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Le golf suisse a déjà les yeux rivés vers Rio 2016

Le Genevois Julien Clément est le principal espoir suisse sur les greens de Crans-Montana et ailleurs. Keystone

Jusqu’à dimanche, les meilleurs golfeurs du continent s’affrontent sur les greens ensoleillés de Crans-Montana. Une occasion unique pour les joueurs suisses de s’illustrer et d’acquérir de l’expérience. Steve Rey, ancien pro reconverti en coach mental, est là pour les soutenir.

Par petits groupes ou en couple, bien souvent la cinquantaine grisonnante ou plus, à l’instar des stars du tournoi Greg Norman (55 ans) et Eduardo Romero (56), des milliers d’amateurs de golf parcourent depuis jeudi les 18 trous du golf-club de Crans-Montana. Sur le Haut-Plateau au-dessus de Sierre, 150 professionnels s’affrontent durant quatre jours pour se partager les deux millions d’euros de gains de la 76e édition de l’European Masters, étape incontournable du Tour Européen PGA.

Parmi eux, huit joueurs suisses, dont quatre professionnels. Le Genevois Julien Clément, 3e du tournoi en 2008, mais aussi le vétéran André Bossert et les jeunes espoirs Jann Schmid et Fredrik Svanberg.

Enfant du pays, l’ancien professionnel Steve Rey jongle d’un green à l’autre pour accompagner ses poulains tout au long de l’épreuve. Engagé récemment par l’Association suisse de golf (ASG), le Valaisan a pour mission de veiller à la bonne évolution des professionnels suisses sur les différents circuits continentaux.

Davantage porté sur l’individu que sur la technique, Steve Rey veut donner un nouveau souffle à des golfeurs qui peinent parfois à s’imposer au niveau international. Son objectif: faire de 2016 et du retour du golf aux JO un rendez-vous incontournable. Interview.

swissinfo.ch: Steve Rey, vous êtes le nouveau coach assistant de l’Association suisse de golf. En quoi consiste votre mandat?

Steve Rey: J’ai été engagé pour épauler le coach national Graham Keye, qui a énormément de travail avec les amateurs. Mon rôle est de soutenir les huit professionnels qui parcourent les différents circuits européens. Ces dernières années, il y a eu un certain flottement dans l’encadrement des joueurs professionnels. Depuis le décès du coach suédois Jan Blomqvist en 1996, le feeling avec les athlètes s’est un peu perdu. Certains n’ont pas toujours suivi le bon chemin, que ce soit au niveau de la technique ou de la planification de carrière.

swissinfo.ch: Outre Julien Clément, peu de golfeurs suisses arrivent à percer au plus haut niveau. Comment l’expliquez-vous?

S.R.: Le golf s’est beaucoup professionnalisé ces dernières années. Il n’y a plus de place pour le hasard. La Suisse compte une dizaine de professionnels. Extraire des champions est donc bien plus compliqué que pour des pays qui ont un réservoir de plusieurs centaines de pros. De plus, la culture du golf est bien moins ancrée ici que dans certains pays anglo-saxons ou nordiques.

Nous avons toutefois des joueurs très talentueux. Julien Clément, Jann Schmid, Frederic Svangberg et d’autres joueurs qui ne sont pas à Crans-Montana possèdent un réel potentiel. Le public est souvent déçu par le peu de joueurs qui passent le ‘cut’ (ndlr: les deux premiers tours) à Crans-Montana. Mais je vous promets que le talent est là, et à l’étranger on commence aussi à le reconnaître. Il faudrait maintenant qu’on se réunisse tous ensemble pour établir de vrais objectifs.

swissinfo.ch: Vos objectifs à vous, où se situent-ils?

S.R.: Il est important de fixer des buts à long-terme, sur une période de 3 à 5 ans, voire au-delà. Les Jeux olympiques de 2016 sont dans ce sens une formidable opportunité. Davantage encore pour les personnes qui doivent monter des structures que pour les athlètes. A plus court terme, je souhaiterais amener 2 à 3 professionnels sur le circuit européen. Personnellement, je souhaiterais que l’on décroche une victoire dans les cinq années à venir.

swissinfo.ch: Comment travaillez-vous au quotidien avec les golfeurs?

S.R.: J’essaye de m’éloigner le plus possible du modèle de l’entraîneur qui s’occupe uniquement de la technique. La plupart des joueurs ont déjà un conseiller technique qui les accompagne. Moi, je m’occupe de l’individu. Je veux comprendre l’athlète et lui apprendre à croire en lui, à s’entraîner juste.

J’ai également un rôle de protecteur à jouer. Comme il est moins sur le devant de la scène, le golfeur suisse est peut-être davantage perméable aux informations et aux influences de toutes parts. Les joueurs ont tendance à changer leur technique dès que ça va mal, alors que c’est souvent au niveau du mental que cela cloche.

Stratégie, routine et concentration sont les éléments les plus importants que j’essaye d’apporter. Un parcours dure au minimum cinq heures, dont moins d’une heure consacrée au jeu, préparation comprise. Tout le reste, c’est de la gamberge. Lorsque ça va mal, on a vraiment le temps de sortir complètement du sport et de ressasser toute son existence. J’ai vécu ça en tant que joueur et je sais que ça peut être très difficile à gérer.

swissinfo.ch: La démocratisation du golf a pris du retard en Suisse. Où en est-on actuellement?

S.R.: Aujourd’hui, on peut véritablement débuter le golf à des prix raisonnables. Un énorme travail a été fait pour les jeunes dans les clubs ces dernières années. Le golf n’est pas plus cher que d’autres sports. Dans notre petite Suisse, le nombre de parcours reste toutefois restreint, rendant l’accès plus difficile qu’ailleurs.

Ensuite, lorsqu’un jeune a du talent, il peut entrer dans des structures adaptées et obtenir certaines facilités financières. Là où ça peut se corser, c’est au moment du saut dans le monde professionnel. Les golfeurs doivent se battre pour trouver des sponsors. Mais ce n’est pas spécifique au golf, les autres sportifs suisses connaissent les mêmes difficultés.

swissinfo.ch: Les déboires de Tiger Woods ont-ils nuit à la réputation du golf et à sa promotion chez les jeunes?

S.R.: Tiger Woods a été un modèle, les jeunes se sont énormément identifiés à lui. Sa réputation a été entachée et cela a fait du tort au golf. Une nouvelle génération arrive cependant sur le devant de la scène. De jeunes golfeurs qui marquent leur différence, qui s’habillent de manière moins classique, plus colorée. Le golf est plus exigeant physiquement et l’allure des professionnels change peu à peu. De par son comportement, son habillement et son physique, le golfeur devient gentiment un sportif à part entière.

Samuel Jaberg, Crans-Montana, swissinfo.ch

Valais. La 76e édition de l’European Masters se déroule du 2 au 5 septembre dans la station valaisanne de Crans-Montana. Près de 50’000 spectateurs sont attendus durant les quatre jours d’épreuve. Le budget de la manifestation atteint dix millions de francs suisses

Parcours. Cent cinquante professionnels et six amateurs se disputent les deux millions d’euros de primes sur le parcours redessiné récemment par le champion espagnol Severiano Ballesteros, vainqueur à deux reprises de l’épreuve.

Histoire. Le palmarès du tournoi compte d’autres grands noms du golf comme Colin Montgomerie, Ernie Els, Luke Donald, Sergio Garcia ou Nick Faldo. Cette année, la star du tournoi est le Suédois Greg Norman.

A domicile. Huit Suisses sont en lice, dont les professionnels Julien Clément, André Bossert, Jann Schmid et Frederik Svanberg. Le Genevois Julien Clément avait terminé 3e de l’épreuve en 2008, réalisant l’une des plus belles performances de l’histoire du golf suisse.

Située sur un plateau – le Haut-Plateau – du canton du Valais surplombant la vallée du Rhône et la ville de Sierre, la station de Crans-Montana est un ensemble composé de six communes (Icogne, Lens, Montana, Randogne, Mollens et de Chermignon).

En hiver, Crans-Montana dispose d’un domaine skiable de 140 kilomètres comportant 18 installations. La «Nationale», piste qui avait accueilli les Mondiaux de ski alpin en 1987, a été récemment rénovée pour y accueillir des épreuves de Coupe du monde dames.

En été, Crans-Montana accueille l’European Masters de golf, qui fait partie du Tour Européen PGA. Outre le ski et le golf, un festival de musique, le «Caprices festival», fait depuis 2004 partie des événements incontournables de la région.

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