

Avec un score de 59% de «oui», les partisans de la révision ont réalisé un bon score, même s’il n’a rien ni d’exceptionnel ni de surprenant. En effet, cette révision était soutenue par la droite et combattue par la gauche. Or, le résultat de dimanche correspond «grosso modo» à l’équilibre des forces sur l’échiquier politique suisse.

Mais les partisans ont cependant peiné à convaincre dans les cantons latins. Les quatre seuls cantons (Genève, Fribourg, Neuchâtel et Jura) à avoir refusé la révision sont romands. Et dans les autres cantons latins, l’acceptation ne s’est faite que du bout des lèvres.

En Suisse alémanique en revanche, tous les cantons ont accepté la révision. Et à l’exception de Bâle-Ville et de Schaffhouse, le taux de «oui» a partout dépassé la barre des 56%, avec un record (presque 80%) à Appenzell Rhodes-Intérieures.

Ces différences ne sont pas surprenantes. Tout d’abord, la Suisse latine a traditionnellement davantage tendance à soutenir la vision d’un Etat social que la Suisse alémanique, plus libérale en la matière.

Par ailleurs, au cours des dernières années, la Suisse latine a été davantage touchée par le chômage et une mauvaise conjoncture économique. Or ce genre de situation n’est pas sans conséquence sur les nombres des rentes invalidité. Il est en effet courant que bon nombre de personnes ne supportant plus la dureté du monde du travail se retrouvent à la charge de l’assurance invalidité, avant tout en raison de problèmes psychiques.

La différence entre Suisse latine et Suisse alémanique n’est toutefois pas le seul argument qu’on puisse évoquer. L’analyse des résultats montre également que les zones urbaines ont été plus réticentes à accepter la révision que les zones très rurales.

Peu d’intérêt des électeurs

Force est de constater que ce scrutin n’a pas véritablement passionné les foules. Le taux de participation n’a atteint que 36,2%, l’un des plus faible de ces dernières années.

Pourtant, le débat politique qui a précédé le vote a été émotionnel et sensible, ce qui aurait pu conduire un certain nombre de citoyens sur le chemin des urnes. C’est ainsi que, par exemple, les opposants ont réussi à faire sensation avec une affiche représentant certains membres du gouvernement sous l’aspect de handicapés.

Mais au final, les Suisses se sont largement abstenus. La raison se trouve peut-être dans le manque d’arguments décisifs. La révision constituait-elle une attaque en règle contre les plus faibles ou une mesure nécessaire pour sauvegarder une assurance sociale indispensable?

Face à ce dilemme, beaucoup de citoyen n’ont pas réussi à trancher. D’ailleurs, dans son dernier sondage, l’institut de recherches gfs.berne indiquait début juin que le nombre d’indécis atteignait la part assez considérable de 22%. Il est probable que n’arrivant pas à se décider, bon nombre d’entre eux ont boudé le scrutin.

Et maintenant au travail

La révision acceptée par le peuple ne résout par le problème financier de l’assurance-invalidité. Les mesures prévues permettent en effet de n’économiser «que» 500 millions de francs par an dans une assurance dont le déficit ne cesse d’augmenter et dont l’ardoise compte déjà un solde négatif de quelque 9 milliards de francs.

De nouvelles sources de financement sont nécessaires pour assurer la pérennité de cette assurance. La gauche est acquise de longue date à l’idée d’allouer de nouvelles ressources à l’AI. Quant à la droite, elle estimait qu’il fallait d’abord tenter de réduire les coûts avant de penser à de nouvelles ressources. Avec le vote de dimanche, c’est chose faite.

Reste donc maintenant aux parlementaires à trouver des solutions pour dégager de nouvelles recettes. L’idée actuellement la plus répandue consiste à augmenter temporairement le taux de TVA (taxe sur la valeur ajoutée) pour renflouer l’AI.

Mais bien des débats devront avoir lieu avant que le Parlement ne se mette d’accord sur une solution. Pour mémoire, on rappellera que le peuple avait déjà refusé un relèvement de la TVA en faveur de l’AI.

Pour le monde politique, le travail ne fait donc que commencer.

swissinfo, Olivier Pauchard

La 5ème révision de l’Assurance invalidité a été acceptée par 59,1% des votants.

Le «oui» le plus net se trouve à Appenzell Rhode-Intérieures avec 79,9%.

Le «oui» le plus timide se trouve au Jura avec 45,4%.
Taux de participation: 35,8%

On dénombrait 300’000 rentes de l’assurance invalidité en janvier 2007.

Ce chiffre correspond à presque 5% de la population.

En 1960, les rentes ne concernaient que 0,6% de la population.

L’AI a enregistré un déficit de 1,6 milliard de francs en 2006.
Son déficit total est supérieur à 9 milliards de francs.

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