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Quel avenir pour le télétravail des frontaliers?

une femme en télétravail
© Keystone / Christian Beutler

La pandémie de coronavirus a chamboulé le quotidien de la plupart des employés, et celui des frontaliers peut-être plus encore. Car le fait de travailler depuis son domicile, lorsque celui-ci ne se trouve pas dans le même pays que son lieu de travail, a des répercussions en termes d’assurances sociales et de fiscalité.

Depuis le mois de mars 2020, le télétravail est l’une des mesures clés de la lutte contre le coronavirus dans plusieurs pays. Et celui-ci a des conséquences sur la fiscalité et les assurances sociales pour les quelque 180’000 personnes qui résident en France et passent chaque jour la frontière pour venir travailler en Suisse.

Contenu externe

En temps normal, un frontalier est soumis au régime suisse d’assurance maladieLien externe, pour autant que son activité à domicile ne dépasse pas 25% de son temps de travail. Avec le télétravail imposé, ce taux passe à près de 100%, obligeant normalement le travailleur à être affilié à la sécurité sociale de son pays de résidence et à y cotiser sur l’ensemble de ses revenus.

Du côté de la fiscalité, les règles varient en fonction du canton dans lequel le frontalier exerce son activité. Une personne qui travaille dans les cantons de Vaud, Valais, Neuchâtel, Jura, Berne, Bâle-Ville, Bâle-Campagne ou Soleure se verra imposée dans son pays de résidence. Mais pour tous les autres cantons, et notamment le canton de Genève, le travailleur paie ses impôts par un prélèvement à la source dans l’État qui l’emploie, c’est-à-dire la Suisse. Or, en cas de télétravail dépassant 25% du taux d’activité, celui-ci n’est plus la Suisse, mais la France.

À situation exceptionnelle, système dérogatoire

Dans ce contexte exceptionnel, la Suisse et la France ont décidé de conclure, dès le mois de mars 2020, un accord amiableLien externe qui permet aux frontaliers en télétravail de continuer de bénéficier des régimes sociaux et fiscaux habituels, comme s’ils s’étaient rendus physiquement sur leur lieu de travail. Actuellement, l’accord dérogatoire en matière sociale a été prolongé jusqu’au 30 juin 2021 et celui concernant l’imposition est en vigueur jusqu’au 31 mars 2021.

Michel Charrat
Michel Charrat, Président du GTE (Groupement Transfrontalier Européen) màd

Président du Groupement Transfrontalier Européen GTELien externe, qui défend les intérêts des plus de 100’000 travailleurs frontaliers actifs à Genève, Michel Charrat voit d’un œil positif cet accord amiable. Il considère toutefois que «la situation va finir par poser des problèmes sur le long terme» et souhaite que le système dérogatoire actuellement en place devienne pérenne.

Du côté de Berne, on constate qu’une «plus grande flexibilité et un assouplissement durable des règles sont parfois souhaités». Selon l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et le Secrétariat d’État aux questions financières internationales (SIF), en charge du dossier, une «analyse est en cours en vue de déterminer si une adaptation des règles fiscales actuelles serait souhaitable afin de tenir compte du développement attendu du télétravail après la fin de la pandémie».

Évolution des mentalités

L’OFAS et le SIF affirment cependant dans une prise de position commune adressée à SWI swissinfo.ch qu’«il n’est pas possible de déroger bilatéralement entre États, de manière pérenne, aux règles habituelles en matière d’assujettissement aux assurances sociales». Les deux offices rappellent que celles-ci sont «prévues par un règlement européen, auquel fait référence l’Accord sur la libre circulation des personnes». Une modification de ce règlement impliquerait donc une révision législative au niveau européen, que la Suisse ne peut pas initier.

«C’est précisément à ce niveau que nous sommes en train d’agir. En raison de la crise du coronavirus, l’Europe se rend compte des nombreux problèmes des frontaliers et peut-être que cela va amener les législateurs à agir plus rapidement que d’habitude», affirme Michel Charrat. Le GTE mène actuellement un intense travail de lobbying auprès de la Commission européenne et des gouvernements suisse et français pour arriver à ses fins.

Que ce soit avec l’Allemagne ou l’Italie, un accord amiable a été conclu avec la Suisse. De la même manière que pour la France, les frontaliers résidant dans ces pays sont considérés comme travaillant en Suisse même s’ils exercent la majeure partie de leur exercice en télétravail.


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