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Policier bâlois acquitté en France

Le commandant de la police de Bâle-Ville Roberto Zalunardo (à d.) est satisfait du verdict. Keystone

Le caporal bâlois qui a tué un voleur de voiture sur sol français en août 2001 a été acquitté jeudi par la Cour d'assises du Haut-Rhin, à Colmar.

La Cour a ainsi suivi la défense. L’accusation avait quant à elle requis cinq ans de prison avec sursis.

Le commandant de la police de Bâle-Ville Roberto Zalunardo a fait part de son soulagement à l’issue du verdict. Il a toujours eu confiance dans la justice française, a-t-il déclaré. Pour sa part, l’avocat de la défense, Thierry Moser, s’est dit très satisfait.

La Cour d’assises, composée de trois juges professionnels et de neuf jurés populaires, a rendu son verdict après trois heures de délibération. Le Ministère public a dix jours pour faire appel, a précisé la présidente du tribunal.

Irresponsabilité pénale

Pour la Cour, le policier, un caporal âgé de 39 ans, a bel et bien commis des «violences volontaires ayant entraîné la mort». Elle estime toutefois que le policier bénéficie de la clause d’irresponsabilité pénale selon l’article 122-3 du Code pénal français.

Cet article stipule que «n’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir crû pouvoir légitimement accomplir l’acte», alors qu’elle n’était pas en mesure d’éviter de commettre une erreur d’appréciation du droit.

«Je ne souhaite à aucun policier de se retrouver dans ma situation», a déclaré le prévenu avant que la Cour se retire pour délibérer. «J’ai agi comme ma législation me l’imposait, comme ce que je pense être l’action d’un citoyen honnête», a-t-il ajouté.

Usage abusif de l’arme

Dans son réquisitoire, l’avocate générale a estimé que le policier bâlois avait fait un usage abusif de son arme. La légitime défense ne pouvait, selon elle, pas s’appliquer car le policier n’était plus en danger au moment du tir mortel.

Pour l’accusation, dont le réquisitoire a duré moins d’une heure, le prévenu a fait preuve «d’une fragilité inquiétante pour tous les citoyens». L’avocate générale a déclaré espérer que le fonctionnaire ne pourra plus exercer sa fonction de policier.

La défense a ensuite démonté point par point les arguments de l’accusation. Les avocats de la défense ont d’abord rappelé la personnalité de la victime, un délinquant, voleur de voitures et toxicomane notoire.

«Imprégné de drogues»

Les expertises ont montré que la victime était «imprégnée de drogues au moment des faits». Le jeune homme avait consommé de la méthadone, de la cocaïne et de l’héroïne quelques heures avant le drame. Il avait volé deux voitures et tenté d’en voler une troisième.

Alors qu’il était poursuivi par la police, le jeune homme a roulé dans les rues de Bâle à plus de 100 km/h avec son amie et son bébé dans le véhicule. «Il se fichait royalement de la vie des autres en roulant à des vitesses phénoménales», a souligné Thierry Moser.

Lorsque le véhicule volé a percuté une barrière et s’est arrêté près du lieu du drame, le jeune homme s’est enfui à nouveau malgré les sommations des fonctionnaires de police. Un policier a dû sauter sur le côté pour ne pas être renversé par la voiture volée.

Menace de mort

En s’échappant, le voleur a choisi de sacrifier éventuellement la vie d’un policier, de son amie et de son enfant, selon la défense.

Celle-ci a aussi rappelé que le père de la victime avait déposé une plainte contre son fils pour menace de mort dix jours seulement avant le drame.

Le prévenu est un serviteur dévoué de la loi et de l’ordre, a affirmé l’avocat. «Voulez-vous que les voyous fassent la fiesta en disant que ce ‘sale flic’ a été condamné?», a-t-il ajouté à l’adresse de la Cour en concluant sa plaidoirie.

Dix-neuf coups de feu

Les faits remontent au 23 août 2001 peu avant minuit. Trois policiers bâlois ont pris en chasse un véhicule volé à Bâle. La course poursuite s’est terminée sur sol français, à une centaine de mètres de la frontière suisse, entre Bâle et St-Louis (F).

Deux des policiers ont sorti leur arme et tiré à 19 reprises sur le véhicule volé qui s’éloignait. Le conducteur habitant en France, âgé de 27 ans, a été touché par trois balles, dont deux à la tête. Le coup mortel a été tiré à une distance de cinq mètres.

Le policier qui a tiré la balle mortelle a été renvoyé aux assises. L’accusation estimait en effet que ses tirs étaient «illégitimes et totalement disproportionnés».

Le policier était accusé de «violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, par personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions». Il risquait jusqu’à 20 ans de prison.

swissinfo et les agences

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