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Les remontées mécaniques sous pression

2800 personnes peuvent être transportées par le Matterhorn Express en une heure. swissinfo.ch

En Suisse, les deux tiers des remontées mécaniques sont déficitaires.

Pour permettre aux cantons de trouver des solutions rentables, les autorités fédérales vont geler leur aide financière pendant trois mois.

Prise par le Secrétariat d’ Etat à l’économie (seco) à la fin du mois de décembre, cette décision touche les prêts qui profitent aux remontées mécaniques et qui ont été accordés dans le cadre de la loi sur les investissements de montagnes (LIM).

Selon les chiffres du seco, pour le dernier plan d’investissement 1999-2002, ces prêts-là représentent quelque 49 millions de francs sur une enveloppe globale de 410 millions de francs.

Une pause pour faire le point

Adieu, donc à la manne fédérale. Du moins pour un temps.«Il ‘agit d’une simple suspension de trois mois, explique Remo Mardosini. Elle doit durer jusqu’au premier avril.»

Une suspension que le responsable LIM au seco assimile à une «pause normale» entre deux plans quadriennaux d’investissements. Mieux, qui «tombe à pic», puisque «les travaux ne se font jamais en hiver».

Cela dit, cette pause à une raison d’être. «Elle doit nous permettre de faire une évaluation de la situation des entreprises de remontées mécaniques», explique Rita Baldegger, porte-parole du seco.

Et d’ajouter: «C’est aussi une manière de repenser notre stratégie en matière d’encouragement aux investissements».

La politique de l’arrosoir

En clair, le seco veut mettre fin à «la politique de l’arrosoir qui est pratiquée par certains cantons». C’est-à-dire à la pratique qui consiste à distribuer de l’argent à des régions qui ne constituent pas une haute priorité en matière d’investissement.

Les autorités fédérales demandent donc aux cantons d’analyser la situation de leurs remontées mécaniques respectives et de redéfinir leur politique sur quatre ans.

«Ce processus est nécessaire, affirme Rita Baldegger. Les cantons doivent sérieusement étudier des possibilités de collaborations et de regroupements entre sociétés de remontées mécaniques.»

D’ailleurs, pour le seco, cette politique de regroupement est le seul moyen qui permettra de résoudre les problèmes de rentabilité et de résister à la pression de la compétition internationale.

C’est l’argent du contribuable qu’on dépense

«Ce moratoire nous surprend, lance le président des Remontées mécaniques suisses. D’autant plus que personne n’a été consulté.»

«Cela dit, admet Louis Moix, cette mesure est nécessaire. C’est vrai que nous devons revoir certaines politiques cantonales en la matière qui ne sont pas des plus rentables.»

Le président des Remontées mécaniques suisses est tout à fait conscient du problème.

Ces «prêts LIM» représentent l’argent du contribuable. Une telle aide à des sociétés complètement endettées et qui sont souvent victimes d’un manque chronique de neige n’est donc pas justifiée.

Mais, ajoute aussitôt Louis Moix: «les petites sociétés qui sont actuellement en bonne santé et bien gérées pourraient bien être pénalisées injustement. Surtout celles qui ont besoin d’un petit coup de pouce pour survivre.»

Vaud montre l’exemple, le Valais est montré du doigt

«Il faut donc que les cantons se mettent au travail, souligne le président des Remontées mécaniques suisses. Or, jusqu’ici, seuls Berne, les Grisons, le Tessin, Vaud et le Valais se sont retroussés les manches.

Et c’est le canton de Vaud qui est le plus avancé. «Il a d’ores et déjà réalisé de nombreuses études, précise Louis Moix. Mieux, il a appliqué une politique qui a porté ses fruits.»

Concrètement, en matière de collaboration entre sociétés de remontées mécaniques, les Vaudois ont pris le taureau par les cornes.

En revanche, le Valais, lui, a pris beaucoup de retard. «Il nous a promis la réalisation d’une étude pour le printemps 2003, explique le président des remontées mécaniques suisses.»

Il faut dire que le Valais compte, à lui seul, 29% des sociétés des remontées mécaniques suisses (56). Contre 20 % pour les Grisons, 13% pour Berne, et 13% pour Vaud.

Il faut abaisser le taux de la TVA

L’avenir passe donc par une collaboration et des partenariats forcés. «C’est la seule et unique solution raisonnable, reconnaît Louis Moix. Nous ne pouvons plus appeler systématiquement l’Etat à la rescousse.»

Le président des remontées mécaniques suisses va même plus loin. Il lance l’idée d’une seule structure de remontées mécaniques par domaine skiable.

«Ce moratoire me fait éclater de rire, s’exclame de son côté le directeur de Télé – Morgins. Je ne vois pas pourquoi le seco nous dicterait ce que nous devons faire. D’autant plus que nous n’avons jamais demandé un seul crédit LIM.»

Jacques Nantermod n’a d’ailleurs pas attendu la bonne parole des autorités fédérales pour agir. «Nous collaborons depuis longtemps, notamment avec les Français. Et nous faisons des bénéfices.»

«En revanche, conclut le directeur du plus vaste domaine skiable d’Europe situé aux confins de la Suisse et de la France, la Confédération ferait mieux d’abaisser le taux de TVA pour les remontées mécaniques, ce qui est le cas en France.»

Cela dit, les Conseillers nationaux, élus par le peuple pour défendre les régions LIM, ne risquent-ils pas de perdre de leur crédibilité, en votant des crédits qui iront peut-être à l’encontre de leurs intérêts régionaux?

«Absolument pas, rétorque le Conseiller national démocrate-chrétien, valaisan, Fernand Mariétan. Nous sommes appelés à voter des enveloppes globales concernant la LIM.» Toutefois, l’attribution de ces sommes revient uniquement aux cantons, suite à la demande des communes.

swissinfo, Jean-Louis Thomas

Il y a 586 compagnies de remontées mécaniques en Suisse.
Elles emploient directement près de 11000 personnes.
85% des compagnies ont un chiffre d’affaires de moins de deux millions par année.

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