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La Suisse veut encore croire aux vertus du dialogue en Algérie

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Manifestation jeudi au coeur d'Alger, à l'appel du FFS de l'opposant Hocine Aït-Ahmed. Des milliers de personnes ont dénoncé l'attitude des forces de sécurité en Kabylie. Une marche qui avait valeur de test national pour les autorités algériennes. La Suisse, à l'instar d'autres pays occidentaux, veut encore croire aux vertus du dialogue. Même si des parlementaires fédéraux ne cachent plus leur crainte.

Après une douzaine de jours d’émeutes en Kabylie violemment réprimées par les forces de l’ordre algériennes, le calme semble peu à peu revenir. Mais la tension persiste.

Une manifestation d’étudiants est en effet prévue jeudi à Alger et la réaction des forces de l’ordre pourrait être sanglante. C’est en tout cas la crainte d’Hocine Aït-Ahmed qui dénonce la mise en place «d’un dispositif militaro-policier démesuré», laissant présager le pire.

Le président du Front des Forces Socialistes (FFS), qui réside à Lausanne, a donc lancé un appel urgent à une série de personnalités de la communauté internationale comme Kofi Annan, Georges W. Bush ou le président de l’Union européenne, Goeran Persson pour qu’ils fassent pression sur les autorités algériennes.

De surcroît, le malaise social qui tenaille la jeunesse algérienne et qui a motivé en partie les émeutes de Kabylie menace toujours d’embraser l’ensemble de l’Algérie. Une tension qui n’a pas été calmée par le discours du président Abdelaziz Bouteflika lundi soir.

«Le président Bouteflika n’a manifestement pas apporté les réponses voulues», juge ainsi François Lachat, député au Conseil national et membre d’une délégation parlementaire qui s’est rendue en Algérie en octobre 2000.

François Lachat qualifie d’ailleurs de lénifiants les propos optimistes des officiels algériens entendus à cette occasion, à l’aune des événements actuels. Désillusionné, le député compte bien interpeller la délégation parlementaire algérienne qui doit se rendre en Suisse le mois prochain.

Face à la répression de ces derniers jours qui a officiellement fait 41 morts parmi les manifestants et près du double selon la presse algérienne, François Lachat ne peut exprimer que son indignation.

Le député démocrate-chrétien a d’ailleurs pu faire part de son inquiétude avec plusieurs de ses collègues au ministre des Affaires étrangères Joseph Deiss, lors d’une réunion de la commission de politique extérieure du Conseil national lundi dernier.

François Lachat compte renouveler son message au ministre démocrate-chrétien lors d’une réunion de son parti d’ici à la fin de la semaine. Le député devrait en particulier évoquer la question de l’envoi en Algérie d’un rapporteur spécial de l’ONU sur la torture et d’un autre sur les exécutions extrajudiciaires.

Cette demande qui a une nouvelle fois été lancée par l’Union européenne lors de la dernière session de la Commission des droits de l’homme est toujours refusée par les autorités algériennes.

La Suisse, elle, n’a pas jugé utile de s’associer à la demande européenne. «Berne devrait se joindre à cette demande, estime pourtant François Lachat, on ne peut pas se contenter des informations officielles ni de celles des médias. Il faut obtenir la capacité d’aller voir sur place».

La section suisse d’Amnesty international envisage également d’interpeller prochainement Joseph Deiss. «Plus rien ne justifie, aujourd’hui, la répression disproportionnée des forces de l’ordre», martèle l’un de ses membres, Daniel Bolomey.

Face à cette nouvelle crise et à l’inquiétude qu’elle suscite jusqu’en Suisse, Berne n’a pourtant pas officiellement réagi. André von Graffenried, ambassadeur de Suisse à Alger, continue d’œuvrer à l’intensification des relations entre le gouvernement helvétique et le régime algérien: «malgré d’immenses difficultés, l’Algérie va dans la bonne direction».

Frédéric Burnand

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