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Des électrons dans le mouvement

Légende: L’horloge (double) de Shortt, un sommet de précision électrique. MIH

L’heure donnée grâce à l’électricité a eu son heure de gloire. Le Musée international d’horlogerie de la Chaux-de-Fonds propose de remettre le doigt dans la prise...

Jusqu’en septembre, le musée présente la plus vaste exposition montrée en Suisse sur ce monde quasi parallèle.

Jusque-là, donner l’heure revenait au clocher du village, lui-même réglé sur le soleil. Concrètement donc, chaque ville et chaque village disposait de son heure propre. Bonjour la ponctualité.

C’est à la fin du 19e siècle, au moment de l’introduction du système des fuseaux horaires et de l’industrialisation à tout crin, que l’unification de l’heure intervient à travers le monde. Vecteur: l’électricité.

L’heure est souvent transmise d’une horloge-mère électrique vers ses horloges affiliées. Ce fut le cas dans la majeure partie des villes européennes et américaines jusqu’à l’apparition du signal radio au début du 20e siècle (la Tour Eiffel émet depuis 1912).

Trois soucis

Cette première vocation de l’heure électrique – la transmission – se double de deux autres soucis ayant présidé à l’apparition de l’horloge électrique dès la version de l’Anglais Alexander Bain, en 1840.

D’abord, la recherche de la précision. Même si la plupart des horloges électriques restent en retrait de leurs homologues mécaniques sur le plan de l’exactitude, l’une d’elles a battu le record de précision que seule la révolution du quartz lui a enlevé (première horloge à quartz vers 1930).

«En 1921, cette horloge signée Shortt permet de constater que la rotation de la terre autour du soleil n’est pas régulière», précise Jean-Michel Piguet, conservateur adjoint du Musée international d’horlogerie de la Chaux-de-Fonds (MIH).

Dernier souci de ses explorateurs, l’utilisation de l’électricité dans l’horlogerie visera aussi à se passer du remontage manuel des horloges. Pratique, sans plus.

Un siècle

Ce morceau d’histoire horlogère situé entre le garde-temps mécanique (revenu depuis sur les devants de la scène) et la révolution du quartz a donc duré grosso modo un siècle (1840-1950).

Il est souvent le fait d’inventeurs oeuvrant en marge de l’industrie horlogère «classique» et des maisons ayant pignon sur rue.

Certains noms sont restés célèbres toutefois, comme Matthias Hipp (1815-1893, Allemand d’origine), qui a vendu ses horloges électriques à travers toute la Suisse et au-dehors à partir de Neuchâtel.

«Les horlogers ont souvent un peu peur de l’électricité, constate Jean-Michel Piguet. En plus de cela, avec l’horlogerie électrique, on n’a souvent pas la qualité technique ni la finition recherchée par les horlogers.»

Il est d’ailleurs révélateur de constater que pour mettre sur pied cette exposition («L’heure électrique», jusqu’au 18 septembre), le pourtant très fourni MIH a dû faire appel à deux des plus gros collectionneurs suisses dans ce domaine (seuls les Anglais ont mieux, semble-t-il). L’un est ingénieur, l’autre venant du marketing…

Créativité pléthorique

En dehors d’une section plus didactique, cette exposition permet de se faire une idée de la créativité débridée, pléthorique, parfois délirante des «horlogers électriques».

Ces derniers ont utilisé le courant (des piles le plus souvent) pour donner des impulsions électromagnétiques ou mécaniques sur le balancier d’horloge par exemple. Ou pour mettre en réseau une horloge-mère et des compteurs d’impulsions secondaires.

La liste est sans fin, jusqu’à cette horloge à remontage thermique, où de l’air chauffé par une lampe, une fois propulsé dans un piston, vient remonter un ressort…

Plus sérieusement, l’horlogerie électrique a aussi connu la miniaturisation. Entre 1955-1970, certaines entreprises comme Ebauche SA (Swatch Group) ont sorti une poignée de modèles électriques de montre-poignet.

Mais tous étaient munis de contacts mécaniques, sujets à l’oxydation. De plus, leur fiabilité laissait à désirer. Des défauts rédhibitoires avec l’arrivée du quartz et de l’électronique.

«La montre électrique a été importante pour l’évolution de la pile, note Jean-Michel Piguet. Avec elle, les horlogers ont constaté l’exigence de développer des piles à la fois plus efficaces et plus fiables».

Un cahier des charges largement rempli au moment de l’invasion du quartz dans les années septante. Mais à ce moment-là, l’heure électrique s’était déjà arrêtée.

swissinfo, Pierre-François Besson

L’exposition «L’heure électrique» est présentée au Musée international d’horlogerie de la Chaux-de-Fonds jusqu’au 18 septembre (10h00-17h00, fermeture le lundi)
Elle fait suite à un colloque sur le sujet en 2004, dont les actes sont contenus dans le catalogue de l’exposition.

– Dans le cadre de cette exposition, des maquettes didactiques expliquent la production d’électricité.

– Un atelier permet aussi aux enfants de fabriquer une pile électrique selon le principe de la première pile réalisée par Volta en 1800.

– Cette exposition repose en grande partie sur les pièces des deux collectionneurs suisses Michel Viredaz et Jaime Wyss.

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