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La valeur d’une médaille

Bernhard Russi sur la première marche du podium à Sapporo, en 1972. Keystone

Une fois la gloire et l’émotion de la victoire envolées, un titre olympique peut apporter d’autres satisfactions.

L’or d’une médaille peut parfois attirer les sponsors. Mais, en Suisse, c’est plutôt rare. Et encore faut-il choisir la bonne discipline.

Une médaille d’argent n’a que peu de valeur et une de bronze presque aucune. «Ce qui compte, c’est l’or», affirme Martin Blaser, agent actif dans le domaine du sport.

Bien sûr, le coresponsable de Sportart – entreprise suisse qui s’occupe de la commercialisation des sports et des stades – parle d’argent et non de prestige.

Au-delà de l’aspect purement sportif (effort, émotion, joie de la victoire), une médaille recèle aussi parfois un potentiel financier.

Viser le 100m ou le marathon

Avec un bilan que l’on peut qualifier de «suffisant, sans plus», la délégation suisse est revenue d’Athènes avec cinq médailles. Sur le papier, le seul athlète qui peut espérer commercialiser son succès, c’est Marcel Fischer qui a enlevé l’or à l’épée.

Mais ce n’est de loin pas gagné d’avance. En effet, il ne suffit pas de se classer premier, il faut encore choisir la discipline qui rapporte…

«La commercialisation d’une médaille dépend avant tout de la popularité de la discipline et de la couverture que les médias lui réservent», précise Martin Blaser.

Des sports comme l’escrime, le triathlon, le cyclisme sur piste ou le beach volley – disciplines dans lesquelles les Suisses se sont distingués à Athènes – n’intéressent qu’un cercle restreint de passionnés.

D’ailleurs, Martin Blaser est clair: «Si Marcel Fischer me téléphonait, je lui répondrais, en toute honnêteté, qu’avec lui, il n’y a pas moyen de gagner de l’argent.»

«En termes de sponsoring, les médailles qui comptent sont celles du 100 mètres masculin et du marathon», ajoute l’agent.

Marché restreint

Etape fondamentale pour promouvoir le nom d’un vainqueur: la fabrication de l’image. Pour cela, l’athlète doit être prêt à se transformer en marque.

Habituellement, les premiers sponsors à se manifester sont ceux qui financent déjà la fédération du sportif concerné. Grâce à eux, l’athlète peut alors passer des projecteurs du stade à ceux, plus modestes, d’un studio de télévision.

Mais ces reconversions sont rares en Suisse. Le pays est trop petit pour autoriser ce genre de promotion à grande échelle.

«Le marché est limité, constate Martin Blaser. A l’exception du football, du hockey sur glace et du ski, le sport n’est pas très présent dans les médias.»

Aucune superstar

Pourtant, les Helvètes semblent apprécier le sport. Durant les Jeux olympiques, la seconde chaîne de la Télévision suisse romande (TSR2) a doublé son audience.

En revanche, ce qui manque en Suisse, ce sont les «superstars». «Ici, nous n’avons pas cette culture du succès», constate Martin Blaser.

En Italie, par exemple, tous les médaillés d’Athènes seront nommés «Chevaliers de la République».

Le sport individuel se vend mieux

Selon l’expert en marketing de Sportart, un autre facteur inervient: «Un athlète qui pratique un sport individuel se vend mieux qu’un sportif qui joue dans une équipe».

Il est plus facile de construire une image autour d’un protagoniste, d’une seule personnalité.

Cela dit, certaines entreprises misent aussi sur l’esprit d’équipe. «Même si nous sponsorisons aussi le ski et la Formule 1, nous nous concentrons essentiellement sur les sports d’équipe, tels le football», indique ainsi Pia Colombo, porte-parole de Swisscom.

Entrer dans l’histoire

Actuellement, l’athlète suisse doté du plus fort potentiel est le numéro un du tennis mondial Roger Federer, qui est toutefois revenu d’Athènes sans médaille.

«Roger Federer est peut-être l’unique sportif actuel qui a des chances de ne pas être oublié, même une fois sa carrière terminée depuis longtemps», estime Martin Blaser.

Parmi les héros du passé toujours présents dans la mémoire collective, en grande partie grâce à la commercialisation de leur image, Bernhard Russi (médaillé d’or dans la descente de Sapporo en 1972) est probablement l’exemple le plus célèbre.

swissinfo, Luigi Jorio
(Traduction: Alexandra Richard)

5 médailles suisses aux JO d’Athènes 2004.
Une seule médaille d’or: Marcel Fischer, épée.
Une médaille d’argent: Bruno Risi/Franco Marvulli, cyclisme
Trois médailles de bronze: Karin Thürig, cyclisme. Patrick Heuscher/Stefan Kobel, beach volley. Sven Riederer, triathlon

– L’entreprise zurichoise Sportart est le leader national pour tout ce qui concerne la commercialisation des droits sportifs.

– Elle se concentre sur les disciplines qui jouissent d’une grande popularité et d’une bonne couverture médiatique.

– Ses mandats les plus importants sont ceux conclus avec l’équipe nationale de football, la Coupe Spengler de Davos (hockey sur glace), la Swisscom Cup (coupe suisse de football) et Swiss ski.

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