Le Vacherin Mont d’Or rejoint le club
Produit mythique de la vallée de Joux, le Vacherin Mont d'Or décroche enfin son appellation d'origine contrôlée (AOC).
C’est le sixième fromage suisse à l’obtenir. Pour autant, comme les autres, il ne sera pas protégé en dehors des frontières helvétiques.
Très familier des amateurs de fromage grâce à sa boite en bois d’épicéa, son fondant et sa croûte lavée de couleur or, le Vacherin Mont d’Or est produit de manière saisonnière, du 15 août au 15 mars.
Après le Gruyère, la Tête de Moine, L’Etivaz, le Sbrinz, le Fromage d’Alpage tessinois, il fait donc désormais partie de la petite famille des privilégiés qui sont protégés par une AOC.
Mis à l’enquête au mois de mai 2001, le dossier a dû faire face à trois oppositions. Qui concernent la pasteurisation du lait et l’utilisation d’affouragement d’ensilage (herbe en silo).
«Un compromis a finalement été trouvé», explique Isabelle Pasche, juriste à l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG).
«Concrètement, le lait servant à la fabrication du Vacherin Mont d’Or ne devra pas obligatoirement être pasteurisé. Quant à l’ensilage, il pourra encore être utilisé. Mais il devra disparaître complètement d’ici à dix ans.»
Protection du produit et gage de qualité
Cette nouvelle inscription d’un fromage suisse au registre AOC est un plus pour le consommateur et le producteur.
«Le consommateur, précise Isabelle Pasche, a la garantie que le produit en question est fabriqué selon le cahier des charges qui a été établi lors de sa classification.»
«Quant au producteur, ajoute la juriste, il profite d’une réelle protection contre les usurpateurs.»
A noter que l’emmental, le bouchon de chèvre (un autre fromage tessinois), la tomme vaudoise, le vacherin fribourgeois et le fromage d’alpage bernois ont, eux aussi, déposé leur dossier auprès de l’OFAG.
Lentement mais sûrement
Cela dit, l’AOC ne garantit aucune protection au-delà des frontières de la Confédération.
«Concernant l’Europe, explique Isabelle Pasche, les bilatérales ont permis de conclure des accords à propos des vins et des spiritueux. Mais pour les autres produits agricoles, dont le fromage, il faudra encore attendre.»
Cela dit, le dossier avance. Suite à une déclaration d’intention faite au début de 2002, l’Union européenne et la Suisse ont démarré des discussions en décembre dernier.
Un groupe d’experts planche sur ce dossier, précise Isabelle Pasche. Il travaille sur une reconnaissance réciproque des registres européens et suisses.
Un chemin long et sinueux
Mais la partie n’est pas encore gagnée. Et les procédures sont longues et compliquées.
Ainsi, les producteurs de Feta grecque et de Parmesan italien se battent depuis très longtemps pour une reconnaissance et une protection au niveau européen. C’est pratiquement fait pour le parmesan, mais pas encore pour la feta.
Pour autant, la politique agricole de l’Union européenne est claire. Elle prône en effet des produits de haute qualité.
Bruxelles a donc tout intérêt à encourager les AOC. Notamment pour empêcher la fabrication de mauvaises imitations.
Mais l’Europe compte déjà plus de 550 produits protégés en AOP (appellation d’origine protégée) ou en IGP (indication géographique protégée), contre six AOC en Suisse.
Malgré son AOC, le gruyère jouit d’une appellation franco-suisse depuis la convention de Stresa en 1950. Raison pour laquelle on trouve en France du gruyère de fabrication française.
La bataille pour la protection des fromages d’origine suisse s’annonce donc difficile.
swissinfo, Jean-Louis Thomas
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