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Le génocide arménien revient sur le tapis

De 1915 à 1918, plus d'un million d'Arméniens ont été victimes de massacres et déportations systématiques. Keystone Archive

Des parlementaires veulent remettre sur le tapis la reconnaissance par la Suisse du génocide des Arméniens. Un an après le refus du Conseil national.

«De 1915 à 1918, rappelle la présidente de la Société pour les peuples menacés Ruth Gaby-Vermot, plus d’un million d’Arméniens ont été victimes de massacres et déportations systématiques.»

«Par cette reconnaissance, affirment les auteurs du postulat emmenés par le démocrate-chrétien genevois Jean-Claude Vaudroz, la Suisse rendrait justice aux victimes du génocide et à leurs descendants. Et elle contribuerait aussi à la prévention des crimes contre l’humanité.»

A noter que le postulat déposé lundi a été signé par 115 députés, soit la majorité de la chambre du peuple.

Il est moins contraignant que celui qui a été refusé à trois voix près, il y a tout juste un an, par le Conseil national. Car il demande à la chambre du peuple uniquement – et non pas au gouvernement – de reconnaître ce génocide.

Privilégier le dialogue

«Aujourd’hui, estime Ruth Gaby-Vermot, «les arguments avancés par le Conseil fédéral contre une reconnaissance du génocide des Arméniens n’existent plus».

Le gouvernement helvétique a toujours parlé des «événements tragiques» de 1915. En les condamnant. Mais il préfère aborder la question dans le cadre du dialogue politique turco-suisse.

En clair, une condamnation officielle nuirait au climat de confiance établi entre les deux pays. Ce qui aurait des conséquences néfastes dans les relations entre Berne et Ankara.

Des relations qui se sont très nettement améliorées. Ces deux dernières années, le patron de la diplomatie helvétique s’est rendu plusieurs fois en Turquie. Quant au ministre suisse de l’Economie, il sera à Istanbul et à Ankara ce week-end à la tête d’une forte délégation d’hommes d’affaires.

Pour mémoire, pour la Suisse, la Turquie est un partenaire important. Autant les exportations vers ce pays que les investissements directs dépassent le milliard de francs.

La morale face à l’économie

Hier, comme aujourd’hui, les parlementaires favorables à une condamnation de la Turquie s’élèvent contre cette «Real Politik». Ils souhaiteraient que, pour une fois, la morale prime sur l’économie.

Pour eux – ils l’ont clairement dit lors du refus du premier postulat l’an dernier -, la reconnaissance du génocide arménien serait un acte symbolique susceptible de faire avancer le processus de démocratisation en Turquie.

Contrairement aux députés suisses, ceux du Parlement européen ont franchi le pas. Et ceux de l’Assemblée nationale française aussi.

Un geste qui a d’ailleurs provoqué un refroidissement des relations entre Paris et Ankara. Mais aussi la perte de quelques juteux contrats en Turquie pour des entreprises françaises.

Car, en Turquie, la question du génocide arménien reste un tabou. Sa simple évocation est une atteinte à la république turque et musulmane. Au sein de laquelle les Arméniens, les Grecs et les Juifs restent des minorités tout juste tolérées.

swissinfo avec les agences

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