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La galère des étudiants en quête de logement

Dans toute la Suisse, des étudiants sont en quête de logement Ex-press

Pour les étudiants qui commencent leur année académique en Suisse ces prochaines semaines, la quête de logement est un premier obstacle à franchir. Récemment, des étudiants étrangers ont dormi plusieurs semaines sous tente avant de trouver un gîte.

C’est au camping de Vidy, à Lausanne, qu’une vingtaine d’étudiants étrangers avaient installé leurs quartiers en attendant de trouver quelque chose de plus solide. Aujourd’hui, le gérant est soulagé. «Grâce à la solidarité locale et à l’écho donné par les médias, ces jeunes ont tous trouvé quelque chose», confirme Claude Michel.

«Je ne sais pas ce qui s’est passé cette année, poursuit le gérant. Nous avons quelques étudiants toutes les années, juste au début du semestre, mais jamais autant que cet été.»

Du côté des campus, les responsables indiquent qu’il est encore trop tôt pour dire exactement combien d’étudiants seront sans toit au début des cours en octobre. Ils admettent néanmoins déjà que la situation s’est détériorée.

Pénurie aggravée

«La pénurie de logements estudiantins s’est accrue», se plaint Thomas Leibundgut, co-président du comité des affaires sociales de l’Union des étudiants de Suisse (UNES). Selon lui, les mieux lotis sont les Bâlois, qui compte un peu plus de 11’000 étudiants, et encore des logements disponibles, suivis par les étudiants de Berne.

Mais les grands centres que sont Lausanne, Genève et Zurich, qui accueillent des dizaines de milliers d’étudiants, des organisations internationales et des multinationales, subissent une crise aigue du logement, avec des prix en hausse constante.

«Nous avons vu le problème arriver, explique Thomas Leibundgut, mais nous n’aurions jamais pensé que des étudiants finiraient sous tente et dans des caravanes.»

2500 nouveaux étudiants

A Lausanne, l’Université et l’Ecole polytechnique fédérale (EPF) comptaient l’année dernière 18’870 étudiants. 2500 nouveaux inscrits sont attendus en octobre, dont deux tiers résident encore chez leurs parents. Mais pour le tiers restant, aucune des 1700 chambres d’étudiants de la ville n’est libre.

De plus, la liste d’attente est déjà «impressionnante», relève Gilberte Isler, à la tête des affaires socioculturelles des deux hautes écoles. «Nous demandons aux gens qui ont des chambres à louer de nous contacter.»

Il en va de même à Genève. «Cela devient de plus en plus difficile, dit Françoise Demierre, responsable du service de logement. L’Université a augmenté son parc de chambres de 20%, mais des blocs de petites chambres ont fermé et la demande a augmenté de 10 à 15%.»

Genève compte 2000 places dans ses résidences estudiantines, pour 14’890 étudiants. 3000 nouveaux inscrits arriveront ces prochaines semaines. A Zurich, dont l’Université compte 25’800 étudiants et l’EPF 16’200, quelque 800 nouveaux arrivants sont inscrits chaque semestre. Mais seuls 400 lits sont disponibles pour eux.

Venus de l’étranger

Selon les spécialistes, la progression de la demande en logements est partiellement due aux étudiants étrangers. Le nombre de jeunes gens inscrits en filière «bachelor» a augmenté d’environ 8% chaque année entre 1997 et 2008, indique l’Office fédéral de la statistique.

Fin 2009, 19% des étudiants inscrits au premier degré d’étude n’avaient pas de passeport suisse. Ils sont attirés par la bonne réputation des hautes écoles helvétiques et par les bonnes conditions d’études. La réforme de Bologne a en outre harmonisé les diplômes et encouragé la mobilité.

«Mais les étudiants étrangers sont passablement laissés à eux-mêmes, critique Thomas Leibundgut. Ils sont choqués quand ils se rendent compte que les clichés de richesses et facilité ne sont pas toujours réalité. Les frais d’écolage, les frais d’assurance et la difficulté d’obtenir une bourse pèsent sur les études», explique le représentant de l’UNES.

Toutefois, le monde politique semble de plus en plus conscient de ce problème de logement. De nouvelles résidences sont en construction, d’autres sont rénovées et des initiatives d’achat d’appartements ont été lancées à Lausanne, Genève et Zurich.

Ces interventions restent toutefois une goutte d’eau dans un océan. «L’argent est là, mais nous manquons de place, précise encore Thomas Leibundgut. Certaines communes ne sont pas intéressées à construire pour les étudiants, puisque ces derniers ne payent pas d’impôts…»

Hausse constante. Entre 1997 et 2008, le nombre d’étudiants étrangers commençant un cursus de bachelor ou de pré-bachelor a augmenté de 8% par année. Cette tendance devrait se maintenir ces 2 à 3 prochaines années.

Master. Nombre d’entre eux restent pour le master. Mais l’Office fédéral de la statistique ne peut pas dire avec précision s’il y a une véritable augmentation d’étudiants à ce degré-là ou si la hausse est due aux changements structurels de la réforme de Bologne.

Etrangers. Depuis cinq ans, entre 18% et 20% des étudiants commençant un master sont étrangers. Le chiffre absolu progresse en conséquence, de 20% de 3500 étudiants en 2004 (700) à 20% de 10’000 étudiants en 2008 (2000).

Doctorants. Le nombre d’étrangers parmi les doctorants est, depuis 30 ans, élevé. En 2008, ils représentaient presque la moitié (49%).

(Source: Jacques Babel, Office fédéral de la statistique)

Tandis que beaucoup de professeurs et d’étudiants s’accordent à dire que les étudiants étrangers améliorent la diversité et la qualité des universités, deux hautes écoles ont lancé, via l’hebdomadaire dominical NZZ am Sonntag , un débat sur l’introduction de quotas ou de taxes plus élevées.

Les recteurs de l’université de St-Gall et de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich se plaignent d’avoir trop d’étudiants étrangers de niveau insuffisant. Leur nombre mettrait les infrastructures aux limites de leurs capacités.

Un étudiant en master sur quatre est étranger et cette proportion pourrait passer à un sur trois ces prochaines années. Les branches les plus courues sont l’ingénierie, l’économie et les sciences.

Les deux hautes écoles proposent de restreindre l’accès aux cours de masters aux étrangers. Mais Lausanne et Genève ont rejeté cette idée, la trouvant «sélective et élitaire».

(Traduction de l’anglais: Ariane Gigon)

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