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Les déserteurs ne pourront plus obtenir l’asile d’office

Pour Christoph Blocher le bilan en matière de politique d'asile est positif. Keystone

Le gouvernement suisse prépare un nouveau tour de vis en matière de droit d'asile: les déserteurs et les objecteurs de conscience ne pourront plus obtenir automatiquement le statut de réfugié.

C’est ce qu’a annoncé le ministre de Justice et Police Christoph Blocher en présentant mercredi le bilan de son action dans le domaine de l’asile.

Le second volet des nouvelles lois sur l’asile et les étrangers, adoptées par le peuple suisse en septembre 2006, entrera en vigueur au début de 2008. Le Conseil fédéral (gouvernement) a communiqué cette décision par la voix du chef du Département de Justice et Police (DFJP), qui en a profité pour annoncer un nouveau tour de vis.

Christoph Blocher ne veut en effet plus que des déserteurs ou des objecteurs de conscience obtiennent d’office le statut de réfugiés, comme c’est actuellement le cas suite à une décision de principe de la Commission de recours en matière d’asile concernant les Erythréens.

Le ministre avait déjà critiqué cette décision en début d’année. Evoquant le problème de l’afflux de demandes d’Erythrée, il a chargé son département d’élaborer un projet d’arrêté fédéral urgent modifiant la loi sur l’asile. Une telle procédure permettrait d’appliquer cette disposition dès son adoption par le Parlement.

L’OSAR critique

Pour justifier cette initiative, Christoph Blocher a énoncé des chiffres. Selon lui, les demandes d’asile déposées par des Erythréens s’élevaient à 10 ou 20 par mois en 2005. A l’heure actuelle, «il y a en a parfois 300 par mois», a déclaré le ministre.

Pour sa part, le directeur de l’Office fédéral des migrations (ODM) Eduard Gnesa a rappelé que l’objectif de la nouvelle loi était de rendre la Suisse moins attractive. Ce qui n’empêche pas d’accueillir les personnes concernées de manière provisoire ou de les reconnaître comme réfugiés pour d’autres raisons, par exemple politiques, ont relevé les deux hommes.

De son côté, l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) a critiqué l’argumentation de Christoph Blocher. Elle a rappelé que la Commission de recours en matière d’asile s’était prononcée en ce sens en raison des menaces de mauvais traitements, voire de torture, qui pesaient sur les déserteurs érythréens.

Tour de vis «efficace»

Dressant le bilan de dix mois d’application de la nouvelle loi sur l’asile, Christoph Blocher a énuméré une série de statistiques pour démontrer le bien-fondé et l’efficacité des mesures prises. Celles-ci «ont fait baisser les coûts», s’est-il félicité.

Cette année, quelque 10’000 demandes d’asile devraient être déposées et 18’000 procédures seront en cours. C’est près de 50% de moins qu’en 2003. Quatre sur cinq sont cependant toujours «infondées, ce qui nécessite de maintenir une position claire pour éviter les abus», a souligné le ministre.

Au chapitre des nouveautés approuvées par le peuple en septembre 2006 pour traquer les abus figurent notamment la prolongation de la durée des mesures de contrainte en vue du renvoi, ainsi que la non-entrée en matière sur une demande d’asile en cas d’absence de documents d’identité.

Sur cette question controversée, Christoph Blocher a fait valoir que les nouvelles règles n’ont pas abouti à des injustices, ce que conteste l’OSAR.

Au niveau du nombre de personnes se présentant sans les documents requis, il est en recul, s’est félicité Christoph Blocher, qui a relevé que, parallèlement à la baisse des demandes, le taux des personnes admises définitivement avait doublé à 20% depuis 2004.

Contrats d’intégration

Pour ce qui est du bilan de la nouvelle loi sur les étrangers, qui limite l’immigration extra-communautaire aux travailleurs qualifiés, Christoph Blocher l’estime également positif. Il a toutefois tenu à souligner l’importance des enjeux en matière d’intégration.

A cette fin, les cantons seront notamment autorisés à conclure des contrats d’intégration, ceci pour les «groupes à risques, soit en premier lieu les ressortissants des Balkans», a dit Eduard Gnesa. D’après l’ODM, il s’agit d’un élément très important pour l’octroi ou la prolongation d’un permis.

Pour sa part, Christoph Blocher a répété son credo selon lequel des mesures doivent être prises au niveau des exigences linguistiques, du travail et de l’école. Les jeunes demeurent selon lui la cible principale et la criminalité et le chômage des étrangers restent «problématiques.»

Enfin Eduard Gnesa a précisé que la nouvelle loi sur les étrangers permet une meilleure intégration des personnes qui restent en Suisse, notamment en faisant venir plus tôt les enfants concernés par le regroupement familial.

swissinfo et les agences

En septembre 2006, 68% des citoyens suisses ont approuvé un durcissement de la loi sur l’asile, dont il s’agissait de la neuvième révision depuis 1984. En même temps, ils ont également adopté la révision de la loi sur les étrangers.

Les nouvelles dispositions prévoient une période de détention plus longue pour les requérants d’asile en attente de rapatriement. Les requérants frappés d’une décision de non-entrée en matière n’ont plus droit à l’assistance sociales. Quant aux personnes qui ne présentent pas de documents d’identité, elles sont exclues d’office de la procédure.

Une partie des mesures prévues par la révision de la loi sont entrées en vigueur le 1er janvier 2007. Les dispositions restantes – dont la suppression de l’aide sociale à tous les requérants déboutés – entreront en vigueur le 1er janvier prochain.

Quant à la nouvelle loi fédérale sur les étrangers, elle privilégie les citoyens de l’UE et limite l’admission des autres immigrants aux travailleurs qualifiés. Elle marque un durcissement des conditions d’octroi des permis de travail et de regroupement familial.

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