Un labo suisse sur la piste du vaccin anti-malaria
La première série d'essais cliniques d'un candidat-vaccin contre la malaria a débuté à Lausanne.
Principale composante du produit: une très grosse protéine de synthèse, fruit de onze ans de recherches menées par Dictagene, une start-up de la capitale vaudoise .
Fléau planétaire numéro un (avant même le sida), la malaria tue chaque année plus d’un million de personnes dans le monde.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus d’un tiers de la population du globe vit dans des pays où la maladie est endémique.
Et bien sûr, l’immense majorité de ces pays sont des pays pauvres.
Développé au Nord pour le Sud
«Malgré cela, il serait faux de dire que le vaccin contre la malaria n’intéresse pas les grandes compagnies pharmaceutiques», explique Christophe Reymond, directeur scientifique de Dictagene.
Ainsi, GlaxoSmithKline et l’armée américaine ont eux aussi un candidat vaccin en phase de test clinique. Ce qui n’inquiète pas outre mesure les gens de Dictagene.
Pour Christophe Reymond, «l’intérêt de développer un vaccin contre la malaria va dépendre non seulement des pharmaceutiques, mais également d’organismes comme l’OMS.»
Dans ce domaine donc, le climat semble plus à la collaboration qu’à la concurrence. Pour son produit Dictagene utilise d’ailleurs un adjuvant mis au point par GlaxoSmithKline.
Une protéine géante…
Le candidat vaccin de la start-up lausannoise n’en est pas moins profondément original. Et ceci avant tout parce qu’il est basé sur une protéine fabriquée de toutes pièces.
«Dictagene s’est spécialisée dans la synthèse de protéines de très grande taille, comme peu de laboratoires au monde sont capables d’en produire», poursuit Christophe Reymond.
Dans le cas présent, il s’agit de la reproduction d’un peptide que l’on trouve à l’état naturel à la surface du parasite responsable de la malaria.
Cette chaîne d’acides aminés ne compte pas moins de 102 composantes et sa fabrication nécessite près de 400 réactions chimiques successives.
…qui fonctionne comme un leurre
Une fois introduit dans le corps du patient, ce peptide artificiel fonctionne comme un leurre. Il fait croire à l’organisme que celui-ci est attaqué par la malaria et l’amène à fabriquer des défenses immunitaires contre la maladie.
«Mais notre molécule seule ne suffit pas, précise Christophe Reymond. Pour générer une réaction de défense de l’organisme, il faut lui adjoindre un adjuvant, soit une sorte de mélange d’eau et d’une huile très spécifique.»
Encore cinq ans
Déjà testé avec succès sur des souris et sur des singes, le candidat vaccin de Dictagene est donc prêt pour la première série d’essais sur l’homme.
Dans un premier temps, il s’agit uniquement de voir si le produit génère des effets secondaires indésirables. Depuis la mi-décembre, 36 volontaires sains – recrutés essentiellement à l’université de Lausanne – ont commencé à recevoir de petites doses du produit.
Cette première série de tests cliniques doit durer jusqu’à la mi-2003. Elle sera suivie de trois autres phases en vue de tester cette fois l’efficacité du candidat vaccin.
Quant au produit final, et pour autant que les tests soient concluants, il pourrait être sur le marché d’ici à cinq ans.
swissinfo/Marc-André Miserez
La malaria tue plus d’un million de personnes par année dans le monde
Pour l’heure, aucun vaccin n’est disponible contre cette maladie tropicale
Si les tests sont concluants, le vaccin mis au point par Dictagene pourrait être sur le marché d’ici à cinq ans
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