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La quête fructueuse de l’or canadien

«Bye Bye» Vancouver 2010: des Jeux réussis qui ont souri au pays d'accueil, vainqueur du classement des nations. Keystone

Jamais dans l’histoire des Jeux olympiques d’hiver, l’hymne helvétique n’avait résonné si souvent. Les athlètes suisses sont revenus de Vancouver avec six médailles d’or autour du cou. Si la qualité était au rendez-vous, l’objectif quantitatif n’a lui pas été atteint. Bilan.

Pour Jacques Rogge, président du comité international olympique, l’athlète marquant de ces Jeux de Vancouver 2010 aura sans aucun doute été Simon Ammann. Huit ans après son doublé de Salt Lake City, le sorcier volant du Toggenburg, qui a entre-temps changé de lunettes, a littéralement survolé les deux épreuves de saut à skis sur le tremplin de Whistler Mountain.

Avec deux nouvelles médailles d’or en poche, Simon Ammann rentre au pays doté du statut d’athlète suisse le plus titré de l’histoire des Jeux. Le petit sauteur Saint-Gallois a laissé une empreinte de géant – et surtout sur la durée – dans ce sport qu’il domine avec une aisance et une grâce presque insolentes.

En remportant la première épreuve de ces Jeux, Simon Ammann a également tracé dans la neige canadienne la voie de la réussite pour l’équipe de Suisse. Car, le succès peut, semble-t-il, avoir des vertus contagieuses.

«Pourquoi pas nous?»

Lorsque Didier Défago a assisté depuis la tribune au sacre de Simon Ammann, il y a puisé une inspiration positive.«Quand on l’a vu gagner, ça nous a donné des frissons. Nous nous sommes dit: pourquoi pas nous?», dira le Valaisan au terme de sa victoire en descente, épreuve-reine des compétitions de ski alpin.

Et puis Dario Cologna, Michael Schmid et Carlo Janka ont décidé à leur tour de participer à cette moisson d’or au Canada. Cologna et Janka ont confirmé tous les espoirs que la Suisse avait placé en eux. Talents imperturbables, les deux jeunes Grisons ont dès leurs premiers Jeux fait frissonner les vallées les plus reculées de leur canton natal, à défaut d’avoir eux-mêmes vibré – du moins en apparence – à leurs exploits.

Quant à Michael Schmid – Big Mike pour les potes – il a une nouvelle fois prouvé que la Suisse était une nation qui engendrait autre chose que des champions de ski alpin et de bobsleigh et savait se profiler sur les nouvelles disciplines olympiques. Premier champion olympique de skicross, le colosse de l’Oberland, constructeur de routes l’été, kamikaze des neiges l’hiver, est apparu come une sorte de relique des valeurs de l’olympisme.

La qualité, pas la quantité

Au Canada, la Suisse a donc fait sauter le record de breloques en or remporté à Sapporo en 1972. «On peut évidemment se réjouir de cette performance», souligne Adolf Ogi, ancien ministre des Sports qui faisait à l’époque partie de l’encadrement de la Fédération suisse de ski. «Mais il ne faut pas oublier qu’entre-temps, le nombre de disciplines a augmenté de près de 50%. Le skicross, le snowboard, le ski acrobatique, trois épreuves en combiné-nordique et les courses de sprint en ski de fond ont notamment été ajoutés au programme. La comparaison est donc impossible», tempère-t-il.

Si la qualité était au rendez-vous, la quantité un peu moins. En 1988, à Calgary, les athlètes suisses avaient ramené un record de 15 médailles. Il y a quatre ans, à Turin, c’était juste une de moins. Cette année, le cours de l’argent (0) et du bronze (3) était à la baisse, le total de médailles engrangées atteignant finalement 9, alors que l’objectif était placé entre 10 et 12.

Gian Gilli, chef de mission suisse aux Jeux, dresse un bilan en demi-teinte. «D’un côté, je suis très satisfait. Six médailles d’or, c’est simplement historique. Mais il nous manque quelques médailles dans des disciplines comme le bobsleigh, le patinage, le ski alpin dames ou le ski acrobatique. Le potentiel était là, comme le prouvent les 28 places dans le top-10. Nous devons encore améliorer l’efficience et mieux exploiter nos chances».

Stéphane Lambiel poissard

Car si les Jeux ont engendré leur lot de gagnants, ils ont également fait des déçus en masse. Le plus malheureux est irrémédiablement celui qui échoue au pied du podium, à cette 4e place si ingrate.

Dans cette catégorie, Stéphane Lambiel peut endosser le costume du roi des infortunés. Bravant la douleur à coups d’anti-inflammatoires, le patineur valaisan a raté le pari d’un retour annoncé avec fracas. Pour un demi-point.

A 36 ans, Didier Cuche, colosse des neiges, est également rentré bredouille de ses derniers Jeux. Un brin de malchance, trop de pression, des reports à gogo et une volonté de trop bien faire ont eu raison des ambitions du skieur neuchâtelois.

Les dames en retrait

Au féminin, la Suisse s’est montrée moins conquérante. En l’absence de Lara Gut, les skieuses suisses n’ont pas réussi à dompter la – trop ? – difficile pente de Whistler. Fabienne Suter, 4e du géant, a été la meilleure d’entre elles.

Alors qu’à Turin, les championnes suisses (Daniela Meuli, Evelyne Leu, Maya Pedersen, Tanja Frieden) avaient détrôné leurs homologues masculins, la seule médaille féminine outre-Atlantique a été l’œuvre de la Chaux-de-Fonnières Olivia Nobs, 3e du boardercross. Les curleuses suisses ont quant à elle échoué à la 4e place alors qu’elles avaient ramené des breloques de lors de leurs deux dernières expéditions olympiques.

«Je n’ai aucune idée si c’est dû au hasard ou si le sport féminin a été quelque peu négligé ces dernières années. Il faudra analyser ce fait avec les fédérations», explique Gian Gilli.

Les bobeurs bredouilles

Le curling a été la seule discipline collective pourvoyeuse de médailles cette année, grâce à la victoire de Ralph Stöckli et de ses coéquipiers lors de la petite finale. En bobsleigh, la Suisse rentre bredouille pour la première fois depuis les JO d’Innsbruck en 1964. Le terrifiant tube gelé de Whistler a eu raison de deux des trois équipages en bob à deux dès l’entraînement alors qu’en bob à quatre, Ivo Rüegg et ses coéquipiers n’ont terminé qu’au 6e rang.

En hockey sur glace enfin, malgré un quart de finale héroïque face aux Etats-Unis (0-2), la sélection de Ralph Krueger, dont c’était la dernière apparition derrière le banc après 12 ans de bons et loyaux services, a une nouvelle fois échoué avant le stade des demi-finales.

Rendez-vous est désormais pris dans quatre ans à Sotchi, en Russie, qui voit la barre en matière d’organisation et d’ambiance placée très haute après ces joutes qualifiées unanimement de réussies. Simon Ammann, peut-être, Didier Défago, Carlo Janka, Mike Schmid et Dario Cologna, sauf incident, seront au rendez-vous.

Samuel Jaberg, swissinfo.ch
(Collaboration: Christian Raaflaub)

1.Canada 14 (or) / 7 (argent) / 5 (bronze) / 26 (total)

2.Allemagne 10 / 13 / 7 / 30
3.Etats-Unis 9 / 15 / 13 / 37
4.Norvège 9 / 8 / 6 / 23
5.Corée du Sud 6 / 6 / 2 / 14
6.Suisse 6 / 0 / 3 / 9
7.Chine 5 / 2 / 4 / 11
.Suède 5 / 2 / 4 / 11
9.Autriche 4 / 6 / 6 / 16
10.Pays-Bas 4 / 1 / 3 / 8

Or:
Didier Défago, ski alpin, descente
Carlo Janka, ski alpin, géant
Simon Ammann (2), saut à skis, petit et grand tremplin
Dario Cologna, ski de fond, 15 km
Michael Schmid, skicross

Bronze:
Silvan Zurbriggen, ski alpin, super-combiné
Olivia Nobs, boardercross
Ralph Stöckli & coéquipiers, curling

Clôture. Les Jeux olympiques de Vancouver ont été officiellement clos dans la nuit de lundi à mardi par le président du Comité international olympique (CIO). «Ce furent des Jeux excellents et très amicaux!», a souligné Jacques Rogge lors de la cérémonie de clôture, avant de transmettre le drapeau olympique au maire de Sotchi, la ville-hôte des prochaines Jeux, en 2014.

Humour. La fête a débuté sur une note d’autodérision: un clown déguisé en mécano est venu tirer le 4e bras de la vasque, qui n’avait pas fonctionné pendant la cérémonie d’ouverture, pour faire briller la flamme olympique au centre de la scène. Les Canadiens ont ensuite fait honneur à leur sens de l’humour et à leur autodérision en se moquant de leurs stéréotypes avec un spectacle rythmé et sympathique.

Fierté. Pour la première fois de son histoire, le Canada termine en tête du classement des nations avec 14 médailles d’or récoltées durant la quinzaine. Les hockeyeurs canadiens ont terminé ces Jeux en apothéose en remportant le titre olympique dimanche soir aux dépens des Etats-Unis (3-2 après prolongation).

Point noir. Lors de la cérémonie de clôture, un hommage a une nouvelle fois été rendu au lugeur géorgien Nodar Kumaritashvili, décédé au tout début des joutes. Jacques Rogge a assuré que la famille olympique garderait «à jamais» le souvenir de ce jeune homme et de son «rêve olympique brisé».

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