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Un nouveau test pour déjouer la menace de l’anthrax

Une vue microscopique de la bactérie révélée de l'anthrax – l'anthrax peut se révèler mortel pour les êtres humains (Keystone) Keystone

Une équipe de chercheurs suisses a isolé des anticorps pouvant servir au développement d'un nouveau test de dépistage de l'anthrax.

Ce test serait plus simple et plus précis que ceux qui existent déjà.

La dernière attaque grave à l’anthrax date d’octobre 2001 et a fait cinq victimes, des personnes contaminées après voir ouvert une lettre qui avait été envoyée à des politiciens et à des organes de médias aux Etats-Unis. La nécessité de disposer de tests rapides et fiables avait alors été mise en évidence.

Des chercheurs de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, de l’Université de Berne et de l’Institut tropical suisse de Bâle ont réussi à isoler une molécule spécifique à l’anthrax, située à la surface de la bactérie.

En quelques minutes

La molécule a ensuite été utilisée pour mettre au point un test qui fournit un résultat en l’espace de quelques minutes. C’est la principale nouveauté par rapport aux tests existants, qui nécessitent des méthodes génétiques relativement longues et coûteuses, explique l’équipe de recherche.

La découverte des chercheurs suisses a fait l’objet d’un article dans l’édition online du journal universitaire «Angewandte Chemie» [Chimie appliquée].

«Un test immunologique dure entre cinq et dix minutes. Or il est très important dans ce domaine d’obtenir une réponse rapidement», explique à swissinfo Peter Seeberger, professeur de chimie organique à l’EPF de Zurich, qui a participé à ces travaux.

«Si une personne contaminée est traitée dans les premières 24 à 48 heures, ses chances de survie sont bonnes. Au-delà, les chances de mourir sont de 95%, voire plus.»

Grandes difficultés

Il avait été très difficile jusqu’ici de mettre au point un test immunologique fiable. Ce genre de test détecte une substance à travers la création des anticorps qu’elle occasionne dans un système immunitaire. La difficulté venait du fait que la surface de la cellule de la spore d’anthrax est trop semblable à celles d’autres bactéries.

«Des systèmes basés sur des anticorpts existent déjà dans les bureaux de poste américains», ajoute Peter Seeberger.

«Mais, étant donné la ressemblance avec les protéines de surface d’autre bactéries relativement proches, les tests de dépistage à l’anthrax peuvent se révéler faussement positifs. Une bactérie innofensive donne un résultat positif.»

Du sucre…à la surface

Mais le professeur Seeberger et son équipe ont récemment découvert un sucre spécifique, un sucre complexe constitué de quatre entités glycosidiques, à la surface de spores d’anthrax.

Comme il est impossible d’isoler le glucide de la bactérie mortelle, les chercheurs l’ont reconstruit, chimiquement, de toutes pièces.

La molécule a ensuite été liée à une protéine porteuse spéciale et injectée à une souris. Le système immunitaire du rongeur a alors réagi, produisant des anticorps spécifiques, monoclonaux, à la surface de la molécule d’anthrax.

Une base pour le diagnostic

Peter Seeberger espère que ce nouvel anticorps pourra servir de base pour un système de diagnostic très sensible, de même que pour de nouveaux vaccins.

«Je pense que cet anticorps pourra être très utile. Il pourrait aussi jouer un rôle important dans la lutte contre la guerre bactériologique», estime le chercheur.

Le système de test pourrait être utilisé par les autorités, les bureaux de poste et les médecins potentiellement concernés par des attaques à l’anthrax, ajoute Peter Seeberger. Les forces armées engagées dans des interventions sur le terrain pourraient également en être dotées.

Les anticorps pourraient être intégrés à des systèmes de test déjà existants. Il faudra à peu près six mois pour qu’ils soient disponibles.

L’équipe de chercheurs suisses a déjà eu des contacts avec des entreprises susceptibles de fabriquer le test. Peter Seeberger espère que la production pourra se faire en Suisse, mais il n’exclut pas qu’une entreprise américaine emporte la mise.

swissinfo, Isobel Leybold-Johnson
(Traduction de l’anglais: Ariane Gigon-Bormann)

L’anthrax est une maladie infectieuse mortelle causée par une bactérie qui forme des spores, Bacillus anthracis. En temps normal, elle s’attaque aux animaux sauvages et domestiques tels que chèvres et moutons.

Les êtres humains peuvent être contaminés de trois façons: par inhalation des spores d’anthrax, par ingestion de viande infectée non suffisamment cuite et par absorption cutanée.

Les signes de la maladie apparaissent en général dans les trois jours après la contamination, mais, parfois, le temps de latence peut se prolonger jusqu’à deux mois.

Les antibiotiques sont efficaces s’ils sont adminisrés rapidement. Des vaccins existent pour la plupart des espèces.

La crainte d’attaques biologiques a considérablement augmenté ces dernières années. En Suisse, des efforts accrus sont menés pour protéger les civils en cas d’agression de ce type. Un centre de crise a été mis sur pied pour pouvoir réagir rapidement en cas d’attaque.

L’anthrax se transmet en règle générale entre animaux domestiques et sauvages mais il peut aussi toucher les êtres humains. Les cas sont cependant très rares dans les pays d’Europe et des Etats-Unis.

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