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La Suisse n’échappe pas à l’esclavage moderne

L’immigration clandestine contribue à favoriser l’expansion de l’esclavage moderne. Keystone Archive

Le travail forcé et le trafic d'êtres humains n'est pas un phénomène en voie de disparition. C'est ce que constate l'OIT dans un rapport qu'elle vient de publier. L'esclavage moderne touche notamment l'industrie de sexe et le travail domestique. Et la Suisse n'est pas épargnée par le phénomène.

Ainsi, à la fin de l’année dernière, le Tribunal cantonal de Zurich a condamné un ancien gérant de maison de passe à neuf ans et demi de prison. L’homme a été reconnu coupable de viol et d’incitation à la traite des êtres humains. En clair, il exploitait des prostituées camerounaises qu’il faisait entrer clandestinement en Suisse.

Autre exemple: le procès d’un couple portugais est actuellement en suspens devant le Tribunal correctionnel de Morges. Ce couple avait littéralement réduit sa jeune fille au pair à l’esclavage, durant plus d’une année. Frappée, violée, séquestrée, condamnée à travailler du matin au soir, l’adolescente de 16 ans avait fini par s’enfuir.

Une autre affaire a également remis sur le devant de la scène suisse la problématique de l’esclavage moderne. En décembre 2000, une domestique philippine tombait du 5ème étage alors qu’elle tentait d’échapper à son employeur, un diplomate également philippin.

Après enquête, il s’est avéré que la jeune femme – qui travaillait 7 jours sur 7 depuis plus de deux ans – n’avait reçu aucun salaire. Hormis 1900 dollars envoyés à sa mère.

Cette liste n’est pas exhaustive. Elle illustre, clairement, que les aspects les plus sordides de l’exploitation humaine ne sont pas l’apanage des pays pauvres. Bien au contraire.

Ce sont les nations riches qui bénéficient le plus de cette nouvelle main-d’œuvre à bon marché. Et, bien qu’elle ne soit pas dans le peloton de tête des principaux pays montrés du doigt, la Suisse n’échappe pas au phénomène.

«Qu’ils représentent un bassin d’envoi, une contrée de transit ou d’accueil, tous les pays sont concernés par cette forme d’esclavage moderne», affirme John Doohan.

Selon le porte-parole de l’Organisation internationale du travail (OIT) «il y a de plus en plus de gens qui sont condamnés à quitter leur pays pour des raisons économiques ou politiques. Cela représente une importante main-d’œuvre illicite et facilement exploitable».

L’immigration clandestine contribue à favoriser l’expansion de l’esclavage moderne. Un trafic entre pays pauvres et pays industrialisés toujours mieux organisé. Selon l’OIT, ce «commerce» est désormais orchestré par de véritables bandes criminelles actives au niveau international.

Ce sont ces même bandes qui contrôlent l’industrie du sexe. Un secteur qui a connu une véritable explosion depuis l’éclatement de l’ex-Union soviétique. Une fois de plus, la pauvreté est la clef du problème.

«Les pays de l’Europe de l’Est ont amorcé une dure transition économique, rappelle John Doohan. Pour faire face à l’érosion de leur niveau de vie les habitants de ces régions sont prêts à tout».

Attirés par les richesses de l’Ouest, les Balkans mais aussi l’Europe orientale n’hésitent donc pas à organiser de véritables filières du sexe. Une démarche d’autant plus rentable, que ce type d’industrie connaît une réelle croissance dans les pays occidentaux.

«Hormis la prostitution classique, il y a également tous les réseaux de cabarets, de bars et d’hôtels qui entretiennent ce commerce», confirme John Doohan.

Résultat: plus que jamais, la traite des femmes, mais aussi celle des enfants, est un sujet d’une brûlante actualité. En ce début de 21ème siècle, les êtres les plus fragiles de la société sont encore enlevés, vendus ou simplement trompés pour assouvir les besoins sexuels d’une minorité de la planète.

L’OIT évalue à quelque 50 000 femmes et enfants, victimes de trafic destiné au marché américain.

Vanda Janka

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