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Les bolides reviennent à Berne

Collection A. Cimarosti

Le Grand Prix de Suisse renaît: le 23 août, 370 bolides d'origine vont faire chauffer leurs moteurs à Berne, comme ils l'avaient fait de 1934 à 1954, lorsque la course automobile était le rendez-vous sportif le plus important du pays.

A l’époque, plus de 100’000 personnes assistaient à la course chaque année. Les «Schumi» de l’époque avaient pour nom Rudolf Caracciola, Bernd Rosemeyer, Hans Stuck ou Juan Manuel Fangio. Les «flèches d’argent» avaient pour marque Ferrari, Maserati et Alfa.

De 1934 à 1954, le Grand Prix de Suisse à Berne a connu 14 éditions, synonymes de sport, de performance mais aussi de glamour dans la capitale fédérale. Pendant quatre jours, outre la course des bolides à quatre roues, il y avait aussi des courses de motos, y compris avec side-car.

La tragédie du Mans

Le trajet de Bremgarten, réputé dangereux, était aussi connu que les parcours de Nürburgring, Monte Carlo, Monza ou Silverstone. Lorsque le championnat du monde moto a été créé en 1949, puis le championnat de Formule 1 en 1950, il ne faisait aucun doute que le Grand Prix de Suisse devait en faire partie.

Mais il en fut autrement. Après la tragédie du Mans, qui vit la mort de 81 spectateurs en tribune fauchés par une voiture, les courses de voiture furent interdites en Suisse.

Cinquante-cinq ans plus tard, le «Grand Prix Suisse Bern Memorial 2009» veut faire renaître la tradition. Un itinéraire préparé à l’ouest de la capitale (le trajet original n’existe plus que partiellement) accueillera le 23 août 370 «oldtimer» de course, 300 voitures et 70 motos.

250 millions sur la route…

L’ensemble de la flotte ne vaut pas moins de 250 millions de francs. C’est ce joli «magot» qui partira de l’ouest de la capitale et y reviendra, après un tour par Frauenkappelen et Riedbach.

«Jamais encore autant de voitures et de motos historiques ne s’étaient présentés au même endroit au même moment en Suisse», s’enorgueillit Adriano Cimarosti, interrogé par swissinfo.ch. Conseiller des organisateurs de ce «revival», le journaliste spécialisé avait vécu le premier Grand Prix de Suisse, en 1947, à l’âge de 10 ans.

Il avait pu voir les mécaniciens préparer les bolides juste avant le départ. Après 40 ans de journalisme pour la Revue automobile, il est devenu un historien renommé du sport automobile.

Les Allemands en argent, les Italiens en rouge

La voiture au passé le plus prestigieux est peut-être «l’Auto Union type C» avec un moteur à 6 litres et 16 cylindres, qui a permis à Bernd Rosemeyer de gagner le Grand Prix en 1936. Installé dans le dos du conducteur, le moteur, capable d’aller jusqu’à 520 chevaux propulsait la voiture et ses 820 kilos à plus de 340 km/h!

C’est Hans Joachim Stuck, ancien pilote de F1, qui pilotera l’engin le 23 août. Comme de juste, il est le fils d’Hans Stuck, qui avait triomphé à Berne en 1934. La Mercedes Benz 154, victorieuse en 1938 avec Caracciola, est une flèche argentée. Son moteur à 12 cylindres, placé sous les pieds du pilote, comptait 480 chevaux.

Troisième star, l’Alfa Romeo 159. «A l’époque d’immédiat après-guerre, l’«Alfetta» dominait les Grands Prix. De 1946 à 1951, elle est même restée invaincue dans 36 courses de suite», explique Adriano Cimarosti. La Ferrari 500, qui a gagné en 1952 et 1953, et la Maserati 4CLT et 250F, seront d’autres bolides à admirer le 23 août.

Célèbre virage

La course de Bremgarten, avec son revêtement inégal et ses bordures d’arbres sur la moitié des 7,28 kilomètres, était connue pour ses difficultés. Le virage de la Eymatt était réputé: «Large au début, il se rétrécissait ensuite, avec ses nombreux arbres au bord», rappelle Adriano Cimarosti. Or les arbres faisaient que les conditions lumineuses changeaient abruptement.

S’il pleuvait, le danger devenait mortel. Adriano Cimarosti se souvient en frémissant du 1er juillet 1948. Ce jour-là, jour de pluie, le motard Omobono Tenni, qui avait gagné plusieurs fois, fit une chute mortelle. Le virage s’appela pendant quelque temps «le virage de Tenni». Un malheur venant rarement seul, le pilote Achille Varzi perdit le contrôle de sa voiture quelques heures plus tard, à quelques centaines de mètres de l’accident précédent. Là encore, la chute fut mortelle.

«Varzi a fait une erreur stupide, raconte le spécialiste. Il ne roulait même pas vite. Mais sa voiture est sortie de la route et est tombée dans un bosquet». Le pilote, qui avait été l’un des plus connus de l’entre deux guerres, a été écrasé par son Alfetta.

Tous les deux ans

Malgré ou à cause de sa dangerosité, la course de Berne était appréciée des pilotes. «C’est la préférée de Caracciola, dit Adriano Cimarosti, qui a gagné en 1935, 1937 et 1938». Mais Rosemeyer et Fangio aimaient aussi particulièrement y montrer leurs qualités.

Les organisateurs de ce «revival» aimeraient pouvoir organiser la manifestation tous les deux ans. «Cela devrait devenir une tradition comme la course du col du Klausen», espère Adriano Cimarosti.

Renat Künzi, swissinfo.ch
(Traduction de l’allemand: Ariane Gigon)

Historique. Près de 400 «oldtimer», répartis en groupes de 25 à 50 véhicules, rouleront à Berne le 23 août prochain, entre le quartier Westside, Frauenkappelen et Riedbach. De plus, des vols avec des avions historiques tels que les Super Constellation, JU 52, DC3, Bücker Jungmann, etc. seront organisés.

Berne. Une pierre commémorative sera dévoilée dans l’aire de départ et d’arrivée de l’ancien parcours de Bremgarten (le 22 août). Les véhicules rouleront en cortège dans la vieille ville de Berne, avec présentation, pour finir, sur la Place fédérale (soirées des 21 et 22 août).

Voitures suisses. Exposition à l’occasion du 70e anniversaire de Clay Regazzoni, le pilote suisse de Formule 1 le plus talentueux de tous les temps. Présentation de toutes les voitures de course suisses et de leurs constructeurs (Sauber, Monteverdi, Sbarro, Dufaux, etc.) au centre Westside.

Né en 1937 dans le Frioul italien, Adriano Cimarosti vit depuis 1941 en Suisse.

Avec son père, il a assisté au GP de Suisse à Berne pour la première fois en 1947.

Adriano Cimarosti a été 40 ans durant journaliste à la Revue Automobile.

Il est aujourd’hui un historien réputé du sport automobile.

Son dernier ouvrage, «Suisse Made Grand Prix» paraît à l’occasion du «Revival». Il retrace l’histoire du Grand Prix de Suisse entre 1931 et 1954 (2 volumes).

Commande: Grand Prix Suisse Berne Memorial, Riedbachstrasse 102, CH-3027 Berne. E-Mail: info@gp-suisse.ch

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