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Tirer la leçon d’une catastrophe climatique

Les touristes passent environ 750'000 nuitées par an à Engelberg.

La Suisse connaît à nouveau d'importantes précipitations et autres débordements. L'occasion de se souvenir de l'été 2005, lorsqu'une inondation a isolé Engelberg.

Une station touristique qui fait tout pour prévenir une éventuelle nouvelle inondation… et empêcher que les médias ne dramatisent les conséquences de ce genre de désastre.

Près de deux ans après les faits, des équipes d’ouvriers sont toujours en train de consolider la route au-dessus de la berge qui, avec la ligne de chemin de fer, a été emportée par les eaux. C’était la deuxième inondation de cette gravité enregistrée en Suisse en six ans.

Les dégâts subis par ce court tronçon d’asphalte et de rails, à l’entrée du village, ont coupé Engelberg du monde pendant plus de deux semaines.

Face à un tel événement sur un site touristique, les journalistes ont été attirés comme des mouches. A l’époque, quelque 200 reporters ont été transportés par hélicoptère et ceux qui n’ont pas eu cette possibilité se sont lancés dans une longue ascension à pied pour pouvoir glaner leurs informations.

Les dégâts matériels infligés à cette communauté de près de 4000 habitants, dont la vie dépend plus ou moins directement du tourisme, se sont limités à l’inondation de quelques caves et rez-de-chaussée. Ils ont été pour la plupart couverts par les assurances.

Mais les véritables dégâts ne sont apparus qu’ensuite: 18 millions de francs de pertes après que les agences de voyage eurent non seulement annulé les réservations pour Engelberg pendant les seize jours de déblayage de la route, mais pour le reste de l’été et l’automne.

«J’ai passé des jours et des semaines à tenter de les convaincre de revenir», raconte le directeur de l’Office du tourisme, Fredy Miller. Selon ce dernier, les médias ont alors donné l’impression qu’Engelberg ne serait plus jamais pareil, même après la fin des travaux de déblaiement, quelques mois plus tard.

Les affaires continuent

Mais en hiver, le nombre des visiteurs est revenu à la normale et les affaires ont repris l’été suivant. La saison des sports d’hiver génère environ 70% des rentrées d’Engelberg, mais l’été a pris de l’importance.

Il y a quelques années, la station a donc décidé de rester ouverte toute l’année et les hôtels, les boutiques et les installations de remontée mécanique fonctionnent onze mois sur douze. Cette décision visait à attirer plus de visiteurs asiatiques, qui voyagent plutôt hors saison.

Ces efforts de marketing se sont avérés payants. Selon Fredy Miller, les Indiens passent plus de nuitées dans les hôtels d’Engelberg que n’importe où ailleurs en Suisse.

Mais en devenant de plus en plus internationale, la station aura aussi des difficultés croissantes à éviter une vaste publicité médiatique en cas de catastrophe, petite ou grande.

S’il devait y avoir une «prochaine fois», Fredy Miller est bien décidé à se montrer plus restrictif sur les informations transmises aux médias.

«L’idée serait d’en dire très peu au début et un peu plus au fil des jours suivants, explique-t-il. Et, ensuite, d’opter pour une communication positive, par exemple en mettant l’accent sur la réouverture de la route en deux semaines.»

Un plan d’action

Plus jamais ça, jure de son côté, Martin Odermatt. «En 2005, nous avons pu réagir mais, bien sûr, nous n’étions pas préparés à une telle catastrophe», explique ce conseiller municipal, chef des services d’intervention d’Engelberg.

Martin Odermatt a prévu des plans d’urgence pour faire face aux pires caprices de Dame Nature – avalanches, éboulements et inondations. La route et la voie de chemin de fer sont en train d’être renforcées, mais d’autres efforts ont été faits pour réagir très rapidement et appliquer des mesures à plus long terme.

Les équipes d’urgence sont désormais préparées pour démonter les ponts trop bas en cas d’inondation. Le bois morts et les autres détritus qui descendent de la montagne sont régulièrement évacués, pour éviter qu’ils bloquent les rivières et les ruisseaux.

Une surélévation de la berge a été décidée afin de protéger le centre du village et des zone inondables ont été créées dans des secteurs moins construits.

La communication demeure le pilier de la stratégie d’Engelberg. «Il faut faire attention à ne pas sur-réagir, mais suivre attentivement les changements de temps», explique encore Martin Odermatt.

«Nous devons faire en sorte que nos visiteurs, qui n’ont jamais été soumis à une situation potentiellement dangereuse, se sentent en sécurité chez nous. La nature a deux visages et nous devons vivre avec ce fait.»

swissinfo, Dale Bechtel
(Traduction et adaptation de l’anglais: Isabelle Eichenberger)

Engelberg se situe à 1050 m. dans les Alpes de Suisse centrale, à 35 km de Lucerne.
La majorité de ses 3975 habitants vivent plus ou moins directement du tourisme.
Le village s’est construit autour d’un monastère de bénédictins, qui domine encore la vie du village, de l’école aux manifestations culturelles. Il a sa propre laiterie.

Selon les autorités suisses, ces inondations étaient «sans précédent» pour l’époque moderne. En 48 heures, il est tombé plus de 100 mm de pluie sur le versant nord des Alpes, causant la mort de 6 personnes et des dégâts estimés à 3 milliards de francs.

Le ministère de l’Environnement et d’autres organes gouvernementaux ont annoncé que le réchauffement de la planète pouvait provoquer à l’avenir une augmentation des catastrophes naturelles en Suisse.

Ils indiquent que les cartes de risques de tout le pays seront achevées d’ici 2011, ce qui permettra de savoir où des mesures doivent être prises pour amortir l’impact des catastrophes naturelles.

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