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La Suisse veut traquer les bactéries résistantes

Certaines bactéries ont appris à s’accommoder des antibiotiques censés les combattre. Keystone Archive

Les bactéries résistent de mieux en mieux aux antibiotiques. Pour mesurer l'ampleur du phénomène, la Suisse lance un programme de surveillance unique au monde.

Initié par le Fonds national de la recherche, ce projet va s’étaler sur trois ans.

Les antibiotiques ne sont plus la panacée pour lutter contre les maladies infectieuses.

Depuis des années déjà, les scientifiques ont remarqué que nombre d’agents pathogènes ont appris à s’accommoder des médicaments censés les combattre.

Des bactéries comme celle de la tuberculose, les pneumocoques ou les staphylocoques dorés ont même développé une résistance contre plusieurs familles d’antibiotiques. La médecine se trouve ainsi gravement prise en défaut.

Surveillance intensive

En juin 1999, le Fonds national suisse lançait son Programme de recherche 49 (PNR 49) «Résistance aux antibiotiques», doté de 12 millions de francs sur cinq ans.

C’est dans ce cadre que se met aujourd’hui en place un ambitieux système de surveillance. Sous la houlette de l’Institut des maladies infectieuses de l’Université de Berne, un quart des quelque 80 laboratoires de microbiologie médicale du pays vont y participer.

Chaque échantillon analysé dans ces laboratoires fera l’objet d’une traque aux bactéries résistantes. Et les résultats seront transmis à une base de données centrale.

Ce système va permettre de surveiller 60% des patients des hôpitaux et 30% de ceux qui sont traités en ambulatoire, un taux jamais atteint jusqu’ici dans aucun pays du monde.

Une question de coûts

L’installation du système durera trois ans. Coût estimé de l’opération: 2,7 millions de francs, entièrement pris en charge par le PNR 49.

«Une surveillance intégrale, portant sur 100% des patients, coûterait beaucoup trop cher», admet Kathrin Mühlemann, épidémiologiste et infectiologue à l’Université de Berne, qui sera chargée de diriger le projet.

Et d’expliquer que les laboratoires choisis l’ont été sur la base d’une évaluation faite au cours des douze derniers mois, afin d’offrir un échantillonnage aussi représentatif que possible de la clientèle des hôpitaux et des médecins suisses.

Cette surveillance ne servira pas uniquement à dresser une carte des résistances aux antibiotiques. Elle sera également utile à la recherche fondamentale, en vue de développer de nouveaux médicaments.

L’exception suisse

Et dans un deuxième temps, les données recueillies en Suisse seront mises en réseau avec les bases de données européennes.

A ce sujet, on a remarqué que la Suisse était jusqu’ici relativement moins touchée que d’autres pays par le problème des résistances aux antibiotiques. La tendance récente est malgré tout à l’augmentation.

Pourquoi? A ce stade, Kathrin Mühlemann ne peut émettre que des hypothèses. «Certains facteurs de risque comme le manque d’hygiène, surtout dans les hôpitaux, sont moins présents dans notre pays qu’ailleurs», avance la chercheuse bernoise.

«On sait également que les antibiotiques sont moins utilisés en Suisse que, par exemple, dans les pays méditerranéens ou en Amérique», poursuit Kathrin Mühlemann.

Une différence qui se retrouve également à l’intérieur même du pays. En effet, la résistance aux antibiotiques est plus fréquente en Suisse romande, où les médecins ont encore tendance à prescrire ce type de médicaments plus couramment que leurs collègues alémaniques.

swissinfo, Marc-André Miserez

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