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Retour sur Terre réussi pour la navette spatiale

Discovery en orbite, au cours de sa dernière mission. NASA

Au terme d’un long suspense, Discovery s’est finalement posée sans encombres mardi à 14h11 (heure suisse) sur la base d’Edwards en Californie.

Ancien passager de cette même navette spatiale, le Suisse Claude Nicollier estime que les problèmes rencontrés lors de cette mission ne cloueront pas longtemps les navettes au sol.

Explosion de joie à la Nasa pour l’issue heureuse de cette première mission d’une navette depuis la tragédie de Columbia en 2003. «Discovery est à la maison», a lancé le centre de contrôle. «Nous sommes de retour», a répondu la commandante Eileen Collins.

La rentrée dans l’atmosphère, phase critique du vol, s’est parfaitement déroulée pour les sept astronautes de Discovery, qui avaient à l’esprit l’issue funeste de leurs sept prédécesseurs à bord de Columbia, tués seize minutes avant l’atterrissage quand leur navette s’était désintégrée dans les hautes couches de l’atmosphère.

Discovery, que la Nasa a finalement renoncé à faire rentrer en Floride en raison de la météo, s’est donc posée avec un jour de retard par rapport au plan de vol initial sur la piste de la base aérienne d’Edwards. Cela au terme d’un grand plongeon débuté une heure plus tôt, alors que l’astronef fonçait à 29.000 km/h en orbite autour de la Terre.

Discovery avait entamé le 26 juillet son voyage vers la Station spatiale internationale (ISS). Au moment du lancement, un morceau de mousse isolante s’était détaché du réservoir principal, ce qui a rapidement amené la Nasa à annoncer la suspension jusqu’à nouvel ordre de ses vols habités.

Une suspension qui ne devrait pas durer longtemps de l’avis de Claude Nicollier, le premier – et à ce jour le seul – Suisse à avoir volé dans l’espace. L’astronaute vaudois a également bon espoir qu’une prochaine mission de la navette permette de donner un sursis de vie au télescope spatial Hubble.

swissinfo: Vous devez être soulagé d’avoir vu atterrir Discovery…

Claude Nicollier: Oui, bien sûr. La rentrée dans l’atmosphère est une phase très délicate de la mission et l’accident de Columbia nous a montré qu’elle était plus dangereuse que nous ne le pensions.

Dans les années 90 pourtant, on a toujours considéré que la rentrée était nettement moins dangereuse que le lancement et la phase ascensionnelle.

Cela dit, si le bouclier thermique du vaisseau est en bon état, comme cela était le cas aujourd’hui avec Discovery, on peut entamer les opérations de rentrée et d’atterrissage en toute confiance.

swissinfo: Vous qui avez volé sur Discovery, vous avez dû suivre cette mission d’un œil particulier…

C.N.: J’ai de toute façon une affection particulière pour les quatre navettes sur lesquelles j’ai eu le privilège de voler, y compris Columbia, perdue tragiquement en 2003.

Mais Discovery est la navette de ma dernière mission, en décembre 1999, elle est donc naturellement spéciale pour moi, car c’est un vaisseau que j’ai appris à bien connaître.

swissinfo: Quel impact aura la décision de suspendre les vols sur la suite de l’assemblage de l’ISS et sur la réparation de Hubble?

C.N.: Je ne crois pas qu’il sera très important. Je pense que la navette volera à nouveau avant la fin de l’année. Peut-être même déjà en septembre. Si cela ne marche pas, la prochaine fenêtre de lancement est en novembre, et je suis presque sûr qu’à ce moment, nous retournerons dans l’espace.

La suspension n’aura donc pas eu de grandes conséquences sur l’assemblage de l’ISS, qui est la mission principale des navettes avant leur retraite, prévue dans cinq ans.

Quant à Hubble, il fonctionne toujours, même si certains de ses systèmes se sont sérieusement dégradés. Si nous ne faisons pas les réparations nécessaires dans les deux ou trois ans, il pourrait devenir inutilisable au-delà de 2008.

Mais j’ai bon espoir que l’une des 15 à 20 missions prévues pour les navettes avant la mise hors service de la flotte servira à réparer Hubble et à lui assurer encore quelques années de vie.

swissinfo: A propos de l’avenir, la Nasa doit lever le voile ce mois sur sa prochaine génération d’astronefs. A quoi ressembleront-ils et à quel point seront-ils différents de la navette?

C.N.: Je ne connais pas tous les détails, mais je sais que le successeur de la navette ne lui ressemblera pas du tout. Ce sera davantage un vaisseau de type capsule, comme les Soyuz russes, mais bien sûr d’une nouvelle génération.

Le design de cet engin est appelé à évoluer à l’avenir et à s’adapter aux futures missions vers la Lune et vers Mars, que l’on peut prévoir dans les 20 à 30 prochaines années.

Interview swissinfo, Ramsey Zarifeh
(traduction et adaptation de l’anglais, Marc-André Miserez)

Claude Nicollier est né le 2 septembre 1944 à Vevey, sur la Riviera vaudoise.
Licencié en physique de l’Université de Lausanne en 1970, il obtient cinq ans plus tard une Maîtrise en astrophysique à Genève.
Claude Nicollier est également pilote militaire et pilote d’essai. En 1980, il devient le premier et l’unique Suisse à intégrer le corps des astronautes américains, via l’Agence spatiale européenne.
En quatre missions à bord de la navette, il a accumulé plus de 1000 heures dans l’espace, entre son premier vol sur Atlantis en 1992 et le dernier sur Discovery en 1999.

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