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Le dérèglement climatique échauffe les esprits

A terme, le ski de moyenne altitude est condamné. RTS

Le climat en Suisse se réchauffe plus vite que la moyenne du globe. Un fait incontesté dans les milieux scientifiques.

Mais la climatologue Martine Rebetez en conclut qu’à terme le ski est condamné dans certaines stations. Une thèse à relativiser.

Les quelques flocons de neige qui tombent ces derniers jours en Suisse ne changent rien à la tendance générale. Martine Rebetez est catégorique.

Dans son livre, «La Suisse se réchauffe», elle affirme que les températures ont augmenté en Suisse de 1,5 degrés en un siècle. Le globe s’est lui réchauffé en moyenne de 0,6 degré.

«Les surfaces terrestres se réchauffent plus vite que les régions océaniques», explique la chercheuse de l’Institut fédéral pour l’étude de la forêt, de la neige et du paysage.

L’Europe étant très continentale, elle est donc plus sensible au réchauffement climatique global.

Différences saisonnières

L’hiver ainsi que l’été se réchauffent plus nettement. Alors que le printemps conserve les mêmes températures.

A l’orée de l’hiver, la question de l’enneigement se pose forcément. Martine Rebetez constate que depuis la fin des années 80, il est tombé 30% de neige en moins. Mais uniquement en dessous de 1’500 mètres.

La variabilité des chutes de neige d’une année à l’autre reste néanmoins importante. «La neige en plaine est encore possible dans les prochaines années, mais de moins en moins souvent», affirme-t-elle.

Les glaciers suisses ont pour leur part perdu la moitié de leur volume depuis la fin du 19è siècle. Le glacier d’Aletsch, classé depuis peu au patrimoine mondial de l’UNESCO pourrait donc bien se réduire comme peau de chagrin.

Un tableau trop noir

Tous les spécialistes ne brossent pas un tableau aussi noir du dérèglement climatique. «Martine Rebetez défend un courant catastrophiste», s’exclame Frédéric Glassey. Le patron de Météonews préfère prendre quelque distance.

«Premièrement, ses mesures n’ont qu’un siècle pour tout recul. Or elles partent d’une période froide. Il est donc normal de constater que le climat se réchauffe.»

A l’échelle d’un cycle climatique moyen de 100’000 ans, on devrait en outre bientôt arriver à la fin de la période interglaciaire qu’on vit actuellement. La planète va donc se refroidir naturellement… d’ici quelques milliers d’années!

Le météorologue avance encore l’hypothèse que le réchauffement climatique pourrait avoir des conséquences inverses à celles prédites par Martine Rebetez.

Avec la fonte de la calotte glaciaire, davantage d’eau douce, donc lourde et froide, glisse sur les fonds marins en direction des tropiques. Le cycle de l’eau pourrait alors s’inverser dans l’Atlantique.

Dès lors, le Gulf Steam, le courant chaud qui tempère l’Angleterre et les pays nordiques, ne pourrait plus remonter au-delà de l’Espagne. L’Atlantique Nord deviendrait donc plus sec et froid.

Le climat suisse suivrait la même évolution puisque les perturbations qui atteignent la Suisse se forment essentiellement sur l’Atlantique.

Neige et soleil en haute altitude

Que les amateurs de ski se rassurent toutefois! Pour l’instant, la neige tombe toujours aussi abondamment en haute altitude. Sur ce point, tout le monde s’accorde.

Les canons à neige peuvent dès lors être utiles pour assurer le retour vers les stations se situant au-dessous de 1’500 mètres d’altitude. Cette optique restrictive est celle adoptée par la Suisse, contrairement aux pays alpins voisins qui enneigent à tout va.

Corollaire d’un climat plus doux en hiver, l’ensoleillement est en légère augmentation en montagne. Les stations ont donc encore un bel avenir devant elles.

Des conditions plus extrêmes

Toujours selon la climatologue, le principal problème tient au fait que la répartition annuelle des précipitations change. Sans qu’il y ait forcément plus de pluies.

De longues périodes de sécheresse alternent avec de courtes périodes de précipitations très intenses. Qui dit afflux d’eau subits dit aussi inondations, torrents de boue et autres glissements de terrain.

Dans toute la région alpine, il va donc falloir trouver des moyens de prévenir ces catastrophes naturelles. «Cela va coûter très cher, prévient-elle, mais c’est indispensable pour les éviter».

Mais là encore, Frédéric Glassey relativise: «Ce ne sont peut-être que des exceptions météorologiques. Rien n’indique que les pluies d’octobre, par exemple, soient dues au réchauffement climatique. Comme rien ne prouve non plus que la pollution soit responsable de ce même réchauffement.»

swissinfo/Anne Rubin

«La Suisse se réchauffe», Martine Rebetez, Presses polytechniques et universitaires romandes.

-Le climat en Suisse s’est réchauffé trois fois plus vite que sur le reste de la planète: 1,5 degrés contre 0,6.

-Il est tombé 30% de neige en moins depuis la fin des années 80 à moins de 1’500 mètres.

-Les glaciers ont perdu 50% de leur volume depuis la fin du 19è siècle.

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