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La Suisse repense sa définition du réfugié

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La Suisse n'accorde le statut de réfugié qu'à des personnes mises en danger par les autorités d'un État. Définition que le HCR juge restrictive. A Berne, l'idée fait cependant son chemin vers la reconnaissance des droits de réfugiés également menacés de persécution par des tiers.

Célébrer une «Journée des Réfugiés», comme c’est le cas officiellement ce 16 juin dans l’ensemble de la Suisse, fournit une bonne occasion de faire le point sur les relations entre les autorités fédérales et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés qui – faut-il le rappeler? – a son siège à Genève.

L’une des sujets de satisfaction du HCR par rapport à la Suisse est l’annonce faite récemment par l’Office fédéral des réfugiés (ODR) d’appliquer une définition plus appropriée du réfugié. Notons au passage que la Convention de 1951 ne précise pas la nature des causes qui justifieraient automatiquement le droit à une protection internationale.

En Suisse, comme dans d’autres pays occidentaux, la pratique est ou était que seules des personnes mises en danger par des armées, polices ou autres institutions étatiques pouvaient prétendre bénéficier pleinement du statut de réfugié. Les autres n’avaient droit, le cas échéant, qu’à une admission provisoire.

Cette définition restrictive a quelque chose d’obsolète. Certains pays, voyez la Somalie, n’ont plus de structure étatique. D’autres n’ont pas les moyens ou ne veulent pas protéger des populations à la merci d’entités politiques, ethniques ou autres qui usent de la terreur.

En avril 2000, le HCR avait une fois encore attiré l’attention de la Suisse sur la nécessité de réviser ses définitions et ses pratiques. L’examen de conscience qu’il propose par ailleurs à toute la communauté internationale à l’occasion du 50e anniversaire de la Convention sur les réfugiés donnait un bon prétexte à pareille démarche.

L’Office fédéral des réfugiés, sous la houlette de Jean-Daniel Gerber, affiche aussi une réelle ouverture sur ce genre de problématiques nouvelles. C’est ainsi que, depuis plusieurs mois, un groupe de travail planche sur la possibilité d’accorder pleinement l’asile à des personnes victimes de persécutions menées par des tiers.

La décision formelle n’est pas pour tout de suite. Mais, précise Dominique Boillat, porte-parole de l’ODR, nul n’est besoin pour cela de faire intervenir le Parlement puisqu’il s’agit simplement de modifier une pratique et non une disposition de la loi sur l’asile. Ce changement n’appelle, politiquement parlant, que le «feu vert» gouvernemental.

Voilà le genre d’information très bien reçu du côté du HCR et en particulier à son Bureau de liaison avec la Suisse. L’une de ses collaboratrices, Anna-Maria Deutschlander, y voit un signal positif qui confirme l’actuel bon climat de collaboration.

C’est vrai qu’au fil des crises humanitaires, les rapports entre Berne et le HCR avaient connu des hauts et des bas. Aujourd’hui l’ambiance est plutôt à la coopération franche et constructive. Au siège de l’organisation, on apprécie en tout cas l’engagement concret de la Suisse dans les «consultations globales» en cours depuis le début du printemps.

Le HCR a en effet décidé de marquer le 50e anniversaire de la Convention sur les réfugiés par une vaste réflexion sur la meilleure façon de faire face à des situations d’afflux massifs de réfugiés comme celles que le monde humanitaire a connues ces dernières années.

Une conférence internationale devra se prononcer sur les recommandations qui seront présentées à l’issue des consultations régionales organisées sur chaque continent. Ce grand rendez-vous ministériel, mis conjointement sur pied par le HCR et par la Suisse, est prévu le 12 décembre à Genève.

Bernard Weissbrodt

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