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Le drone genevois tombe à l’eau!

C’est un drone de ce type que réclamait le magistrat genevois. Keystone

Genève renonce à faire surveiller nuitamment les rues de la ville par un drone. Depuis samedi, l’affaire a mis en émoi le microcosme politique local.

Mercredi, le juge en charge de l’enquête sur les voitures incendiées déclare qu’il n’a plus besoin de cet avion de surveillance sans pilote.

«J’ai écrit une lettre à Micheline Spoerri (ministre genevoise de la Sécurité) pour lui dire que je n’avais plus besoin de cet appareil», déclare mercredi le juge d’instruction Leonardo Malfanti à la Tribune de Genève.

Formellement donc, l’affaire est close. Même si la demande déposée à Berne pour disposer d’un drone de l’armée est toujours pendante. Et si l’on imagine aisément qu’elle n’a pas fini de faire couler de l’encre et de la salive dans la ville du bout du lac.

Samedi dernier, c’est Le Temps qui met le feu aux poudres. Le quotidien révèle que le juge Malfanti a demandé début octobre à Micheline Spoerri de requérir un drone auprès des instances fédérales compétentes. Une première suisse. Peut-être même mondiale.

La Tribune de Genève relaie aussitôt, l’affaire, dont on fait également des gorges chaudes sur les ondes de La Première, la chaîne généraliste de la Radio Suisse Romande.

Mais la baudruche se dégonflera vite. Dès lundi, le juge Malfanti admet avoir inculpé deux suspects, qui auraient avoué la quasi-totalité des 26 incendies de voitures enregistrés à Genève dans les deux derniers mois.

Vandalisme ou terrorisme?

En annonçant que le recours au drone n’est plus d’actualité, le magistrat n’en soutient pas moins que la mesure n’aurait rien eu de disproportionné. Et fustige «ceux qui voudraient en revenir à une police n’utilisant que des vélos».

Lundi soir sur La Première, sa ministre de tutelle va même jusqu’à dire que pour elle, ces incendies constituent «une nouvelle forme de terrorisme».

Le lendemain sur la même antenne, Pierre Weiss, député libéral, soit du même parti que Micheline Spoerri, vole au secours de sa ministre. Pour dire une chose pareille, elle dispose peut-être «d’informations que nous n’avons pas», déclare l’élu sans faillir.

«Parler de terrorisme quand des voyous ou des vandales boutent le feu à des voitures, c’est un petit peu abusif», estime de son côté Pierre Maudet, vice-président du Parti radical genevois (centre-droit), dans un entretien avec swissinfo.

Et d’ajouter qu’au vu de la position qu’elle occupe, Micheline Spoerri devrait à tout le moins «peser les termes qu’elle emploie au plus près de sa conscience et au plus près de la réalité».

«Le même jour où cette affaire de drone est sortie, on a appris que pour 140 radars installés sur le territoire du canton, il y en a au mieux 21 qui fonctionnent simultanément», poursuit Pierre Maudet.

Or, la route a déjà tué à 25 reprises depuis le début de l’année sur les routes genevoises. Pour le politicien radical, convaincu de l’effet de prévention des contrôles de vitesse, les priorités sont donc à placer ailleurs que dans la surveillance aérienne et nocturne des rues de la ville.

Big Brother et la petite fumette



Il semble donc que le quadrillage de l’espace urbain par des avions-mouchard télécommandés ne soit pas pour demain. A Zurich, le porte-parole de la police Hans Leuenberger confirme que jamais un magistrat de la métropole n’en a simplement émis l’idée.

Et à Bâle, son homologue Klaus Mannhart ne cache pas que la demande genevoise a «plutôt fait sourire» dans les couloirs de la police.

Il existe malgré tout un précédent… involontaire. Au début de cette année, un drone téléguidé depuis la caserne d’Emmen, dans le canton de Lucerne, avait repéré par hasard un point lumineux suspect.

Et l’opération avait débouché sur la dénonciation à la police de… deux fumeurs de joints.

swissinfo, Marc-André Miserez

– Les drones de l’armée suisse sont de petits avions sans pilote, téléguidés depuis le sol et équipés de caméras infrarouges ultraperformantes.

– D’une envergure de 5,7 mètres pour 4,6 mètres de longueur, ils sont capables d’évoluer entre 300 et 3000 mètres d’altitude.

– Pour leur utilisation, l’armée facture quelque 10’000 francs de l’heure, y compris les frais de l’hélicoptère qui les accompagne en principe systématiquement.

– Dans le cas genevois toutefois, la demande portait sur un drone sans hélicoptère.

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